The Witch Slay
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilPortailRechercherDernières imagesS'enregistrerConnexion
Le Deal du moment : -29%
PC portable – MEDION 15,6″ FHD Intel i7 ...
Voir le deal
499.99 €

Partagez | 
 

 Tout finit par des larmes

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
Viviane Valdemar
Vieille peau fripée à pustules
Viviane Valdemar


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeDim 6 Fév 2011 - 22:09

Viviane courrait comme une malheureuse, totalement terrorisée, en direction du Manoir Eleanora-Sun. Son manteau en haillon la couvrait à peine et la pluie continuait à s’abattre à flot sur la petite ville de Forbach. Transie de froid, épuisée, chaque pas était un peu plus difficile que le précédent mais Viviane ne voulait pas, ne pouvait pas, laisser tomber. Maintenant que la menace de l’Agent disparaissait peu à peu, Viviane angoissait de plus en plus pour sa Cassandra et Narcissa, elles ne pouvaient pas être morte, ce n’était pas possible, pas elles ! Sans elles, Viviane n’avait plus rien, plus aucune raison de rester de ce monde. *Pitié, qu’elles ne soient pas mortes, Pitié !* À la pluie sur ses joues se mêlaient également des larmes, le sang continuait de couler de sa blessure à la tête, mais la sorcière n’en n’avait pas conscience, tout ce qui importait, c’était d’arriver chez Europe.

Europe saurait arranger les choses, elle l’avait toujours fait. Europe la garderait en sécurité pour la nuit et la protégerait. Europe… Viviane délirait à moitié, trempée, engourdie par le froid, épuisée par la force qu’elle avait dû déployer pour se débarrasser de son assaillant. Elle trébucha sur une pierre et se retrouva allongée dans la boue. Elle n’avait plus la force de se relever. Elle avait envie de mourir, là, tout de suite, maintenant que l’Agent ne pouvait plus malmener, elle n’avait plus envie de lutter. Sombrant dans une demi-inconscience, Viviane n’avait plus de forces, elle était à bout, à bout de ressources, d’espoir. Narcissa et Cassandra étaient-elles vraiment mortes ? Non, ça ne pouvait être possible, elle l’aurait senti. Elle l’aurait senti au fond d’elle, elle était une sorcière bon sang ! La pensée de sa sœur et sa nièce peut-être en danger éveillait en elle une nouvelle force… Viviane ne savait pas depuis combien de temps elle était allongée dans la boue, deux minutes, deux heures ? Elle n’aurait pu le dire, mais il fallait qu’elle se relève, qu’elle continue son chemin, sa lutte.

Tant bien que mal, elle se mit d’abord sur les genoux, l’effort failli la faire tourner de l’œil, mais elle résista. Il fallait qu’elle tienne, pour Cassandra, pour Narcissa, pour Europe aussi. Alors malgré sa faiblesse, Viviane lutta, elle lutta pour se remettre debout et continuer sa marche, elle n’avait plus la force de courir, chaque pas était une véritable torture, mais chaque pas était également une délivrance. Peu à peu, Viviane gagnait du terrain, elle voyait le manoir se rapprocher, la sourde angoisse qui lui étreignait le cœur ne diminuait pas, mais elle sentait que bientôt, elle serait à l’abri. N’auraient été les directives explicites et sévères d’Europe, jamais elle ne serait venue ici, elle aurait directement été chez Alicia pour tenter de retrouver Cassandra et Narcissa.

La demeure s’approchait, mais elle semblait encore si loin, Viviane avait l’impression que jamais elle ne pourrait y arriver, ses maigres forces l’abandonnaient un peu plus à chaque seconde. Que ce fut le vent, un illustre inconnu ou un domestique qui revenait au manoir, nul ne pourra sans doute jamais le dire, même pas Viviane, mais elle entendit des pas derrière elle. Prise de panique à l’idée de se retrouver livrée sans défense à l’Agent ou tout autre pervers du même gabarit qui avait repéré sa faiblesse, la Prêtresse puisa dans ses dernières forces pour courir, paniquée jusqu’au château. Était-ce elle qui hurlait ainsi à la mort ? Les tempes bourdonnantes, les larmes coulant à flots sur ses joues marquées par les coups, Viviane s’effondra contre la porte, la frappant de ses poings affaiblis. Il ne fallut pas longtemps avant que quelqu’un l’ouvre.

Dénuée de toute force, Viviane s’effondra sur le sol, son manteau ne couvrant guère grand-chose de son corps meurtri, elle eut tout juste le temps de murmurer « L’Agent…  » avant de s’évanouir.
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/fiches-personnages-f3/viviane-va
Europe
Fugitive
Fugitive
Europe


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeLun 7 Fév 2011 - 1:56

[Précédent = Procès interne]


Europe avait passé sa soirée assise à son bureau, penchée sur de la paperasse, à parachever des documents, lire des contrats, calculer les dépenses et les recettes de la maisonnée ainsi que s’occuper de la gestion du budget d’Olrun. Une de ces soirées dont elle avait horreur, prisonnière de son rôle de greffière; malgré tout, elle était la Grande Prêtresse, et il était de son devoir de s’occuper de ce genre de choses. Personne n’aurait souhaité le faire à sa place, et elle n’aurait d’ailleurs souhaité confier cette tâche à personne d’autre. Etant noble, elle était l’un des principaux organes finançant le clan, ce qui lui simplifiait grandement la tâche car elle n’avait pas à se justifier quant au déplacement et à la gestion des flux de son capital personnel. Il en allait autrement quand les dons pécuniaires de soutien aux activités occultes d’Olrun provenaient de l’extérieur –comme de ce très généreux donateur Romain Zimmerman.

La Sorcière avait donc travaillé jusqu’à une heure avancée de la nuit, à la lueur d’une chandelle. Elle s’était ensuite couchée avec un mal de tête délétère, des chiffres et des lettres dansant en continu derrière ses paupières closes. Pourtant, même étendue dans son confortable lit, il ne lui fut pas facile de trouver le sommeil. Par la fenêtre, une averse diluvienne noyait le monde dans un torrent gris dégoulinant. C’était un temps horrible, mais ce n’était pas le climat qui dérangeait Europe. Plutôt quelque chose dans l’air, un pressentiment vague. Tout était parfaitement normal et pourtant, elle n’aurait jamais pu affirmer avec plus de certitude qu’en cet instant que quelque chose n’allait pas.

La Grande Prêtresse finit par s’endormir, sombrant dans ses rêves habituels –ceux où tout un groupe de personnes l’observaient en silence, immobiles, de l’autre côté d’un fleuve en furie. Ce n’est que plusieurs heures plus tard qu’elle se réveilla en sursaut, bondissant dans ses draps au son d’une voix féminine qui l’appelait pourtant doucement.


"Mlle Europe… Réveillez-vous… il y a un problème…"


C’était Henrietta, une de ses domestiques, qui était venue une chandelle à la main et la mine inquiète. Europe se leva en ayant du mal à distinguer le songe et la réalité. Elle se vêtit d’un grand manteau d’intérieur par dessus ses vêtements de nuit et quitta la chambre, suivant Henrietta qui se pressait vers le hall. Visiblement, le personnel du manoir Eléanora-Sun était en ébullition. Maxime, son majordome –et plus fidèle serviteur, celui qui accueillait toujours les invités à la porte et apportait du thé lors des entrevues- était également présent, encore vêtu de ses habits de jour. Il se précipita vers elle, lui glissant des mots que la Grande Prêtresse eut du mal à saisir à cause de son réveil encore récent.

