The Witch Slay
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 Faites entrer la sorcière!

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Sébastien Garin
Conseiller de la Suprema
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Sébastien Garin


Faites entrer la sorcière! Vide
MessageSujet: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeDim 30 Mai 2010 - 22:24

Sébastien Garin avait carrément sorti la cuirasse de cuir cloutée aujourd’hui et débarrassé son bureau de tout ce qui pouvait gêner, il était lisse comme un billot. Il s’était recoiffé, avait prit des gants de cuir noirs et des bottes de la même couleur. Un moment, il eut l’intention de prendre une cape rouge sang histoire d’accentuer son importance, mais elle était taillée pour un homme plus large que lui, il préféra y renoncer. Une cuirasse brune cloutée selon le motif de la Croix suffirait déjà à en jeter.

Jamais il n’avait vêtu des attributs aussi guerriers, jamais il n’avait voulu paraître aussi martial. Mais depuis le fiasco de l’Oracle, il les portait quotidiennement. Une nouvelle ère commencait pour Garin, celle de la discipline martiale. Gabriel Touchedieu, le pire de tous les rebelles avait été jeté en prison et son jugement ne saurait tarder. Tous les vieux chevrons de sa bande étaient morts, et sans eux ni le Gourdin, les jeunes loups ne hurlaient plus autant. Sébastien Garin avait imposé une discipline de fer à l’intérieur de la Collégiale, et beaucoup s’étaient fait surprendre par celle-ci. Ils n’avaient tout simplement jamais imaginé que le Second puisse un jour prétendre les commander. Sébastien Garin avait trouvé la voie du gueuloir et avait comblé l’espace laissé par les suivants du Gourdin.

L’anarchie prenait fin, Sébastien Garin reprenait la main. Il avait fini d’attendre que Louis reprenne en main ses troupes, maintenant, il fallait faire sans lui et à sa façon. Le changement n’était pas que dans la façon de seconder, il était aussi dans la tête de Sébastien Garin : il avait fini de considérer que son androgynie était un handicap pour se faire obéir et respecter, la virilité absolue n’était pas requise pour se faire suivre. Désormais, on lui obéirait, ou on se ferait punir.

Sarah Geisler toucha vaguement son habit de cuir cloûté. Elle n’aurait jamais cru avoir un jour à porter ce genre de chose, elle avait même souhaité ne jamais le porter. Mais les hommes ne comprenaient qu’un langage, le langage martial. Elle s’était donc coulé dans ce rôle. Un rôle horriblement masculin qu’elle avait tenté d’éviter jusqu’ici.

Mais lorsqu’elle se rappelait la soif de sang qu’elle avait ressenti sur le Parvis, elle se dit que finalement, cela n’avait pas changé grand-chose à ce qu’elle était déjà devenue, ce n’était que la validation d’une évolution qui s’était déjà faite. Elle avait hurlé comme un homme, avait traqué comme un homme, et s’était jeté sur les sorcières comme les inquisiteurs hommes.

Elle s’était jetée sur Europe.

Et ca, c’était la révélation la plus grave qui puisse exister. Ce n’étaient même plus des soupçons à l’encontre de la courtisane, c’était des faits avérés. Elle était sur le parvis parmi les vrais sorcières lorsque Sébastien Garin l’avait aplati au sol. Aucun doute n’était possible, et la parole du Second pouvait avoir de la valeur dans un acte d’accusation.

Europe pouvait d’ores et déjà passer au bûcher le temps d’écrire le dossier d’accusation, mais ce n’était pas ce que Sébastien Garin voulait. Il ne voulait pas la brûler, car une autre se lèverait à sa place. Il préférait d’abord tirer d’Europe tous les renseignements possibles et ensuite juger sa place dans la hiérarchie. Il aviserait ensuite de ce qu’il ferait d’Europe.

Les premiers temps, il voulait en plus réclamer d’Europe qu’elle désenvoûte Louis, qu’elle le rende à la Collégiale, à présent que le Second savait que Louis était une victime. Mais à la réflexion, finalement, elle pourrait le garder, cet Institoris, le Second n’avait plus besoin de lui. Tout cet épisode sanglant dans la Clairière au Muguet avait gravement fissuré le respect que portait Sébastien Garin à l’égard de son chef, et l’avait convaincu qu’il ne servait plus à rien. C’est pour ca qu’il s’était affirmé, c’est pour ca qu’il ne le consultait plus. Les changements factuels étaient peu sensibles, mais la façon d’envisager son poste était fondamentalement bouleversée.

Au contraire, qu’elle le garde, Sébastien Garin n’en voulait plus de Louis.

Pour l’heure, il l’avait convoqué séance tenante, avait envoyé deux hommes de mains paisibles et fidèles, équipés comme pour la guerre, la chercher. Lorsqu’elle viendrait, ce serait dans un bureau vide de tout espoir. Elle n’aurait pas le choix. Ce n’étaient pas des soupçons qu’il avait à l’encontre d’Europe, c’était des faits.
Il entendit les bottes des hommes de mains claquer. Sébastien Garin se mit en vitesse derrière son bureau et prit une attitude autoritaire et souveraine. On frappa trois fois. Sébastien Garin prit sa voix la plus grave :

« Faites entrer la sorcière ! »

Il n’avait pas dit « le suspect », ou bien « l’accusé ». Il avait dit la sorcière avant même qu’il n’y ait eu un jugement.

Lorsqu’Europe rentra, Sébastien Garin dans sa cuirasse brune cloûtée et ses gants de cuir noirs la regardait avec la dureté du diamant.
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Europe
Fugitive
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Europe


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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeLun 31 Mai 2010 - 0:59

[Précédent = La Fin des Ombres]


Des vêtements. Pratiques et confortables, de préférence. De l’argent. Ses papiers. Un carnet d’adresses. Des bijoux? Non, trop encombrant, trop inutile. Des cosmétiques? Idem. Des chaussures solides? Oui, il valait mieux prévenir que guérir.

Depuis de nombreuses minutes, Europe fouillait frénétiquement ses placards à la recherche du moindre objet qui lui serait utile, envoyant valser pêle-mêle ceux qui ne lui servaient à rien dans le reste de la chambre et entassant à la va-vite ceux qui l’intéressaient dans deux grosses valises pleines du strict minimum. Ses doigts tremblaient tellement qu’elle avait parfois du mal à saisir du linge ou ouvrir les poignées des portes. Il fallait qu’elle s’en aille d’ici, et vite. Ce n’était qu’une question d’heures avant que Sébastien Garin ne lui mette la main dessus. Des heures durant lesquelles sont cœur avait constamment battu la chamade, la sensation d’un danger imminent ne la quittant plus.

Elle ressentait encore la panique affluer dans ses veines, quand la vague d’Inquisiteurs vociférants avait déboulé sur le Parvis. L’adrénaline monter dans son sang, quand elle s’était mise à courir à son tour, fuyant au milieu d’une débandade kaléidoscopique. La peur la saisir littéralement à la gorge, quand elle s’était aperçue qu’une de ces bêtes étaient sur ses talons. Son cœur battant à tout rompre, ses tempes bourdonnantes, ses nerfs qui manquaient de lâcher à tout instant sous l’effet de la panique… Et puis elle était tombée sur le dur sol de pierre humide, fauchée par une étreinte déterminée, s’égratignant la peau sur les pavés. Hors de sa vue, des cris continuaient de retentir, comme dans une scène de cauchemar. Elle revoyait le Second penché sur elle. Elle revoyait son visage exalté, effrayant, baigné dans le contre-jour de la ruelle insalubre; une expression qu’elle n’aurait pas pu imaginer sur un visage d’habitude si féminin, mélancolique. Un visage qui à ce moment présent faisait se tétaniser son cœur.

