La femme est dans ce lit douillet et chaud. Le cri du vent automnal parait bien loin. Elle s’endort en écoutant la respiration tranquille de son cher et tendre.



Nous marchons tous les quatre jusqu’aux plantations. Ceux sont les derniers jours de douceur avant l’hiver. Balteau court loin devant nous comme pour inciter son maître à aller plus vite. Mais Dimitri est occupé à expliqué l’une de ses théories à son père. Ils m’ont l’air heureux. Ce qui me suffit. Et puis je m’aperçois qu’Anna n’est plus là. Au moment où je tourne la tête pour la chercher le ciel se couvre.

Sa silhouette fluette, de quatorze ans, est arrêtée à quelques mètres. Je vois son écharpe prête à glisser de son cou blanc. Elle me semble raide, tendue, inquiète. Alors je me dirige dans sa direction. Malgré l’inquiétude je la trouve jolie perdue dans le vent. Mon Ania est entrain de devenir une jeune fille. Au moment où j’allais la rejoindre le sol tremble.

Un terrible tremblement de terre. J’entends son cri de surprise et de peur et cela m’affole. Une énorme fissure se crée pour nous séparer. De celle-ci s’échappe des volutes de fumé bleue… bleue saphir. Je la vois se rapprocher du bord et craint de la voir glisser.

-« Анна, нет, не двигается! » [Anna, non, ne bouge pas !]

Elle lève son regard paniqué sur moi. Je me retourne pour appeler les garçons. Ils ont été séparés. Nous le sommes tous. L’impuissance me tord les entrailles.

-« Non pas eux. Laissez-les-moi ! Pitié. »

Un rire répond à ma supplique. J’entends aussi la voix de l’Inspecteur me dire qu’il est désolé. Un homme apparait devant moi. Je ne peux pas voir son visage. Il respire le mal. Il ne bouge pas d’un pouce. L’Agent.


J’ai peur. Cette peur animale et incontrôlable. Je sens mes mains trembler. Pourtant je n’arrive plus à les bouger. Le souffle me manque, ma poitrine se comprime. L’homme se retourne et disparait en souriant. Non !

La rage du désespoir revient en moi plus puissante que jamais. Celle que j’avais laissée pour l’amour. Je vois ma fille mettre un pied dans le vide. J’hurle. Sans réfléchir et dans un acte fou, je la suis dans ce gouffre noir. Je tends les mains dans l’espoir de trouver l’une des siennes. Mon enfant. Anna !



Louisa se réveille en sursaut et repousse les draps avec frénésie. Encore tremblante et perdue elle va pousser la porte d’une chambre d’adolescente. Incapable de raisonnée elle ne résiste pas et s’assoit au bord du lit avant de s’allonger auprès d’elle et de l’enlacer. Son tout petit.