"On a retrouvé Mlle Valdemar à la porte il y a quelques minutes…"

Europe ouvrit des yeux surpris. Viviane? En plein milieu de la nuit? Soit son amie avait appliqué les consignes de discrétion d’Olrun avec un zèle excessif, attendant la faveur des ombres et de l’horaire pour venir lui rendre une petite visite, soit il y avait quelque chose d’urgent qui ne pouvait attendre le lendemain. La Sorcière vit tout de suite qu’il s’agissait de la deuxième option quand les domestiques lui montrèrent le corps de Viviane étendu sur l’un des confortables sofa présents dans le grand salon. Son amie était inanimée et dans un sale état, à moitié nue qui plus est. Europe se précipita vers elle avec inquiétude, tâtant son front moite. Il lui fallut quelques secondes supplémentaires avant de saisir l’ampleur de la situation.
Son regard croisa celui de Maxime qui comprit immédiatement où elle voulait en venir. Aussitôt, il donna des ordres afin que soit apportés une bassine d’eau chaude, des linges humides, des produits de secours, des couvertures, des vêtements et autres nécessités primordiales. Tandis que les domestiques s’affairaient dans un ballet précipité, Europe se pencha de nouveau vers son amie. Elle avait été blessée à la tête, cela se voyait aux tâches écarlates nimbant ses cheveux roux, et à la croûte très laide de sang coagulé qu’elle arborait derrière le crâne. Même son corps était égratigné par endroits. Courir nue sous une pluie diluvienne avait probablement provoqué une hypothermie car elle tremblait de tous ses membres, en proie à la fièvre; heureusement, les domestiques avaient aussitôt entrepris de réactiver les cheminées qui dispensaient une chaleur bienfaisante.

Conformément aux directives d’Europe –et au bon sens médical- des servantes s’occupèrent de nettoyer le corps de Viviane couvert de boue et de souillures, puis de le sécher délicatement. Après quoi, son amie Prêtresse fut recouverte d’une chaude et confortable couverture, des vêtements pliés et propres mis à sa disposition à côté d’elle pour son réveil. Sa blessure au crâne fut soignée du mieux possible et bandée; Europe espérait de tout cœur qu’elle ne fut pas à l’origine d’une commotion cérébrale. Elle était tout de même soulagée car mis à part ça, Viviane ne portait pas trace de blessure sérieuse –plaie profonde, mutilation, ou autres joyeusetés du même acabit.

La dirigeante d’Olrun finit par s’installer dans le sofa d’en face, histoire d’être installée confortablement au chevet de Viviane et d’être la première prévenue à son réveil. Qu’avait-il donc bien pu se passer? Peu à peu, les domestiques retournèrent se coucher, prêt à accourir au moindre tintement de cloche si leurs services étaient sollicités. Ce fut Maxime qui finit par révéler à Europe, que Viviane avait eu la dernière force de murmurer le nom de l’Agent avant de sombrer dans l’inconscience. La Sorcière en resta interdite. Son amie avait donc été agressée par ce meurtrier psychopathe complètement fou?

Se posant mille et une questions, elle observa les heures défiler, la fièvre de Viviane baisser, son état s’améliorer, et finit par s’endormir assise dans le sofa. Elle se réveilla deux heures après l’aube, alors qu’une journée venteuse et grisâtre, mais exempte le pluie, se levait sur Forbach. A son grand soulagement, la Prêtresse d’Olrun émergea alors de son inconscience…



Dernière édition par Europe le Jeu 10 Fév 2011 - 21:02, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/Premieres-Lueurs-c5/Le-Recueil-f
Viviane Valdemar
Vieille peau fripée à pustules
Viviane Valdemar


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeMer 9 Fév 2011 - 2:48

Le sommeil de Viviane était agité, la Prêtresse se tournait et retournait sans cesse, elle cauchemardait, revivait encore et encore cette scène dans l’église. Chaque seconde était imprimée dans sa mémoire et cet enfer ne semblait pas vouloir la quitter. Il lui arrivait de hurler de terreur dans son sommeil, tant que la fièvre et le délire était présent, dans ses sombres rêves, elle était encore à la merci de cet Agent et souffrait mille maux. Mais peu à peu, les soins d’Europe faisaient effets, et son sommeil devenait réparateur bien qu’une sourde angoisse étreigne toujours son cœur. La nuit s’écoula avec des périodes de hauts et de bas, des bleus apparaissant sur toute la surface de son corps. Le bandage autour de sa tête protégeait sa blessure qui n’était pas trop grave apparemment.

Quelques heures après l’aube, Viviane reprit peu à peu conscience. Ses paupières étaient encore lourdes et elle eut du mal à ouvrir les yeux, mais elle distingua la silhouette d’Europe assise en face d’elle. En sécurité, elle était en sécurité, l’Agent ne pourrait pas l’atteindre ici, jamais. Pourtant, en elle subsistait un malaise, comme une question importante qui devait être réglée mais dont elle ne pouvait se rappeler.

- Qu’est-ce que ? murmura-t-elle dans un souffle. Comment je ...?

Ses souvenirs sur les événements de la veille étaient flous : elle était entrée dans l’Église et puis… Et puis l’Agent était apparu. Il y avait un moine aussi, par terre. Devant les yeux de la Prêtresse s’imposa avec plus de netteté l’image d’un cadavre ensanglanté au milieu de l’allée. Mais l’Agent, l’Agent voulait la tuer elle aussi. Il l’avait poursuivie, elle avait tenté sans succès de s’échapper. Il l’avait attrapée, et … Viviane se souvenait du contact répugnant de l’Agent contre sa peau. Puis, elle se souvint, elle se souvint de ce qu’il avait en regardant sa poitrine. Narcissa avait la même… Narcissa ! Cette pensée acheva d’éveiller Viviane : Cassandra et Narcissa, étaient-elles mortes ? Un accès de panique la prit et elle voulut se lever.

- Narcissa ! Cassandra ! Il faut que j’aille les voir ! Il faut que je les trouve ! Elles sont encore en vie ! Elles ne peuvent pas… Non, ce n’est pas possible ! Pas elles !

Mais l’effort consenti était encore beaucoup trop lourd pour elle. Elle retomba mollement sur le lit et s’effondra sur les oreillers à mesure qu’elle prenait conscience de la terrible vérité. Cassandra et Narcissa étaient mortes. Elles avaient été tuées par l’Agent du Diable. Elle n’avait rien fait pour les protéger, rien, alors même qu’elle savait que la menace était réelle.

- J’aurais dû ! J’aurais dû les protéger comme je l’ai fait pour la peste ! Oh nooooooon, pitié, pas elles, pas ma sœur et ma nièce ! Je n’ai qu’elles au monde !

Un torrent de larme s’échappa de ses yeux. Peu importe qu’Europe les remarque, Europe qui semblait incapable d’éprouver le moindre sentiment depuis des années. Europe l’avait trahie avec le procès d’Alexandrine, et pourtant, c’était chez elle que Viviane était venue se réfugier. Europe était tout ce qui lui restait désormais… Louisa, Louisa était une amie, mais il y avait tant de choses que Viviane ne pouvait partager avec elle. Entre deux sanglots, elle tenta de reprendre la parole. Il fallait qu’elle soit sûre, il fallait qu’elle organise les choses, bien comme il faut.