En l’espace d’une soirée, entre le plan perfide et terrifiant de l’Oracle, la trahison de celle-ci et la cavalcade de l’Inquisition, la Grande Prêtresse avait éprouvé plus de peur mêlée d’adrénaline que pendant les vingt dernières années réunies. Quand Sébastien Garin, au lieu de l’égorger vive, avait quitté la ruelle, elle avait dû attendre de longues minutes que son cerveau se remette à fonctionner à peu près normalement. Puis elle s’était traînée, le souffle haletant, jusqu’au fond de la ruelle, avant de disparaître dans les ombres. Pourquoi l’avait-il épargnée à ce moment là, pourquoi ne l’avait-il pas embrochée comme les autres? Même en ayant retourné le problème dans tous les sens, elle n’en avait pas la moindre idée. Mais elle n’allait pas s’arrêter pour le lui demander.

Il fallait qu’elle parte d’ici. Tout le monde était en danger à Forbach. Fuir était bien entendu complètement indigne de son rang de dirigeante, car de nombreux êtres comptaient sur elle en cette période de crise; mais à vrai dire en cet instant, Europe s’en fichait comme d’une guigne. Elle n’avait qu’une envie: sauver sa peau. Si elle restait près de sa famille, celle-ci ne serait plus en sécurité
du tout. Il fallait qu’elle quitte le Comté, qu’elle se fasse oublier un moment, qu’elle trouve un endroit où se réfugier… et ensuite, elle aviserait.
Bouclant sa dernière valise, la Sorcière saisit une poignée dans chaque main et banda ses muscles. Les bagages étaient si lourds qu’elle avait peine à les soulever. Elle ne s’attarda pas le moins du monde à ce détail et descendit en trombe les marches de marbre du manoir désert. Julien avait déjà fait préparer sa voiture, qui l’attendait sur le perron. Avec l’aide de son domestique et du cocher, la Sorcière chargea ses valises et s’apprêta à monter à son tour dans le fiacre.

Au moment où elle posait son pied sur la marche, Europe entendit quelqu’un l’interpeller et vit avec effroi deux hommes de l’Inquisition, en cuirasse et armés, se diriger vers elle. Elle suspendit son geste tandis que les impressionnants Inquisiteurs lui tendaient un message qu’elle déplia et lut sans un mot dire.


Sébastien Garin a écrit:
Madame Eleonora Sun,

Vous êtes convoquée séance tenante dans le bureau de Sébastien Garin, à la Collégiale. Vous êtes priés de cesser toute activité dès maintenant et de suivre les représentants de l'Inquisition.

A la lecture de la missive, la Sorcière perdit toutes ses couleurs. Elle déglutit avec difficulté et observa les gardes, un instant tentée de prendre ses jambes à son cou. Mais c’était inutile… même si elle parvenait à les neutraliser, d’autres suivraient, et d’autres encore. Elle serait traquée et n’aurait pas de répit. De toute façon, à part faire une démonstration publique de ses pouvoirs de Sorcière (ce qui était loin d’être recommandé) elle ne voyait pas trop comment elle pourrait venir à bout des deux mastodontes
Elle les suivit donc avec la sensation de se disloquer; ou plutôt, ils l’entraînèrent avec son consentement ou non, en direction de la Collégiale. Tout le temps que dura le trajet, la Grande Prêtresse se mordit férocement l’intérieur des joues pour ne pas pleurer. Tout était fini, tout simplement. Son existence prendrait fin avant même qu’elle n’ait eu le temps de réaliser le moindre objectif concret qu’elle s’était fixé dans la vie. Elle laisserait sa tribu sans chef, démunie, amputée après la rafle de la veille. Sans même avoir pu revoir ses proches une dernière fois, présenté ses excuses à Adrien, faire tout ce qui lui tenait à cœur. Elle s’était souvent imaginée sa mort. Jamais cependant elle n’aurait cru qu’elle terminerait capturée par l’Inquisition. Grisée par son pouvoir, elle s’apercevait maintenant qu’elle s’était crue inconsciemment invincible.

L’architecture austère de la Collégiale qui se profilait fit naître dans sa gorge un sanglot qu’elle réfréna à grand peine. Ce n’est que lorsqu’elle pénétra dans les locaux tant redoutés qu’Europe pensa à Louis, le seul homme qu’elle soit parvenue à aimer. Après l’avoir haï pendant des années, puis tenté de le tuer deux fois, elle le trahirait en apothéose quand il verrait sa véritable nature. Cette dernière pensée l’acheva littéralement et elle dut mobiliser toutes ses forces pour ne pas tomber comme une pierre. Son ventre, ses poumons, sa gorge lui faisaient mal, mais elle refusa de pleurer et de laisser montrer sa faiblesse. Toute sa vie, elle n’avait été que Paraître. Son existence sociale n’avait eu pour seule vocation qu’à garder la tête haute et digne en toutes circonstances. Alors une dernière fois, elle conserverait cet air impavide. Ce serait sa dernière empreinte sur le monde des vivants.

Elle était si désespérée qu’elle était maintenant pressée que ça se termine. Flanquée des deux gardes, Europe pénétra finalement dans le bureau de Sébastien Garin, épuré et austère au possible, à l’image de son propriétaire qui s’était manifestement donné pour l’occasion un air imposant et martial. Son allure de tortionnaire, du moins aux yeux de la Sorcière, fit son effet ; elle sentit ses mains trembler de plus belle et les joignit pour dissimuler ce détail embarrassant. Elle n’avait jamais craint Sébastien Garin et son physique androgyne, et sa personnalité trop intravertie, et son manque d’autorité. Il en allait tout autrement aujourd’hui. Cet homme tenait sa vie entre ses mains. Pourquoi ne l’avait-il pas tuée ce soir-là? Il en avait pourtant eu l’occasion… Peu importe, désormais.
Europe trouva la dernière force de relever le menton et de prendre un ton neutre.


"Allez-y. Faites votre devoir."


Dernière édition par Europe le Dim 27 Juin 2010 - 2:41, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeJeu 10 Juin 2010 - 13:42

Le devoir de Sébastien Garin se résumait très vite dans ce cas précis. La partie qui durerait le plus de temps, ce serait de rédiger l’acte de condamnation et d’écrire les preuves invoquées. Pas de procédure d’interrogatoire, de justificatifs à fournir, de présomption d’innocence ou de culpabilité… la procédure était tellement simplifiée qu’Europe pouvait ne pas voir le matin arriver avant le bûcher.