- Europe… Il faut que je sache ce qu’elles sont devenues. Aide-moi à me lever. Il faut que j’aille au château de Frauenberg. L’Agent, l’Agent s’en est pris à Cassandra et Narcissa. Il me l’a dit. Il m’a dit qu’il les avait… Oh non, je ne peux pas y croire… Je ne veux pas y croire. Je le sentirais, n’est-ce pas ? Je le saurais si elles étaient…


Elle ne put le faire, elle ne put dire qu’elles étaient mortes. Viviane ne pouvait s’y résoudre, son cœur s’y refusait ! Pas Cassandra. Pas Narcissa. Ce n’était pas possible !

- Europe, aide-moi, s’il te plaît !

Sa voix s’était faite suppliante, alors qu’Europe ne semblait pas décidée à l’aider à partir, Viviane luttait de toutes ses maigres forces. Encore une fois, elle essaya de se mettre debout, mais sans succès. Elle se détestait d’être aussi faible, de ne pas avoir su les protéger, de ne pas être capable maintenant de faire ce qu’il fallait pour elle. Viviane s’en voulait, elle s’en voulait terriblement !
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/fiches-personnages-f3/viviane-va
Europe
Fugitive
Fugitive
Europe


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeMer 9 Fév 2011 - 21:14

Comme c’eut été probable, Viviane se réveilla désorientée, observant de tout côté pour voir où elle se trouvait. Si elle avait vraiment été agressée par l’Agent du Diable, il était normal qu’elle soit en état de choc, et Europe s’appliqua à lui adresser un sourire rassurant –une tentative honorable mais finalement peu convaincante, car elle était au moins aussi inquiète que son amie. A présent qu’elle était réveillée, on voyait un peu mieux que celle-ci était dans un sale état. Arborant des contusions bleuies jurant avec son teint pâle, le tissu toujours enroulé autour du crâne, elle semblait s’être faite rafistoler par une macabre chirurgien.
Europe sonna aussitôt son majordome avec une petite clochette d’argent posée sur la table; il accourut et elle lui intima d’aller chercher sans tarder une boisson chaude et de la nourriture. Maxime repartit aussitôt en direction des cuisines, et Europe s’apprêta à expliquer à Viviane qu’on l’avait trouvée nue sous une pluie diluvienne en plein milieu de la nuit, quand son amie tenta la folie de se lever.


"Non!" fit sévèrement Europe en se redressant pour la recoucher en la poussant par les épaules. Elle n’en eut pas besoin: la prêtresse d’Olrun retomba sur le sofa, gagnée par la faiblesse. Elle semblait totalement affolée et paniquée. Europe tâta son front et ses joues du dos de la main; Viviane était encore très chaude de fièvre, mais malgré ça, ses élucubrations ne pouvaient être le fruit d’un délire causé par la maladie. Ses nombreuses épanalepses prouvaient certes qu’elle n’avait pas encore retrouvé tout son discernement, prisonnière de la peur et du doute; malgré tout, les blessures sur son corps ne pouvaient tromper.

"Calme-toi" lui intima Europe, la gorge serrée, lorsque son amie tomba dans un état de panique avancée. Elle resta sur le qui-vive, prête à tout pour empêcher Viviane de se lever. Celle-ci avait prononcé le nom de Cassandra et Narcissa, et semblait visiblement persuadée que ces dernières étaient mortes. Elle ne tarda d’ailleurs pas à expliciter les menaces de l’Agent du Diable; mais la Grande Prêtresse eut un mal fou à comprendre le sens de ces propos, à cause des sanglots qui jaillissaient à torrent des yeux de son amie. Décidément… cet assassin était vraiment dangereux. Sa lettre seule avait réussi à flanquer des frissons à Europe, qui ne pensait pourtant pas qu’il mettrait ses menaces à exécution avec une telle vigueur. Et dire qu’on lui reprochait, à Elle, d’être trop sévère et conservatrice avec ses nouvelles mesures de discrétion…
Quand Viviane lui demanda son aide en suppliant et pleurant, Europe se leva et secoua négativement la tête, l’air catégorique.


"Hors de question! Ton état est fragile et tu ne bougeras pas de ce sofa." Voyant l’affolement se peindre sur le visage de sa prêtresse, Europe posa sur elle une main apaisante. "Je vais immédiatement envoyer un messager au château, qui nous rapportera des nouvelles dans les plus brefs délais."

La Sorcière sonna de nouveau sa clochette et un domestique accourut. Europe lui ordonna de mander un page afin que celui-ci se rende à Frauenberg et prenne expressément des nouvelles de Cassandra et Narcissa de Saint-Loup. L’homme disparut au pas de course, et le silence retomba de nouveau sur la grande pièce.
La dirigeante d’Olrun se rassit sur son sofa, veillant à ce que Viviane ne quitte pas le lit. Après de telles confidences, les émotions et les pensées se bousculaient en son esprit dans un tel imbroglio qu’elle ne savait même plus quoi dire. Elle mit ses interrogations de côté et se résolut à prononcer les meilleurs paroles de réconfort possibles: l’immédiat était de rassurer Viviane, afin qu’elle ne voit plus en elle cette image délétère de prévarication et de personne indigne de confiance. Surtout, ne pas donner l’impression de prendre les choses avec équanimité… Cependant, Europe devinait sans peine qu’elle préférait être rassurée à propos de sa sœur et de sa nièce, que sur les événements qui s’étaient déroulés avec l’Agent du Diable.


"Bien sûr que tu le sentirais, tu es une Sorcière! Maintenant, mets ton cœur de côté et pense avec ta tête. Le château est l’endroit le plus gardé de Forbach, n’est-ce pas? La Comtesse n’aurait pas permis que la vigilance dans son domaine ne soit relâchée, surtout ces temps-ci. Cet homme a du te mentir pour te blesser –ne lui fais pas ce plaisir."

Des paroles raisonnables mais assez dures à entendre, car elles ne donnaient pas l’impression de la compassion, se concentrant sur l’aspect pragmatique des choses. Europe était habituée à avoir cette réputation, endossant sans se plaindre le rôle de la méchante qui ne leur laissait pas le temps de pleurer leurs morts, qui ne leur avait pas accordé un instant de répit dans les moments de panique, veillant toujours à ce qu’ils soient d’abord en sûreté… Un masque de dirigeante, insensible mais efficace.
Après quelques instants de silence, durant lesquels elle espéra que Viviane aurait retrouvé un peu de calme, Europe la considéra d’un air très solennel et reprit la parole.


"Bon, mettons les choses au point. Je sais qu’il va être dur pour toi d’en parler… mais j’ai besoin que tu me racontes ce qu’il s’est passé, en détail, depuis le début." Elle marqua une pause, songeant aux autres questions essentielles à poser. "Y a-t-il eu un autre témoin de la scène? Et si tu as utilisé tes pouvoirs, est-ce que quelqu’un t’a vue? Ou suivie jusqu’ici? Ou alors as-tu communiqué ta destination à quelqu’un? C’est très important: quelqu’un t’as t il vu entrer dans le manoir, ou mentionner mon nom?"

Elle tâcha de prononcer ces paroles en dissimulant le côté qui laissait penser qu’elle ne s’intéressait qu’à elle. Peut-être que sans le vouloir, Viviane avait attiré l’Agent du Diable ou toute autre personne (peut-être même les Inquisiteurs!) jusqu’au manoir Eléanora-Sun, ce qui mettrait en péril l’entièreté de ses occupants; nobles, roturiers, domestiques… Ils étaient une petite pléthore à vivre sous ce toit et, même si elle aurait éventuellement pu se résigner à se faire capturer –cela avait déjà failli arriver une fois…- Europe n’aurait pas supporté de voir sa famille la suivre dans sa chute. Elle songea avec inquiétude que si Viviane avait utilisé ses pouvoirs, les circonstances l’avaient peut-être empêchée de le faire avec discrétion. La Grande Prêtresse retint une poue pincée. Décidément, ces mesures de discrétion étaient plus souvent bafouées que si elle n’avait rien édicté du tout! Certes, ce n’était pas de la faute de Viviane, mais le problème était le même… et si quelqu’un avait surpris la Prêtresse, il y aurait un sérieux souci d’anonymat.
Le visage d’Europe s’éclaira tandis qu’elle posait négligemment un bras sur l’accoudoir de son fauteuil, semblant avoir une bonne idée.


"Tu sais, j’ai pensé à un partenariat commercial entre ta boutique et la maison Eléanora-Sun. En fait, ce serait plus une sorte de mécénat –ce genre de pratique est de plus en plus cotée à Paris pour percer dans le milieu, à cause des distorsions de concurrence et de l’inflation actuelle. Nous avons la fortune, tu as l’atelier; nous pourrions assurer la promotion spéculative de ta boutique, aider à la monographie de ton fonds de commerce, financer les investissements… Bien sûr, les termes restent à discuter, surtout si on doit basculer dans des obligations cambiaires... Mais ne t’inquiète pas! Tu ne perdras pas d’argent en échange, car j’ai pensé à des mécanismes nantissement, de crédit et d’intervention très sophistiqués suggérés par un ami négociant –et toujours avec anatocisme bien sûr. Même pour moi, les risques sont quasi-nuls; je suis exonérée de cens et au pire il reste la dation en paiement..."

Europe continua à bavasser ainsi son charabia pendant une bonne minute, ne s’apercevant même pas que Viviane l’observait sans doute avec un air consterné, et qu’en période de danger de mort de la seule famille lui restant sur cette terre, elle aurait sans doute aimé parler d’autre chose que de disparité fiscale, d’échevinage, et autres joyeusetés de ce genre…
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/Premieres-Lueurs-c5/Le-Recueil-f
Viviane Valdemar
Vieille peau fripée à pustules
Viviane Valdemar


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeJeu 17 Fév 2011 - 2:53

Viviane, épuisée, écoutait les paroles d’Europe. Alors que celle-ci aurait dû se montrer compréhensive et souple pour une fois, elle ne faisait que tenter de convaincre Viviane qu’elle se trompait. Mais Viviane avait affronté l’Agent, elle savait de quoi il était capable, pas Europe ! Le château, bien gardé ? Oui, mais n’était-ce pas aussi le cas de l’église ? Et puis, il y avait cet homme, l’Enquêteur Royal qui était là, censé protéger la population d’un tueur. Mais c’était un incapable. Les pensées de Viviane tourbillonnaient alors qu’Europe l’assommait de question sans la moindre compassion. Alors que la Prêtresse aurait voulu oublier ce qui s’était passé quelques heures plus tôt, Europe, censée être son amie, lui demandait de tout lui raconter en détail.

Allongée sur le fauteuil, Viviane se sentait gagnée par l’épuisement. Elle n’avait aucune envie de répondre aux questions d’Europe. Qui s’en fichait maintenant de savoir si elle avait été découverte en tant que sorcière alors qu’un meurtrier courrait impunément dans la ville, assassinant tous ceux qui se trouvaient sur son chemin. Et puis, elle ne savait toujours pas ce qu’il en était pour Cassandra et Narcissa. Europe n’avait-elle donc pas de cœur ? Toujours, Viviane avait cherché à lui trouver des excuses, à se dire que son amie avait ses raisons, que la confiance qu’elle lui accordait avait toujours été méritée, mais ce n’était plus le cas. Il y avait eu l’incident avec Alexandrine, Viviane n’avait pas voulu répondre à la dernière missive d’Europe, parce qu’elle n’aurait été que colère et amertume. Comment son « amie » pouvait-elle croire que tout irait pour le mieux après une trahison pareille ?

Furieuse, épuisée, une angoisse sourde étreignant sa poitrine, Viviane se refusait à parler. Elle ne voulait pas mettre de mots sur les sensations qui l’envahissaient. A l’heure où Europe aurait dû montrer gentillesse et soutien, elle ne montrait que calcul et froideur. C’en était trop, beaucoup trop pour Viviane. Europe, comme pour combler ce lourd silence, commença à parler commerce. Viviane ne sut plus trop si elle devait rire ou pleurer devant un tel aveuglement. Europe était en train de lui expliquer toutes sortes de choses qu’elle envisageait de mettre en place pour soutenir la boutique de Viviane. Preuve ultime qu’elle était profondément égoïste en cet instant, elle semblait ignorer que le Commerce Valdemar se portait très bien et qu’il n’avait nul besoin de mécène ou tout autre soutien.

Viviane eut un premier éclat de rire hystérique, elle était réellement à bout de nerfs. Alors qu’elle avait besoin d’une amie, elle n’avait que la Grande Prêtresse en face d’elle, incapable de parler d’autre chose que de sécurité et de commerce. La Prêtresse partit dans une crise de fou-rire nerveux et irrépressible. C’était un rire à vous glacer le sang, celui que laissent échapper seuls ceux qui en ont trop vus dans leur vie, qui n’ont plus rien à perdre, et dont la force mentale ne tient plus qu’à un fil. Il ne manquait pas grand-chose pour que Viviane bascule totalement dans la folie. Derrière ce rire transparaissait aussi une vive colère, la plus terrible que Viviane eut jamais ressenti de toute sa vie.

- Te rends-tu seulement compte de ce que tu es en train de faire Europe ? Je savais que tu étais devenue dure, mais c’est bien pire que ça. Ton cœur est devenu de glace, pour autant que tu en aies encore un. Je viens de vivre la pire nuit de toute ma vie, je suis malade, épuisée, je n’ai aucune nouvelle de ma sœur et de ma nièce en ayant de bonnes raison de croire qu’elles sont mortes, et toi, toi tu me parles de commerce ? Mais qu’est-ce qui ne va pas chez toi ?

La colère donnait des forces à Viviane qui s’animait au fur et à mesure qu’elle parlait. Redressée maintenant pour faire face à sa supérieure, elle parlait de plus en plus fort. Ses yeux lançaient des éclairs, elle ressentait presque de la haine pour celle qu’elle avait jusqu’alors considérée comme une amie.

- Froidement, sans la moindre compassion, tu me demandes de revivre cette nuit pour être sûre que la Tribu ne risque rien. Mais sais-tu que je n’ai pas eu le choix, c’était user de magie ou mourir ? Tu aurais donc préféré que je meure pour qu’Olrun n’ait rien à craindre ? Mais comment peux-tu craindre encore l’Inquisition alors qu’un tueur sans foi ni loi sème la terreur dans la ville ? Tu veux savoir ce qu’il s’est passé, hein ? Tu veux le savoir ? Tu n’en rien à faire de la vie de Narcissa ou celle de Cassandra. Mieux même, ça t’arrangerais bien qu’elle soit morte, hein, ma sœur, elle ne pourrait plus révéler à qui que ce soit ce qu’elle sait à propos de nous. C’était pour la retrouver que j’ai été à l’église hier. J’avais envie de la voir, de passer un moment avec elle. Au lieu de la trouver, j’ai découvert le cadavre d’un homme, gisant dans une mare de sang au milieu de l’allée. L’Agent était là. J’ai tenté de m’enfuir, mais il courrait plus vite que moi…

Viviane revivait la scène, c’était atroce. La peur lui gelait à nouveau les entrailles, elle se souvenait parfaitement de chacun des instants dans l’église. Cette odeur abominable de mort, la voix de l’Agent, ses mots, ses menaces, ses vaillantes tentatives pour se défendre, toutes vouées à l’échec. Toutes jusqu’à ce qu’elle ose utiliser ses pouvoirs. Europe ne pouvait pas lui reprocher ça. Sa voix n’était plus aussi sûre, elle tremblait un peu, mais Viviane poursuivit, comme si de ses mots, elle allait pouvoir percer le cœur d’Europe, lui faire du mal.