L’androgyne regarda Europe avec un air entendu, puis contourna le bureau et sortit de quoi écrire. Avec son écriture penchée et légèrement déformée, elle commença à noircir soigneusement l’acte de condamnation. Le Second s’était arrangé pour qu’Europe puisse lire à l’envers ce qu’il écrivait au fur et à mesure, et s’appliqua à écrire en gros, centré :

« Acte d’accusation sur la personne d’Europe Eléonora Sun »

Il sécha un peu sur les formules à utiliser, l’inquisition était excessivement codifiée et les vices de formes étaient si nombreux. Le Second tira un petit formulaire de son tiroir et le feuilleta jusqu’à trouver les bonnes phrases. Europe put voir se dessiner son destin à grands coups de phrasé administratif.

La rédaction de cette feuille fut interminable, le crissement de la plume au milieu d’un silence de cimetière sciait les nerfs avec l’efficacité d’un bûcheron, à aucun moment, le Second n’eut l’air de vouloir abréger le supplice ou rompre le silence, établir un lien ou une discussion. Il s’appliqua dans ses pleins et ses déliés, consulta très régulièrement son formulaire, et montrait indirectement à Europe l’avancement de son travail. Il s’amusait en secret de la tension qu’il instaurait. Il finit enfin sa feuille par :

A Forbach, le
Sébastien Garin, Second de l’Inquisition à Forbach


Il ne mit ni la date ni la signature, mais le retourna pour qu’Europe puisse le lire et se rendre compte de tout ce qu’elle risquait. Alors que la sorcière lisait, il fit signe aux deux hommes de mains de partir, ce qui allait suivre ne devait pas être connu d’autres personnes. Les hommes de mains ne discutèrent pas, ils se retirèrent sans problème. Sébastien Garin savoura ce semblant d’autorité.

« Comme vous pouvez le voir, ce document vous promet le poteau enflammé dès qu’il sera valide. Pour le valider, c’est en mon pouvoir, il me suffit de mettre la date, et ma signature. Certains possèdent une vie dans le sang qui tâche leur épée, moi j’ai votre vie dans l’encre qui tâche le papier. »

Il était assez fier de sa trouvaille, ce n’était pas le genre de chose qu’on attendait de quelqu’un issu de la petite bourgeoisie. Mais pourtant ce n’était pas un duel de mots qu’il cherchait. On ne fait pas de duel quand on est sûr de gagner.

« Mais avant de le valider, j’aimerais estimer la valeur de ma prise… »

Vocabulaire de chasse, lui le chasseur avait il attrapé un moineau ou un faisan ?

« Quel est votre importance parmi les Sorcières ? Notez que je ne demande pas encore de noms. Juste votre rang dans leur hiérarchie. »

La vie d’Europe était en bascule sur une réponse. Qu’elle fasse la mauvaise et elle mourrait, qu’elle fasse la bonne et elle survivrait jusqu’à la prochaine question.
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Europe
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeVen 11 Juin 2010 - 0:33

Tant d’espoirs… tant d’espoirs qui ne se verraient jamais réalisés. Tant de projets qui ne verraient jamais le jour. Tant de choses qu’elle n’avait pas dites et qu’elle aurait voulu dire. Tout cela tourbillonnait dans l’esprit d’Europe qui avait l’impression de se liquéfier sur place. Elle ne tenait debout que par miracle, ses jambes manquant de se dérober sous elle. Y avait-il plus humain que la peur qu’elle ressentait à ce moment face à la mort? En tant que Sorcière, elle savait pertinemment que cette dernière n’était pas une fin en soi. Mais en fait, ce n’était pas ça qui l’inquiétait et la désespérait. C’était tout ce qu’elle laissait derrière elle, de ses ennemis aux pauvres âmes qu’elle avait défendu pendant toutes ces années. Et Louis… apparaître ainsi à Louis lui déchirait le cœur.

Sébastien Garin ne semblait pas disposé à bouger, à parler, à abréger son supplice. Au contraire, il la toisait avec un air calme et déterminé, puisque tout était déjà joué d’avance. Qu’attendait-il? Qu’elle fasse la conversation? Non, peut-être juste qu’elle le supplie. Ou alors qu’il laissait volontairement une tension insupportable monter, pour le plaisir de la voir fondre comme neige au soleil… Enfin, il se décida à bouger pour s’asseoir à son bureau et rédiger une missive. Europe n’eut besoin que d’une poignée de secondes pour deviner qu’il s’agissait de l’acte de condamnation la concernant. Une bouffée de colère frustrée et désespérée monta en elle. Avait-il tellement besoin de cette mise en scène théâtrale? Pensait-il qu’elle ne se rendrait pas compte de la gravité de la situation si il n’exagérait pas outrancièrement le moindre fait? Elle n’avait jamais aimé ni détesté Sébastien Garin, qu’elle considérait plutôt jusqu’ici comme un élément du décor. Mais à ce moment précis, elle le haïssait plus que tout, lui et sa face de fillette qu’elle avait envie d’aplatir à grands coups de poings, et ses yeux cristallins qui l’avaient toisé sûrs de leur supériorité, et son armure trop grande qui lui donnait l’air d’un tortionnaire stéréotypé… Jamais elle n’aurait crû qu’il pouvait adopter un tel comportement. Son physique androgyne et peu sûr de lui n’aurait jamais pu révéler une telle cruauté. Il jouissait visiblement de la voir souffrir devant ses yeux, de perdre son temps en prolégomènes inutiles et de faire durer le calvaire… La peur qui étreignait ses poumons et la prenait aux tripes était toujours présente, mais elle avait été supplantée par la colère, rendant son souffle plus rapide et saccadé. Europe respirait superficiellement et mal. Elle n'avait plus qu'une envie: remettre à sa place ce petit impertinent efféminé et mourir en paix.

La Grande Prêtresse l’observa pendant le temps (très long au demeurant) qu’il prit pour rédiger sa lettre. Il la fit ensuite pivoter pour qu’elle en voit bien les différentes composantes, en écoutant le Second blablater pour lui exposer –une fois encore- qu’il tenait sa vie entre ses mains. Le tout finissant par une phrase insipide qu’il avait peut-être crue pertinente ou poétique. Quel baratin stupide! Comme si elle ne savait pas déjà qu’elle était foutue, que tout dépendait de lui, qu’il était tout-puissant sur sa vie en cet instant. Et alors quoi? Il n’espérait tout de même pas qu’elle lui lèche les bottes! Europe savait qu’elle n’avait pas d’échappatoire, que tout était irréversible. Même si elle mettait hors d’état de nuire Sébastien Garin, ce qu’elle aurait pu faire en deux temps trois mouvements, il y avait des gardes dehors. Et même si eux aussi, elle les neutralisait, il restait encore à s’enfuir de la Collégiale. Et à sortir de Forbach. Et si Garin avait prévenu d’autres personnes à propos son identité, elle serait recherchée, même dans les environs. Non, il n’y avait aucune possibilité de fuite, et la Sorcière s’y était résolue. Mais la colère qui la portait en cet instant lui donnait des ressources insoupçonnées. Elle n’allait pas mourir dans le mutisme et l’humiliation, non. Elle brûlerait la tête haute, en martyr, telle Jeanne d’Arc, après avoir craché son venin à la face de cet empafé à la timidité dysfonctionnelle qui se prenait pour le Seigneur.

La Grande Prêtresse lança au Second son regard le plus meurtrier.