- J’ai tenté de me défendre avec un chandelier, mais il anticipait chacun de mes mouvements, je ne pouvais rien faire, j’étais prise au piège, à l’intérieur de cette maudite église, à la merci de l’Agent. Il m’a raconté comment il s’était occupé de Cassandra et Narcissa, et que maintenant, c’était mon tour. Il m’a attrapée et jetée sur un banc, j’étais à moitié assommée, il a arraché mes vêtements. Je me débattais comme je pouvais, mais il était trop grand, trop fort. Alors oui, Europe, parce que je n’avais pas le choix, j’ai utilisé mes pouvoirs, je l’ai à moitié endormi puis envouté pour qu’il me craigne. J’ai épuisé mes dernières forces en faisant ça, c’est tout juste si j’ai pu en réchappé. Tu sais ce qui m’a donné la force de me battre ? Pas Olrun. Pas toi, certainement pas toi. Non, je me suis battue pour ma famille, pour m’assurer que je ne pouvais plus rien pour elles et pour leur offrir une sépulture digne de ce nom. Alors, tu es contente ? Tu sais tout. Comme d’habitude, tu crois que tu as encore gagné, n’est-ce pas ? Personne ne m’a vue, l’église était totalement vide, et quand bien même il y aurait eu quelqu’un, il n’aurait pas pu savoir ce que j’ai fait.

Viviane reprit son souffle avant de reprendre.

- Mais tu n’as rien gagné Europe, tu n’as rien gagné du tout… Tu as perdu, tu viens de perdre définitivement mon amitié. Je te remercie pour ce que tu as fait pour moi cette nuit, mais dès que je serai capable de me lever, je m’en irai. Mes contacts avec toi se limiteront aux besoins de la Tribu.

Les larmes aux yeux, Viviane se tut, enfin. Alors qu’elle avait raconté comment l’Agent l’avait déshabillée, elle avait senti à nouveau le contact répugnant de sa peau et eut envie de se laver. Elle venait pour la première fois de dire ses quatre vérités à Europe, mais elle ne s’en sentait pas soulagée, que du contraire, l’angoisse rongeait toujours ses tripes.
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/fiches-personnages-f3/viviane-va
Europe
Fugitive
Fugitive
Europe


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeMar 22 Fév 2011 - 23:58

[HRP: J'ai du mal m'exprimer au niveau de la chronologie... la dernière missive d'Europe a été envoyée postérieurement à ce topic^^]


Europe était bien au courant que dans un moment pareil, Viviane ne souhaitait pas du tout parler de l’agression qu’elle venait de vivre, souhaitant plutôt l’oublier. Pourtant, la Grande Prêtresse ne pouvait se résoudre à ne pas lui demander des explications. Il fallait qu’elle connaisse les détails, pour des raisons de sécurité évidentes. Le nombre de personnes impliquées, le lieu de l’agression, les conséquences engendrées… de ces facteurs dépendrait son comportement dans les heures qui suivent. Peut-être cette agression avait-elle eu des conséquences désastreuses, en plus de celles personnelles à Viviane; dans ce cas, il était absolument impératif et essentiel de réagir vite et bien pour limiter la casse, et protéger le maximum de personnes possibles! Viviane était-elle à ce point aveuglée par la haine qu’elle ne s’en doutait pas? C’était… c’était tellement offensant qu’un instant Europe en vint à s’interroger sur l’attitude à adopter. Comment son amie Prêtresse pouvait-elle penser qu’elle ne s’intéressait qu’à sa petite personne? Elle voulait tout simplement éviter de réitérer l’épisode de l’arrestation massive de 1640! Si Viviane lui transmettait les détails de l’agression plusieurs heures (voire plusieurs jours) après, toutes les opportunités de limiter les dégâts seraient passées depuis longtemps, et alors un danger encore plus grand s’abattrait sur elles. Quelle ingratitude, encore une fois… qu’on lui reproche de rechercher la sécurité de tous, d’avoir à cœur les intérêts de la tribu…

Alors quand Viviane vida son sac, déballant ses quatre vérités à Europe, ce fut au tour de celle-ci de conserver un mutisme résolument boudeur. La première fois qu’une conversation de ce type avait eu lieu entre les deux femmes, quelques mois auparavant, la dirigeante d’Olrun avait ressenti une tristesse immense, la transperçant tel un poignard sans pitié. Suivi d’un abattement profond et désespéré, d’avoir perdu l’estime d’une de ses plus grandes amies… Aujourd’hui cependant, ni l’un ni l’autre de ces sentiments n’était de mise. Non, Europe ne ressentait que de la frustration, elle était blessée et contrariée, offensée et aigrie. De voir que malgré toutes ses facultés, son intelligence indéniable et sa maturité, Viviane ne s’arrêtait qu’aux apparences. Elle avait pourtant toutes les qualités nécessaires pour comprendre que ce masque de froideur n’était que superficiel, et qu’au fond Europe ne se faisait qu’une chose: du souci! Qui aurait pu rester insensible devant le spectacle qui lui avait été offert, celui d’une estimée amie violentée et inconsciente, retrouvée sur le perron en plein milieu de la nuit, la tête pissant le sang? Mais enfin! Elle avait envoyé un messager à Frauenberg; qu’aurait-elle pu faire d’autre? Et ses paroles de réconfort à propos de Narcissa et Cassandra? Passées à la trappe également… Europe n’avait jamais entendu dire qu’on puisse être blâmé pour avoir prononcé les
mauvaises paroles de réconfort…

Elle attendit donc que Viviane ait finit sa logorhée, ne pouvant empêcher une larme d’agacement et de frustration de couler sur sa joue. Une simple et unique larme, qui avait d’autant plus d’impact du fait de sa rareté… Les sourcils d’Europe étaient froncés, ses lèvres si pincées qu’elles ne formaient plus qu’une ligne fine barrant son visage aux traits tirés. Elle finit par lever bras et yeux au ciel pour les laisser retomber, afin d’exprimer l’ampleur de son impuissance; dans son regard, on ne lisait que contrariété.