"C’est grisant, n’est-ce pas? Pour une fois. Qu’on vous obéisse sans même que vous ayez à élever la voix. Qu’on soit tremblant et sans défense devant vous, soumis à vos ordres. Vous prenez votre pied, avouez! Ça vous change tellement de ces brutes bestiales sur qui vous avez le plus grand mal à déployer votre autorité… Qui vous marchent sans cesse sur les pieds parce qu’elle font au minimum deux têtes de plus que vous, ou que votre tête ne leur revient pas!"

La Sorcière releva le menton, prenant une grande bouffée d’air. Même elle faisait facilement une dizaine de centimètres de plus que ce nain qui se croyait impressionnant en armure. Sa proie? Est-ce qu’il l’avait bien regardée, ou essayait-il encore de se donner un air sérieux? Elle allait mourir, qu’elle coopère ou non. Alors pas question de se montrer conciliante. Il lui demandait « juste » son rang ? Oh quelle magnanimité, vraiment! Il ne manquait plus qu’elle lui dévoile des informations sur le clan en plus… quand un chef d’Etat tombait, il était muet comme une tombe, même sous la torture. Si il y avait une seule personne devant laquelle elle aurait pu révéler le détail de ses activités occultes, c’était bien Louis Institoris. Mais sûrement pas Sébastien Garin.

D’un geste vif, elle se pencha en avant et s’empara de l’acte qu’il venait de rédiger. Avant qu’il n’ait eu le temps de se lever et contourner le bureau, elle en profita pour déchirer le papier en mille morceaux, ponctuant chacune de ses syllabes d’un déchirement supplémentaire:


"Mon… rang? Je… ne… suis… rien… juste… une… petite… merde!" Pour finir, elle balança les restes du papier en l’air qui retombèrent en une pluie de confettis. Elle avait que cela ne suffirait pas le moins du monde pour la sauver. Mais l’acte était long et ennuyeux à écrire, et il devrait maintenant tout recommencer de zéro. "Comme vous, d’ailleurs! Vous vous croyez important, mais vous n’êtes rien, rien!"
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Sébastien Garin
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeVen 11 Juin 2010 - 10:22

Sébastien Garin encaissa avec un petit sourire suffisant tout ce qu’Europe lui balanca à la figure. Il savait qu’il était objet de moqueries, qu’on ne le respectait pas, voire même parfois qu’on l’ignorait, il était si insignifiant, parfois on se posait même la question de pourquoi il était à ce poste si haut placé. Pas un ne pensait que c’était parce qu’il était plus loyal que n’importe qui, malgré ses airs efféminés. Pas un ne respectait sa loyauté. Mais c’avait changé, et Europe en serait la première victime. Oui il prenait son pied, oui il savourait son autorité toute neuve, c’était la première fois qu’il dominait, pourquoi ne pas goûter ce plaisir jusque là interdit ?

Touchedieu en prison et promis à être pendu, une sorcière au bûcher, c’étaient les sacrifices qui officialisaient une nouvelle ère dans la Collégiale. Déjà, privés de leurs principaux agitateurs, les hommes de mains ne rechignaient plus et avaient retrouvés la voix de la raison.

Il aurait cependant dû prévoir qu’elle allait rafler le papier et le déchirer, il voulut faire un geste mais trop tard. Le travail d’un quart d’heure réduit à néant, il y avait pire mais bon, d’une façon aussi puérile et stupide… il avait été trop orgueilleux dans ce cas présent. Mais il savait quel rang elle avait. C’était une sous-fifre d’Olrun ou du Lys comment savoir. Il avait espéré tomber sur une tête des sorcières en capturant une noble, il était réellement déçu que ce ne soit pas le cas, elle lui aurait tellement plus utile autrement, et il n’aurait pas à gâcher une vie humaine…

La vie d’un individu n’a que peu de valeur si elle n’est pas accompagné d’une position sociale ou hiérarchique intéressante. Europe était une sorcière du rang, les consignes de l’inquisition étaient simples et sans équivoque : la mort directe et sans remords. Il la laissa cracher sa dernière insulte, et ne réagit pas. Cela faisait tellement de temps qu’on lui disait ca en face ou dans son dos.

« Très bien madame, je n’ai pas besoin de petites merdes. »

Il se leva et d’une voix forte il interpella les hommes de mains de l’autre côté de la porte.

« GARDES ! »

Ils entrèrent, toujours les deux mêmes, et prirent chacun un bras d’Europe qui se tortilla un peu. Ils resserrèrent simplement leur poigne et attendirent les instruction du Second.

« Où en est le bûcher ? »
« Le poteau est installé, on est en train de rassembler les fagots au pied. »

Sébastien Garin avait été jusqu’à préparer l’échafaud en même temps qu’il arrêtait Europe. La sorcière ne devait pas voir le jour se lever une nouvelle fois, ses cendres devaient être dispersées à l’aurore.

« Monsieur, ne devrions nous pas attendre Louis ? »
« Louis ne viendra pas, il s’épargnera je pense un tel spectacle. »
« Il est le chef… »
« Je suis son Second. J’assumerai… après. Laissez le finir sa nuit, peut être en ne retrouvant pas sa maîtresse il s’inquiètera enfin de sa Collégiale. »

Sébastien Garin était devenu une statue de marbre, on pouvait sentir transpirer son ressentiment contre un chef absent, absence qui était la cause de tout le mépris et l’irrespect qu’il avait subi ces derniers mois. Institoris était censé s’occuper des troupes, pas Garin. Le Second avait dû assumer ce rôle et en avait été incapable, en était témoin le fiasco de l’Oracle.

Il avait été traîné dans la boue pour son incompétence, simplement parce qu’il avait été abandonné sans préparation. Et ca c’était la faute d’Europe qui l’avait envoûté. Voilà pourquoi il ne se sentait pas l’envie d’être profondément humain aujourd’hui.

« Emmenez la petite merde dans la cour, elle ne nous sera d’aucune utilité. »

Les gardes commencèrent à faire demi-tour, mais ils étaient encore loin d’être sortis du bureau de Garin.
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Europe
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Europe


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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeSam 12 Juin 2010 - 0:19

Europe s’aperçut avec une frustration décuplée que tout ce qu’elle lançait à la figure de Sébastien Garin ne semblait pas lui faire le moindre effet. La Sorcière avait déballé toutes ces insultes autant pour lui dire ses quatre vérités que pour le déstabiliser, mais elle aurait du se douter que cela ne fonctionnerait pas. Il était trop sûr de son pouvoir en cet instant, déguisé dans son armure d’homme d’une manière presque déconvenante, se prenant au sérieux pour une fois qu’il en avait la possibilité… Europe était dégoûtée, révulsée par cet homme qu’autrefois elle avait cru bon, par ces traits féminins qui avaient un jour semblé porter de la compassion ou un semblant de raison. Elle contemplait à ce moment même toute la faiblesse du cœur humain, si jubilatoire dans son sentiment d’écraser et de dominer les autres; à présent c’était sûr, Louis avait été une perle rare dans ce monde de brutes épaisses et mal dégrossies, une âme sincère et idéaliste dont la plus grande qualité avait été finalement sa plus grande faiblesse: vouloir d’un monde où tous vivraient dans la sécurité.

Le Second lui annonça finalement d’une voix posée qu’il n’avait pas besoin d’elle. Elle n’en pouvait plus tellement elle écumait de colère désespérée devant le visage impassible qui l’observait dans tous ses états. Pourquoi avait-il cet air si neutre, pourquoi restait-il calme… elle aurait tellement préféré qu’il hurle, qu’il se fâche, qu’il la violente même. Au lieu de ça, il restait d’une sérénité démolissante, comme si il était un saint dans son bon droit que rien ne pouvait atteindre, sûr de sa maîtrise et de son pouvoir. Quelle ordure! Comment osait-il la prendre de haut, comment pouvait-on se croire intouchable à ce point? Elle aurait tellement voulu lui refaire le portrait, casser cette tronche efféminée une bonne fois pour toute…


"C’est ça, allez-y! Montrez cette image de mi-bourreau mi-tapette à votre sale rejeton! Après tout, j’imagine qu’il deviendra comme vous, lui aussi!"

C’était puérile et peu pertinent, c’était de la méchanceté gratuite et ça ne ressemblait pas à Europe. Mais alors, pas du tout. Seulement, elle savait que la situation lui échappait de plus en plus et tentait inconsciemment de se raccrocher à quelque chose, n’importe quoi. Son esprit aurait voulu accepter la mort en paix, qu’elle puisse disparaître sans faire de vagues et avoir enfin le repos qu’elle méritait. Mais son corps était incapable de s’y résoudre et se cabrait encore face à cette réalité révoltante, matérialisée en ce visage si peu virile. Alors que l’envie de se jeter sur Sébastien Garin devenait souveraine, Europe sentit deux mains larges empoigner fermement ses bras. Elle tenta de se dégager sans succès de cette étreinte, le simple contact des mains gantées la faisait bondir; puis, l’esprit fou, elle écouta vaguement le Second parler de bûcher, de Louis, de Collégiale, sans vraiment comprendre le sens des mots qui parvenaient jusqu’à ses oreilles.

"Vous-êtes-méprisable!"
cria-t-elle en hachant bien ses syllabes, jusqu’à ce que des larmes brûlantes jaillissent de ses yeux, contrecoups d’une sainte colère. "Je vous déteste… je vous…"

La Sorcière laissa sa phrase en suspens et baissa la tête pour dissimuler son visage, s’obligeant à prendre de grandes respirations afin de se calmer. Elle trouvait sa faiblesse détestable et insupportable. Mais là, c’en était vraiment trop… elle aurait tellement préféré se retrouver face à un Inquisiteur normal, violent et bestial, qui serait heureux de sa capture, plutôt que de cet espèce de bloc de marbre à la féminité crispante et à l’air hautain insupportable! C’était tellement injuste. Les deux plantons la tirèrent en arrière tandis qu’inconsciemment, elle plantait fermement ses talons dans le sol et cambrait le dos pour résister à la traction. Quand ils furent sur le point de franchir la porte pour quitter le bureau, la vérité s’imposa à Europe comme une évidence et avec plus de force que jamais: elle ne voulait pas mourir. Fallait-il nécessairement faire le sacrifice de sa vie pour protéger le clan? Ne pouvait-elle pas donner à Garin les informations qu’il souhaitait, et dont il ne pourrait rien faire de toute façon, car elles ne prenaient leur sens que couplées à d’autres? Oui, après tout… elle avait déjà eu des rapports privilégiés avec l’Inquisition, et son peuple ne lui en avait pas tenu rigueur. Pire, il l’avait élu Grande Prêtresse alors qu’elle avait eu une relation avec Louis Institoris. Qui lui en voudrait de sauver sa peau… peut-être qu’elle pouvait faire une toute petite exception… peut-être que…

Avec force, elle coinça ses deux pieds dans l’encadrement de la porte pour empêcher les gardes de la tirer en arrière.


"A… attendez…"

Les yeux rougis et le visage ravagé par les larmes, Europe releva la tête et regarda Sébastien Garin. Mon dieu, qu’elle haïssait cet homme… même Alicia avait fait l’objet de moins de colère, alors qu’elle était son ennemie depuis près de quatre ans. La Sorcière eut le plus grand mal à parler tant sa gorge était serrée et sa voix tremblante. Au bout d’un long moment, elle parvint enfin à ravaler ses larmes et s’exprimer à peu près normalement.

"Je… J’avoue… je ne suis pas si… en bas de la hiérarchie… alors…"
Elle déglutit un bon coup et fit un pas vers le Second, comme un gage de sa bonne volonté. Ses yeux étaient gonflés, ses cheveux en bataille, sa respiration sifflante.

"Promettez moi… il faut que nous ne disiez rien de tout ça à Louis… Sur moi et sur le fait que je sois une s… Rien du tout, pas le moindre mot! Si vous faites ça… je vous dirais ce que vous voudrez… Mais si jamais… si jamais vous lui dites ne serait-ce qu’un mot…" Elle s’interrompit, le regard brûlant, à deux doigts de se disloquer entre haine et désespoir. Sa phrase demeurait en suspens mais était sans équivoque. Si Sébastien Garin avertissait son chef, Europe se refermerait telle une huître et serait plus muette qu’une tombe. Et cette fois-ci, il lui faudrait beaucoup plus que des menaces ou un bûcher, ou même la torture, pour la faire parler.
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeJeu 17 Juin 2010 - 23:18

Le visage du Second devint livide lorsqu’Europe évoqua l’image qu’il renvoyait à son fils. Sarah Geisler, blessée, hurlait de rage mais n’avait pas le droit à la parole dans cette situation. Sa main se serra sur son bureau jusqu’à avoir les jointures blanchies, Sébastien Garin se retint de laisser Sarah Geisler s’exprimer et se jeter sur elle avec un cri d’ourse en colère. Mi-bourreau mi-tapette, comment osait elle ? Sarah n’était ni méchante, ni un homme râté. Elle eut réellement peur que David de l’autre côté de la porte ne guette la scène et n’ait entendu ces paroles. Ses mains entières devinrent blanches et crispées à mort sur la table.

Rien que pour cette insulte, Sébastien Garin était prêt à allumer le bûcher lui-même, fourrer la torche dans la paille, puis la lancer sur le visage d'Europe ensuite pour que ses cheveux prennent feu. On ne parlait pas ainsi à propos de son fils. Il sourit d’une façon malsaine lorsque les gardes lui obéirent et commencèrent à l’emmener à la mort. Europe se débattait elle voulait vivre. Mais elle allait mourir. Une sorte d’ivresse comparable à celle qu’il avait ressentie sur le Parvis à courir après les sorcières le prit, plus doucement et plus insidieusement. Il avait la vie et la mort d’un être humain dans sa main, le pouvoir suprême. Sarah Geisler n’avait aucune envie d’éprouver de la pitié pour une femme qui venait de parler d’elle et son fils ainsi.

Et, chose inattendue, mais espérée, Sébastien Garin réussit à briser Europe. Ca aussi c’était doux. Et conformément à ce qu’il pensait, elle n’était pas la plus humble des sorcières. Il aurait été bizarre d’ailleurs qu’il en soit autrement, vu sa position sociale. Une noble restait une noble quelque soit son milieu et sa double vie. Mais il y avait une suite à cet aveu. Une suite qu’il écouta attentivement.