"Mais c’est pas vrai!!!" soupira-t-elle dans un feulement excédé. "Mais pour qui me prenez vous toutes, à la fin? Une espèce de petite bourgeoise coincée sans cœur et égoïste, qui n’a même pas le sens des priorités? Je suis infiniment choquée et bouleversée par ce qu’il t’est arrivé, Viviane! Imagine ma réaction quand on t’as retrouvée à moitié nue à la porte, sous une pluie battante… j’ai fait le sacrifice de mettre mes peurs de côté et de prendre les choses en main, afin de réagir vite et bien aux événements. Mais visiblement, ça ne t’es pas venu à l’idée non plus…
Je sais pertinemment que ta boutique n’a pas besoin d’aide! Comment peux-tu sérieusement penser que je me préoccupe de mes relations d’affaires dans un moment pareil? C’est véritablement vexant!! Si je te parle de commerce dans de telles circonstances, ce n’est pas pour me faire détester une nouvelle fois mais pour essayer d’établir une stratégie pour la suite! Ce partenariat n'est qu'un alibi, une couverture pour nous! Tu as été la victime de l’Agent du Diable, qui plus es tu es une Sorcière; tu es donc en grand danger. Avec ce partenariat, je pourrais t’offrir tout le soutien et toute la protection nécessaire, aussi bien matérielle que financière! Je pourrais même prendre toutes les mesures de protection essentielles, y compris les plus farfelues, sans éveiller les soupçons! Ce qui, par les temps qui court, n’aurait pas été possible sans cette idée de partenariat; les gens se seraient forcément douté de quelque chose. La preuve: je suis obligée de t’envoyer des invitations officielles pour ne pas éveiller la méfiance quand nous souhaitons parler face à face, et nous ne pouvons même plus rien mentionner dans les lettres… Evidemment que je me fous de la situation commerciale du Manoir Eléanora-Sun! Mais c’est là le moyen le plus efficace et le plus sécurisé d’assurer une liaison permanente avec toi, pour tous prétextes que ce soit –impératifs ou subsidiaires…
Cela aurait aussi permis de centraliser un peu les pouvoirs d’Olrun, ce qui par les temps qui courent, n’est pas franchement une mauvaise chose!"


Europe poussa un nouveau soupir, levant les yeux au ciel. Malgré tous ses efforts, la fatigue la rendait fébrile, elle avait envie de pleurer devant un trop plein d’émotions. A présent que sa colère horripilée était passée, elle devait bien admettre que les propos de Viviane et notamment son rire glacial avaient eu un impact considérable sur elle. Cédant à une impulsion qu’elle aurait aimé réfréner de tout son cœur, elle enlaça Viviane, enfouissant son visage dans les cheveux roux de sa consœur.

"J’ai eu énormément peur de te perdre, surtout quand tu as prononcé le nom de l’Agent, je suis restée à ton chevet toute la nuit et guetté ton réveil… ne dis plus jamais que je ne me suis pas faite de soucis pour toi! Mon seul tort a été de mettre mon soulagement de te voir vivante de côté momentanément, pour me consacrer à des mesures plus urgentes et réparer ce qui pouvait l’être –ne peux-tu vraiment comprendre ça? Alors ne viens plus jamais me dire que je préférais que tu n’ai pas utilisé tes pouvoirs et que tu sois morte" acheva Europe d’une voix brisée.

La Grande Prêtresse ne dit plus rien pendant un moment en retenant son souffle; elle détestait ces moments si intenses où elle devait dévoiler ses états d’âme, en cet instant elle détestait Viviane qui l’obligeait à se montrer si nue, si vulnérable, si faible… Un état dans lequel elle s’était juré de ne plus retomber, car c’était celui qui lui apportait la plus grande souffrance… Cette fois-ci, la Grande Prêtresse ne put empêcher d’autres larmes de couler; elle les essuya rapidement d’un revers de main, mais trop tard, ses yeux étaient déjà rouges. Viviane ne pouvait-elle lui accorder sa confiance sans exiger d’elle à chaque fois cet état de vulnérabilité? Tous les efforts qu’Europe faisait pour paraître plus assurée qu’elle ne l’était, tous ces efforts qui lui demandaient chaque jour un gros travail psychologique, étaient réduits à néant à chaque fois! De nouveau frustrée, la Grande Prêtresse rompit leur étreinte et se redressa, essayant de dissimuler son visage derrière les anglaises tombant de son chignon défait.


"Et puis ce ne sont pas les seules raisons de cet histoire de partenariat commercial. Car j’imagine que, vu ce qu’il t’est arrivé, tu vas vouloir habiter avec Narcissa et Cassandra pendant un temps, n’est-ce pas? Hé bien le manoir Eléanora-Sun est bien assez grand pour vous loger toutes les trois tout en assurant votre sécurité, et ce tout le temps nécessaire. Il est assez même assez grand pour accueillir toutes les Sorcières d’Olrun si il le faut, vous en priorité!… Encore fallait-il un prétexte officiel pour justifier cela aux yeux du monde. Maintenant, il est tout trouvé. Mais vu l’enthousiasme avec lequel tu prends ma proposition…"

Europe laissa retomber ses bras sur son flanc d’un air maussade, profondément déçue et peinée par les dernières paroles de Viviane qui déclarait sa volonté de n’avoir dorénavant que des liens minimalistes avec elle.

"Je te laisse te reposer et réfléchir calmement à tout cela, si toutefois tu changes d’avis –NON, ce n’est pas parce que je ne me soucie pas de toi, mais parce que le médecin de la famille t’a interdit le surmenage et que cette conversation est en train d’y ressembler dangereusement. Je reviendrais un peu plus tard, je vais guetter le retour de mon messager." (Les yeux d’Europe se remplirent de nouveau de larmes). "Je préfère m’isoler un moment, avant de te dire à nouveau des trucs… «Froidement, sans la moindre compassion»."
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/Premieres-Lueurs-c5/Le-Recueil-f
Viviane Valdemar
Vieille peau fripée à pustules
Viviane Valdemar


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeVen 25 Fév 2011 - 1:21

Si Europe avait bien un don, c’était celui de rendre Viviane totalement confuse. Depuis des semaines, des années même, Europe était devenue froide, distante, réduisant au strict minimum tout contact social avec la plupart des personnes de son entourage, dont Viviane. Elle refusait à se confier, à exprimer le moindre sentiment, à même se montrer une véritable amie. Depuis le temps, Viviane avait eu du mal à croire qu’Europe était encore son amie, qu’elle se préoccupait encore d’elle. Tout ce qu’elle voyait, c’était une femme au cœur meurtri depuis la mort de son meilleur ami qui avait refusé toute aide. Europe était devenue rigide, tellement stricte à tout point de vue, Viviane n’avait même plus éprouvé le moindre plaisir dans ses dernières conversation avec la Grande Prêtresse. Et voilà que maintenant, elle énonçait de but en blanc qu’elle s’était toujours préoccupée de ses sœurs d’Olrun, d’elle toute.

Viviane ne mettait pas en doute les paroles d’Europe, elle les savait sincères, mais elle était toujours terriblement en colère. En colère contre le monde entier, en colère contre la Tribu qui avait éloigné d’elle une amie précieuse, en colère contre elle-même de s’être laissée piégée par l’Agent, en colère contre Europe d’avoir gardé tout ça pour elle pendant si longtemps. Pourquoi fallait-elle qu’elle ait attendu que Viviane explose pour laisser enfin ses sentiments paraître. Avant qu’Europe ne quitte la pièce, il fallait que Viviane la retienne, sinon, elles franchiraient une étape de plus dans la dégradation de leur relation, ce que la prêtresse ne voulait plus.

- Attends ! Attends Europe ! Tu ne peux pas me laisser comme ça. Tu ne peux pas me balancer des choses pareilles à la figure et t’en aller ensuite pour me laisser le temps de réfléchir. Je t’en ai laissé à toi, du temps. Beaucoup trop sans doute. Alors il n’est plus temps de te laisser aller encore te morfondre dans tes pensées. Nous avons de nombreuses choses à discuter toutes les deux. Reste, s’il te plaît, ne me force pas à essayer encore de me relever.