Ne rien dire à Louis. Europe ne le savait pas encore, mais cela rejoignait les objectifs de Sébastien Garin. Que Louis s’en mêle était même contre productif par rapport à ce qu’il avait en tête. Sébastien Garin aurait dû acquiescer tout de suite et lui promettre sur un ton solennel qu’il ne trahirait pas Europe, mais Sarah Geisler voulait plus. Elle voulait se venger de celle qui avait insulté sa capacité à être une mère. Elle sentait la haine d’Europe à son encontre, et elle-même n’avait aucune raison de l’estimer. Elle mit son visage à hauteur de celui d’Europe et siffla :

« Je ne dirai rien à Louis, si et seulement si vous ne faîtes plus aucune allusion, même voilée, à mon fils. Je n’ai pas de sang renommé, mais j’ai une parole. »

Curieusement, cette sorte de marché à double sens était beaucoup plus crédible qu’une belle promesse chevaleresque. Un beau geste aurait été douteux de la part de celui qui l’avait condamné à mort l’instant d’avant, mais ce persiflage était compréhensible.

« Je ne dirai rien à Louis, surtout que ce n’est pas mon intêret. Ce n’est pas ce que je recherche. Lâchez là, mais restez à portée. »

Les deux hommes lâchèrent la femme, et firent un pas de retrait, barrant la porte.

« J’avais besoin d’avoir une sorcière importante sous la main, pour un projet bien particulier, et il ne s’agit pas de trahison. En fait, ce que je souhaiterai, c’est que l’inquisition quitte Forbach sans effusions de sang supplémentaires. »

C’était déjà énorme comme aveux. Sébastien Garin avait mis la dose pour faire sortir Europe de sa haine.

« Mais d’abord, dites moi qui vous êtes exactement. Simple aguerrie, seconde, ou chef ? Olrun ou Lys ? »
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeDim 20 Juin 2010 - 0:55

Peine perdue. Echec, fiasco total… Europe en avait la nausée. Elle se sentait à deux doigts de vomir ou de perdre la tête et luttait pour ne pas que ses nerfs lâchent. Même en mentionnant et insultant ouvertement son fils à travers lui, Sébastien Garin n’avait eu qu’une réaction mitigée. Convaincue, certes, mais avec peu d’ampleur; à peine un poing serré et une mâchoire contractée. Si la Sorcière avait souhaité qu’il se fâche et hurle et la menace, hé bien, c’était totalement raté. Il était donc bel et bien impossible de fissurer ce masque d’impassibilité qu’elle détestait tant… cela ne fit que redoubler sa frustration et sa fureur. Louis avait été un meneur certes parfois cruel mais profondément humain. A la place, ils avaient mis une statue, une espèce de bloc de marbre qui ne dévoilait jamais ses émotions… si tant est qu’il en ait. Et c’était avec ce larbin sans âme qu’elle était tenue de négocier… y avait-il quelque chose de plus triste? Elle était à deux doigts de pleurer de déception.

C’était la deuxième fois en l’espace de quelques semaines qu’elle se retrouvait confrontée à un tel échec personnel, alors qu’elle n’en avait eu strictement
aucun autre pendant tout le reste de sa vie. Autant dire que tout n’allait pas pour le mieux pour elle en ce moment… Car Europe avait ceci de particulier qu’elle pouvait Sentir, en même temps que Ressentir et interpréter, les personnes qui se trouvaient en face d’elle. Jamais elle ne s’était retrouvée dans l’incompréhension plus de quelques secondes face à leurs sentiments et états d’âme. D’aucuns appelaient cela « son don d’empathie » ; elle-même ne lui donnait pas de nom, se contentant de prendre ce talent avec philosophie. Comment s’y prenait-elle, en jouant la comédie ou en restant naturelle, elle n’en savait fichtre rien; mais toujours était-il qu’elle inspirait invariablement des sentiments profondément humains aux gens qui la côtoyaient. La preuve… Louis Institoris lui-même était tombé amoureux d’elle. Y avait-il plus humain que l’amour? Autre preuve… Alicia l’avait élevée au rang de pire ennemie. Y avait-il plus humain que la haine?
Mais ces dernières semaines, tout avait changé; elle s’était retrouvée confrontée à deux murs, deux cloisons opaques et obtuses qui lui interdisaient l’accès aux strates de l’émotion et de l’essence. Premièrement, Gabriel Touchedieu. Ce vieux rustre qu’elle avait été contrainte d’assommer avec un candélabre pour se soulager de la frustration de son échec, elle, l’Europe qui avait toujours réussi à tout régler par le dialogue. Et deuxièmement… Sébastien Garin. Un visage efféminé qui aurait pu révéler un homme infiniment émotif alors qu’il ne l’était pas du tout. Mais qu’est-ce qui clochait chez eux? L’un comme l’autre avaient été tels des rochers, absolument insensibles à la contrariété ou à l’émotion, même dans sa quintessence la plus épurée; chacun avait montré un détachement systématique et presque littéral de la réalité affective au profit de quelque intérêt obscur (le pouvoir pour l’un, la sauvagerie pour l’autre). Arriverait-elle jamais à les remettre dans le droit chemin? Elle en doutait. Elle n’était pas en position de négocier.


"D’accord" consentit-elle les mâchoires serrées. Ne plus parler de son môme? Europe ne voyait même pas pourquoi ce terme figurait dans le marché. Si il savait à quel point elle se préoccupait peu de son rejeton… Elle l’avait mentionné comme elle l’aurait fait avec sa mère, son oncle ou son cousin; l’attaque verbale n’était pas ciblée, elle avait juste été lancée dans le but de blesser. Ce qui manifestement avait marché très moyennement.

Sur un ordre de Garin, les gardes desserrèrent enfin leur étreinte sur les bras d’Europe. Se sentant plus libre, celle-ci dû à nouveau lutter contre une furieuse envie de prendre ses jambes à son cou. Tous ses instincts lui criaient de fuir; par conséquent, elle les fit taire comme d’habitude et tenta plutôt de faire fonctionner correctement son cerveau. C’était fini pour elle: elle était démasquée. En revanche, peut-être restait-il de l’espoir pour le reste du clan. Il s’agissait maintenant de tomber en faisant le moins de dégâts collatéraux possible, en emportant le moins de personnes possible dans sa chute.
L’aveu de Sébastien Garin fit se gonfler le cœur d’Europe d’un nouvel espoir. Si tel était effectivement son objectif, il y avait alors bel et bien moyen de s’arranger. Un Inquisiteur qui souhaite que l’Inquisition quitte Forbach était en soi terriblement suspect; mais puisque le Second était un homme si secret, il y avait sûrement bien plus de buts en lui que ce qu’on en devinait déjà. Après tout, tout le monde avait ses raisons… En outre cet objectif correspondait parfaitement à ceux d’Europe; si l’Inquisition laissait enfin le comté tranquille, elle pourrait vivre sa relation avec Louis dans la paix et la stabilité.
Il était évident qu’en échange, Garin lui demanderait nécessairement quelque chose de terrible. Europe ne s’y était pas résolue; en revanche, elle était décidée à mener sa barque habilement. Par principe, elle ne mentait presque jamais; conséquemment, elle mentait comme une arracheuse de dents lorsque cela s’avérait nécessaire, surtout à la survie du clan. Rien ne lui interdisait, dans les termes du marché, d’égarer le Second sur des fausses pistes. Et elle n’en serait jamais sanctionnée si ce dernier ne découvrait pas le pot aux roses!
La Sorcière décida de jouer franc jeu pour le moment; elle aviserait par la suite. Avant de répondre cependant, elle jeta un regard suspicieux aux gardes puis à Garin, signe qu’elle ne souhaitait clairement pas qu’ils soient présent lors de sa confession et qu’elle serait plus encline au bavardage si le Second les faisait sortir le temps de l’entretien.


"Je dirige les Sorcières d’Olrun" déclara-t-elle en une phrase on ne pouvait plus courte et concise.
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeVen 25 Juin 2010 - 23:21

Elle dirigeait les Sorcières d’Olrun… Sébastien Garin accusa le choc pendant quelques secondes puis réprima une envie de bondir de joie. Il avait eu les Sorcières d’Olrun ! Il avait entre les mains la tête des Sorcières d’Olrun ! Ah Dieu que c’était bon ! Il ne savait quasiment rien d’Olrun et du Lys, pour lui, elles étaient toutes deux à éliminer, mais il savait qu’Olrun concentrait le plus grand nombre d’adeptes. C’était une chance, une véritable chance. Il allait pouvoir lui expliquer son idée.

« Magnifique… magnifique… »

A la réflexion, il aimerait savoir comment sont organisées les sorcières, il aimerait en connaître plus sur leurs croyances paiennes, comprendre pourquoi elles n’adorent pas Dieu et qu’elles restent cantonnées à Olrun. Mais ces informations devaient être marquées du sceau du secret, et il ne voulait pas perdre le lien extrêmement ténu qu’il y avait entre lui et Europe à cause d’une curiosité mal placée. De toute façon ces données ne l’aideraient pas à résoudre son problème.

Europe écoutait le marché qu’il avait à proposer. Mais avant, il renvoya de nouveau les deux gardes d’un geste. Dès que la porte se claqua, il ne perdit pas de temps, c’était maintenant qu’il fallait exposer son marché.

« Nous voulons tous les deux la même chose. »

Il se souvint fugacement du jour où il avait laissé échappé un « toutes les deux » face à une condamnée… Il ne faisait plus cette erreur désormais.

« Nous voulons que l’Inquisition parte. Ne me prenez pas pour un traître, je souhaite me délivrer de Forbach au plus vite c’est tout. Et je souhaite qu’il n’y ait plus jamais de bain de sang comme celui de la Clairière aux Muguets. »

Il se frotta le nez, tic nerveux incontrôlable.

« Il y a deux moyens pour que l’Inquisition parte de Forbach : soit nous tuons toutes les sorcières. Cela fait déjà trois ans que l’on s’y efforce, avec les résultats que vous connaissez mieux que moi. Une méthode longue, fastidieuse, et coûteuse en vie humaine ou alors, le deuxième moyen, et ce que je vous propose directement : »

Sébastien Garin approcha son visage androgyne très près du visage féminin d’Europe. Le seul inquisiteur à s’être autant rapproché d’elle devait être Louis. Il lui dit dans une voix à peine basse, il ne cherchait pas non plus à en faire tout un simulacre :

« C’est que les sorcières cessent tout d’un coup d’exister. Qu’on ne sente plus leur présence, qu’elles disparaissent virtuellement de Forbach. Vous devenez aussi discrètes que des ombres. Moi de mon côté, j’essaierai de décourager les enquêtes trop poussées, et surtout, surtout, je laisserai votre vie sauve. Mais si une de vos sœurs fait un acte spectaculaire, et réveille le monstre inquisitorial que je veux endormir, alors tout sera fichu… »

Il s’éloigna un peu, c’était un moment très délicat.

« Je suppose qu’il faudra aussi calmer le Lys Noir… mais je commencerai par Olrun. Si vous disciplinez vos troupes, je muselerai les miennes… et à terme nous quitterons Forbach, parce que nous n’aurons plus de raisons d’être. »

Il se frotta sa joue, là où il aurait dû y avoir une barbe.

« Je sais que vous aurez des réticences, mais songez à la paix qui reviendra à Forbach… »

Sébastien Garin pensait sincèrement que ca pouvait valoir le coup.


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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeDim 27 Juin 2010 - 17:38

Sa révélation à peine achevée, Europe observa l’expression du visage de Sébastien Garin d’abord cloué par la surprise, puis mesurant l’ampleur de la découverte. Avec amertume, elle s’aperçut qu’il jubilait presque, heureux de sa prise et du pouvoir qu’elle lui conférait. La Sorcière pinça les lèvres et resta silencieuse, le toisant presque avec mépris tandis qu’il s’extasiait. Elle aurait pu très bien lui raconter un énorme bobard sur son rang mais le Second, tout à son excitation, ne prenait même pas la peine de vérifier d’une quelconque façon la crédibilité de ses dires. Finalement, peut-être serait-ce plus facile de le mener en bateau qu’elle ne l’aurait cru. Garin n’avait pas fait preuve de discernement, aveuglé encore et toujours pas cette soif de pouvoir méprisable. Il était tellement faible et corruptible. D’un esprit si petit. Le pire de tous les hommes…

Les gardes quittèrent de nouveau la pièce sur un signe de leur supérieur hiérarchique, et Europe se sentit un iota plus détendue. Ce qui allait se jouer dans les secondes suivantes se ferait par l’esprit et le dialogue; elle était en terrain connu, elle avait des armes à sa disposition, à elle de s’en servir pour retourner la situation à son avantage. La Grande Prêtresse raisonnait donc dans une logique de compétition, mais abandonna progressivement cette perspective à mesure que Sébastien Garin parlait. Au vu de ce qu’il lui proposait, il fallait plutôt raisonner en terme de coopération. Une alliance, un échange de bons procédés, voilà ce qui était en train de lui être soumis. Et ce serait parfait à condition qu’il n’y ait aucune anguille sous roche. Car même si le Second semblait sincère, rien ne garantissait à Europe qu’il ne dissimulait pas un piège derrière ses sages propos…lesquels n’étaient d’ailleurs, du point de vue de la Prêtresse, pas assez explicatifs de ses motivations. Il souhaitait « se délivrer de Forbach »? Pourquoi n’y parviendrait-il pas par une toute autre manière, en se faisant muter par exemple, en obtenant un ordre de mission hors du comté? Elle ignorait comment fonctionnait en profondeur l’Inquisition et sa hiérarchie; en revanche elle connaissait bien celle de l’administration du comté et supposait que cela fonctionnait pareil.