Europe sembla hésiter un instant. Allait-elle rester ? Viviane le souhaitait de tout cœur. Son cerveau fonctionnait au ralenti cependant, et elle se sentait terriblement fatiguée. Et elle attendait toujours que le messager revienne. Mais qu’est-ce qu’il ne comprenait pas dans le sens du mot urgent ce crétin ? URGENT, c’était pas si difficile quand même ! Même un illettré comprendrait qu’il fallait se dépêcher. Viviane le savait, tant qu’elle n’avait pas de certitude quant au sort de sa sœur et sa nièce, elle ne pourrait être totalement rationnelle. Europe risquait d’en faire les frais, mais d’une certaine manière, elle l’avait mérité.

- Tu sais, je te comprends pas… ça fait des années que j’essaie de te suivre, de te soutenir envers et contre tout, que j’approuve ou obtempère à chacune de tes décisions, même quand tu sais que je suis pertinemment pas d’accord. Faut-il encore citer l’exemple de Narcissa à qui tu as refusé que j’enseigne nos savoirs ? Tu prétends de soucier de nous, mais ces derniers temps, tu as tout fait pour nous prouver le contraire. La sécurité, se cacher, en faire le moins possible, c’était ça qui comptait. Tu n’as pas hésité à nous manipuler moi et Inès pour cette mascarade de procès pour Alexandrine à laquelle j’ai honte d’avoir participé. J’ai perdu cette fois-là la confiance que j’avais en toi.

Viviane ne savait pas trop comment exprimer ses sentiments. Elle ne voulait pas être méchante ou retourner le couteau dans la plaie, mais il fallait qu’Europe comprenne où elle en était. D’ailleurs, elle n’était pas sûre de le savoir elle-même. La proposition d’Europe l’avait subjuguée, jamais elle ne l’aurait crue capable d’une telle générosité. Mais paradoxalement, cette générosité venait un peu tard. Trop tard même. Europe semblait ne pas pouvoir croire que Narcissa et Cassandra puissent être mortes. Mais Viviane savait ce qu’elle avait entendu, elle savait de quoi l’Agent était capable. Et même si son cœur se refusait à le croire, il était probable que sa sœur et sa nièce étaient décédées. À cette idée, des larmes se formèrent à nouveau dans ses yeux, vivre sans elles lui semblait impossible, même avec l’aide d’Olrun. Alors l’évidence apparut aux yeux de Viviane. Tout son avenir était lié au sort de sa famille, alors de ce sort, elle ferait dépendre sa décision. Le tout était de l’expliquer à Europe.

- Je… J’apprécie grandement ta proposition Europe. Mais il y a une chose que tu sembles oublier, ou alors tu n’en tiens pas compte pour une raison qui m’échappe totalement. Aux dernières nouvelles, Cassandra et Narcissa sont… Elles… Elles sont mortes. C’est bien gentil de faire une telle proposition, mais si réellement, il est allé les voir, et si elles n’en n’ont pas réchappé, je ne viendrai pas. Dans ce cas-là, je quitterai Olrun, et tu n’entendras plus jamais parler de moi. Cette ville m’a tout pris, je n’ai plus aucune raison d’y rester. Et aucune supplication, aucune larme, aussi sincère soit-elle ne pourra me faire changer d’avis. Si, par contre, il s’est avéré que l’Agent m’a menti, alors j’accepterai ta proposition, et nous viendrons toutes les trois nous mettre à l’abri chez toi. Mais bon sang, c’est bien plus tôt qu’elle aurait dû venir, cette proposition, si tu étais réellement inquiète comme tu le dis si bien. Exprimer ses sentiments n’est pas aussi difficile que tu sembles le croire. L’amitié, ça fonctionne dans les deux sens, depuis toujours. Tu es stupide Europe ! Oui parfaitement stupide.

Un petit rire joyeux s’échappa de ses lèvres, involontaire, il sembla détendre un peu l’atmosphère. Viviane était toujours terriblement angoissée et tendue, mais elle parvenait à faire un peu abstraction de cette douleur. Tant que le messager n’était pas revenu, elle ne pouvait rien faire pour sa famille, alors autant se concentrer sur Europe.

- Je ne retire rien de ce que j’ai pu dire Europe, même si c’était méchant. J’aime à penser que c’est ce qui t’a fait finalement fait réagir, fait redevenir un peu toi-même pour la première fois depuis bien longtemps. Que ça te fasse plaisir ou non, tu étais froide et sans la moindre compassion… Mais tout cela va changer, n’est-ce pas ? Nous allons redevenir amies, de réelles amies, comme nous l’étions avant ! Nous allons à nouveau rire ensemble, n’est-ce pas ? Je choisis de te pardonner Europe, pour tout ce que tu as pu dire, et je te demande pardon pour ce que j’ai dit de blessant. Te blesser n’était pas le but… Me pardonneras-tu ?

Au fond, même si elle savait qu’elle avait parfaitement raison, Viviane se sentait terriblement coupable pour tout ce qu’elle venait de dire. Alors qu’Europe allait mal et qu’elle le savait, elle lui avait lancé à la figure des vérités qu’il n’est pas forcément bon d’entendre, surtout quand la vie est aussi difficile qu’elle ne l’était pour tous ces dernières semaines. Piteusement, Viviane baissa la tête avant d’ajouter d’une petite voix.

- Je suis désolée Europe, vraiment… Et je te remercie d’avoir veillé sur moi cette nuit. Merci infiniment !


Se sentant plus épuisée que jamais, Viviane laissa sa tête reposer à nouveau sur les oreillers. Qu’est-ce qu’il attendait pour revenir, ce messager ?
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/fiches-personnages-f3/viviane-va
Europe
Fugitive
Fugitive
Europe


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeDim 27 Fév 2011 - 18:34

Europe s’apprêtait à sortir de la pièce mais fut arrêtée par l’appel de Viviane, étrangement soulagée que cette dernière la retienne. En vérité, elle aurait même vaguement souhaité que Viviane la gifle, afin de dissiper la brume devant ses yeux et d’y voir beaucoup plus clair… cette situation leur ressemblait tellement: Europe fuyant dans le silence, Viviane restant et privilégiant le dialogue. Si elle avait quitté la salle, une page –une de plus- se serait définitivement tourné entre elles, mais cette fois de façon irréparable. Que sa Prêtresse l’appelle était en soi un aveu de compréhension qui soulagea Europe au point de lui ôter un poids sur le cœur.

La dirigeante d’Olrun se retourna donc, observant son amie qui ne savait visiblement plus ou donner de la tête après de telles révélations –survenues dans le désordre, il fallait bien l’avouer. En fait, Viviane n’avait aucune idée d’à quel point elle était dans le vrai: depuis la mort d’Adrien, Europe n’était plus qu’une coquille vide. Et si elle avait cru que le temps qui passe parviendrait, n’était-ce que partiellement, à la soulager de son fardeau, et bien elle s’était gravement trompée. Pour oublier son chagrin, elle s’était abîmée en s’investissant au maximum dans ce rôle de Grande Prêtresse –un rôle qui la consumait littéralement de l’intérieur, hantait ses jours et ses nuits, la corrompait jusqu’à la moelle… A la fois un fardeau et une addiction, une drogue indispensable mais destructive… Oui, "Grande Prêtresse" n’était désormais plus une fonction mais une personne: elle-même, Europe Eléanora-Sun, et ce jusqu’à ce que la mort daigne la délivrer de cette captivité volontaire puisque le poste était sien à vie. Par conséquent, tout en comprenant les revendications de Viviane qui souhaitait voir son amie de jadis, souriante et compréhensive, revenir parmi eux, la Sorcière savait (et le déplorait) qu’elle ne pourrait jamais exaucer son souhait. Car même si elle se mettait à changer maintenant avec la meilleure volonté du monde, il était déjà trop tard: les événements avaient laissé une trace indélébile au plus profond de son âme.