Concernant la Clairière au Muguet, elle devait lui concéder ce point: la nuit dernière avait été un véritable désastre. Une hécatombe qui avait fait des dizaines de morts innocents parmi la population forbachoise. Aucun doute que la cote de l’Inquisition allait sensiblement baisser après une telle boucherie, même si celle-ci avait été majoritairement perpétrée par un chien fou échappant à l’autorité inquisitoriale. En bref, Europe venait de le réaliser, elle était certes dans la mouise mais Sébastien Garin l’était peut-être plus encore. Voilà qui lui donnerait sans doute un avantage supplémentaire dans sa négociation…
Tout en parlant, le Second approcha sensiblement son visage très sérieux de celui de la Sorcière, qui put observer à loisir ses traits tellement peu masculins. Son teint pâlot, ses grands sourcils fuligineux, ses prunelles d’un bleu cristallin et argenté… Il n’avait vraiment rien d’un homme. Mais ce n’était pas une femme non plus.

Elle écouta jusqu’à la fin le discours de Garin. Quand il se fut tut, un grand silence tomba sur la pièce et Europe se recula, le considérant d’un air totalement neutre, plongée dans ses réflexions tout en continuant à fixer le visage androgyne, plus bas que le sien, qui lui faisait face. Il ne se passa rien pendant de longues minutes, pendant lesquels on entendit plus que de vagues rumeurs de conversations et des bruits quotidiens au-delà des murs du bureau. Enfin, la Sorcière acquiesça d’un air grave.


"Je n’ai aucune réticence. Votre marché me convient parfaitement, puisque sa finalité entre en concordance avec mes propres objectifs et intérêts. Les Sorcières de Forbach se tiendront tranquilles, vous avez ma parole: j’y veillerais personnellement. Et je m’occuperais également du Lys Noir. Mais vous devez comprendre, juste à titre informatif, que nos différentes manifestations et coups d’éclats dans le comté n’étaient aucunement volontaires. Etre discrètes est toujours resté dans nos mœurs. Si nous étions toutes rassemblées de façon aussi flagrante sur le parvis hier, c’est parce que l’Oracle nous a trompées, comme elle a trompé tout le monde." Europe marqua une pause, réfléchissant un instant.

"De toute façon, je suppose qu’après le massacre de la Clairière aux Muguets, vous n’ayez pas non plus envie de mettre l’Inquisition trop en avant… Puisque tel est le seul moyen, nous disparaîtrons donc complètement, telles des fantômes, et vous n’entendrez plus parler de nous. Je m’y engage." Afin de sceller définitivement le marché, la Grande Prêtresse tendit la main en direction de Sébastien Garin, attendant de voir si celui-ci allait la serrer.


[Suivant = Les Calices amers]


Dernière édition par Europe le Jeu 10 Fév 2011 - 20:50, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Faites entrer la sorcière!   Faites entrer la sorcière! Icon_minitimeLun 28 Juin 2010 - 19:40

Sébastien Garin laissa enfin échapper un soupir de soulagement. Il s’autorisa enfin un instant de rêverie et d’imagination. Dans six mois, ou un an ou deux, il pourrait faire pression auprès de la hiérarchie pour démobiliser les inquisiteurs, et si les autorités se rendaient à sa vision des choses, alors serait signé l’ordre de démobilisation. Sébastien Garin remettrait alors sa démission…

… puis disparaîtrait de la nature pour ne plus jamais exister.

Deux mois plus tard, le temps de laisser pousser ses cheveux à une longueur convenable, Sarah Geisler pourrait retourner à Metz avec son fils de cinq ans revoir ses parents. Si ses parents ne voulaient pas d’elle, elle irait au Monastère de Calis, et se ferait nonne. Enfin, ce dernier cas était extrême et elle n’accepterait pas si les religieuses refusaient la présence de David au monastère. Dans tous les cas, elle serait de nouveau femme, et cette parenthèse masculine serait enfin finie. Elle pourrait être mère, elle se trouvera peut être un homme, qu’elle n’aimera pas forcément mais qui lui assurera un toit et une vie décente, à elle et son fils.

Elle avait des doutes sur le dernier point, mais pour tout le reste, elle y croyait dur comme fer. Un sourire sincère se dessina sur son visage alors qu’elle s’appuyait sur son bureau. Avec Europe dans ses mains, Sarah Geisler pouvait voir venir le bout du tunnel. La fin de l’imposture. Europe ne pouvait pas comprendre tout ce que cela signifiait il faudrait qu’elle connaisse tout à commencer par son sexe. Information qu’il fallait protéger, plus encore avec Europe qu’avec d’autres, car elle avait donné plusieurs fois la preuve qu’elle était loin d’être idiote. Sarah Geisler n’était qu’une fille de commerçants, mais elle savait où était son intérêt.

Maintenant que le marché était conclu, il fallait la renvoyer vite fait, avant que la discussion ne s’étende et que Garin ne perde le contrôle. Europe était une courtisane ce qui signifiait qu’elle maîtrisait l’art de la conversation et avait reçu toute une éducation dans ce but, avec la culture et l’éloquence qui allait avec. Sarah Geisler n’avait pas cette éducation et ne savait pas faire des pirouettes pour éloigner les soupçons. Il fallait entériner et se quitter.

« Magnifique. Je vous fais donc confiance. Je laisse pour le moment la question du Lys Noir, puisque vous allez leur en parler. »


Sébastien Garin savait très peu de choses sur les tribus de sorcières, il n’en savait que deux à vrai dire : il connaissait leurs noms et le fait qu’elles étaient rivales. C’était suffisant en tout cas pour savoir que l’intervention d’Europe ne serait pas forcément écoutée, loin de là. Mais il avait déjà beaucoup obtenu, et il ne voulait pas forcer la chance. Plus tard, plus tard il reviendrait à la charge en exigeant l’identité de la Meneuse, et il traiterait directement avec il ou elle, de façon peut être moins spectaculaire qu’avec Europe.

« Je vais commencer dès maintenant à museler mes troupes. Depuis que le Gourdin est emprisonné, ils sont beaucoup plus calmes, et j’ai enfin trouvé le ton pour s’adresser à eux. »

Il fallait aboyer et gueuler. Les mâles ne comprenaient que le langage de la meute.

« Par contre, en cas d’échec de ces démarches et s’il y a des signes d’activités trop intenses, je saurais vers quelle tête me tourner… Vous êtes et restez un personnage public, donc facile à trouver… je ne sortirai peut être pas tout de suite le poteau et les fagots, mais je peux très bien informer Louis d’abord. Peut être que je ne le convaincrai pas, mais je risque fort d’ébranler votre couple. »


Il fallait rappeler à Europe qu’elle ne sortait pas tout à fait indemne de son bureau. C’était une liberté et une vie conditionnelle qu’il lui laissait et la menace qu’il incarnait était une épée de Damoclès, à la fois permanente et imminente.

Il avait fait le choix de ne pas la menacer de la brûler tout de suite, en se disant qu’il était inutile de promettre pis que pendre. Une menace sur un terrain très personnel pourrait suffire, et comme elle était moins grosse, elle était beaucoup plus réaliste. Après tout, il pouvait aller voir Louis quand il voulait non ?

« Vous pouvez partir en paix… pour aujourd’hui. Si je dois discuter avec vous, j’irais au château, et j’espère ne plus vous voir à la Collégiale. »

Ce n’était pas par humanité qu’il espérait ceci. Si Europe voyait de nouveau les murs de la Collégiale, ce serait pour son exécution, et cela signifierait le capotage du marché, la fin des espoirs de redevenir une femme pour Sarah Geisler.

« Allez ! »
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