C’était maintenant avec cette nouvelle âme qu’il fallait composer. Cette nouvelle Europe que les trois Prêtresses devaient soutenir. C’était inquiétant d’un point de vue démocratique mais plus le temps passait, et moins Europe regrettait d’avoir pris ses différentes décisions avec autorité; car il s’était avéré de tous points de vue, que c’était bien plus efficace comme cela. Dans un tel contexte, elle n’avait vraiment pas le temps de ménager la susceptibilité de chacun… Ainsi, elle avait fomenté ce procès expéditif contre Alexandrine d’une façon révoltante mais qui avait porté ses fruits: la fille d’Elisabeth se tenait à carreau, méditant une façon de récupérer le Livre de Lumière, Elisabeth elle-même surveillait son rejeton de près et de surcroît, Inès (mandatée secrètement par Europe elle-même) se chargeait de superviser le tout et de transmettre des rapports précis et réguliers à la Grande Prêtresse. Alors non, celle-ci ne regrettait plus ses méthodes, et tant pis si elles n’étaient pas plébiscitées... Ce qu’elle regrettait en revanche, était d’avoir perdu l’estime de Viviane et que surtout celle-ci ne comprenne pas ses motivations –ni sa façon de considérer que la fin justifiait les moyens.

Mais les histoires de Narcissa, Alexandrine et autres sujets épineux n’étaient pour le moment pas le thème principal de la discussion; au grand soulagement d’Europe, Viviane semblait avoir compris que ce quiproquo de partenariat commercial ne résultait en fait que de la maladresse de la dirigeante d’Olrun à s’exprimer. Et que cette « absence de compassion » n’avait eu que pour seul but de faire les choses vites et bien. Sa Prêtresse lui avait été amenée à moitié nue dans un état déplorable; mais une fois qu’Europe avait été sûre que son pronostic vital n’était pas engagé, qu’elle ne présentait pas de mutilations ou de traces de viol, mieux, qu’elle s’était réveillée, Europe avait préféré se concentrer sur l’aspect plus urgent des choses plutôt que de jouer au psychologue! Ce qui était la logique même pour la Sorcière, avait pourtant semblé une aberration pour Viviane; la faute, encore une fois, à l’incapacité d’Europe à exprimer ses sentiments correctement. Alors lorsque son amie la traita de parfaitement stupide, la dirigeante d’Olrun ne put empêcher, malgré sa tristesse, de laisser apparaître un sourire sur son visage.

Puis elle s’approcha de Viviane et l’observa d’un air solennel, tellement soulagée que celle-ci veuille bien lui pardonner, et bien entendu toute disposée à en faire de même. Elle se pencha et saisit la main de Viviane dans la sienne; assez maladroitement il est vrai, à la manière des joueurs de bras de fer bien que ce ne fut pas volontairement.


"Bien sûr. Et c’est moi qui te remercie." fit-elle avec une conviction inhabituelle dans le regard.

Elle ne fit pas de commentaire particulier sur la décision de Viviane, car elle la comprenait parfaitement: quitter Olrun si sa famille était morte… C’était un choix aux conséquences énormes, irrémédiables, mais ô combien compréhensible au regard de la situation de Viviane. Il était vrai que celle-ci n’avait pas eu à Forbach une vie exclusivement faite de bonheurs, au contraire; la ville lui avait presque tout pris. Sa sœur étant petite, son mari, et maintenant, l’éventualité des seuls parents qu’il lui restait… A croire tout simplement que Forbach elle-même était maléfique. Cette ville les détruisait tous à petit feu… mais ils y existaient et y survivaient, pour le meilleur ou le pire.
Mais Europe en était convaincue; son amie Prêtresse se trompait. Tout d’abord en affirmant qu’elle aurait préféré que Narcissa et Cassandra soient mortes. Certes, Europe ne les aimait pas, n’éprouvant aucun attachement pour cette femme Inquisitrice (et donc ennemie naturelle) et cette môme étrangement précoce. Mais il s’agissait de la famille de Viviane et si ces personnes étaient importantes pour la Prêtresse, elles l’étaient aussi pour Europe. Et en tant que telles, Narcissa et Cassandra avaient droit à toute la considération de la part de la dirigeante d’Olrun.
Cette même lueur de conviction flambant derechef dans son regard, Europe resserra sa prise sur la main de Viviane, la serrant avec chaleur et affection.


"Je comprends. Mais cela n’arrivera pas, car elles ne sont pas mortes. Fais moi confiance… Elles sont vivantes. Je le sais !!"

La Sorcière adressa un petit sourire encourageant à son amie et rompit leur étreinte, lui signifiant par un regard que c’était à regret qu’elle l’abandonnait sur le sofa; mais elle se faisait du souci pour sa santé. Ce genre de conversations si intenses n’était évidemment pas bon pour les nerfs, et c’était d’autant plus valable en cas de blessure à la tête!


~ ° ~ ° ~ ° ~ ° ~ ° ~ ° ~ ° ~ °


Plus d’une heure s’était écoulée depuis le départ du messager et il était à présent aux alentours de midi. Durant ce temps, Europe avait parcouru le Manoir de long en large, donné des directives, s’assurant que le messager soit annoncé dès qu’il apparaîtrait sur la route, et que les domestiques prodiguaient à Viviane le meilleur soin possible. La Grande Prêtresse était assise dans son bureau, s’occupant (malgré son ventre gargouillant férocement) des formalités et de la paperasse –Viviane ayant été agressée, il y avait bien entendu une plainte à enregistrer, une déposition à faire, des détails à préciser aux autorités afin qu’ils s’en servent pour arrêter le coupable, etc, le tout en évitant les écueils de la lenteur administrative car Forbach devait être sans dessus dessous depuis ce matin, à la découverte du cadavre dans l’Eglise. Elle avait également préparé un contrat pour Viviane, anticipant sur le futur partenariat commercial-alibi. Il était en réalité très dur de se concentrer sur une feuille de papier compte tenu de l’angoisse qui lui rongeait les tripes, et des émotions conflictuelles apportées par la discussion de ce matin; mais en tant que dirigeante, Europe s’efforçait de faire preuve de maîtrise de soi. Bref, elle se consacrait donc à tout un tas d’obligations dont il était son rôle de s’occuper, quand Henrietta surgit dans la pièce, lui annonçant le retour du messager.

"Qu’on le fasse entrer immédiatement et qu’il vienne dans le grand salon."

Europe se leva, ferma son bureau et descendit les escaliers en vitesse, tâchant en vain de calmer ses nerfs à vif. Elle pénétra dans le grand salon au moment même où le messager faisait de même, à l’opposé de la pièce, introduit par un majordome. Viviane se trouvait entre eux, toujours allongée sur son sofa. Europe n’attendit même pas que l’homme vint à elles; elle se porta d’elle-même à sa rencontre et le gifla d’une façon si magistrale qu’il vacilla sous le choc, stupéfait, en portant une main à sa joue endolorie.

"La prochaine fois que tu mets autant de temps pour une tâche aussi simple et aussi urgente, je te jure que tu seras cantonné au nettoyage des latrines pour le restant de tes jours. Compris?"


L’homme acquiesça et Europe le somma de donner les nouvelles qu’il était allé expressément quérir au château de Frauenberg. Pendant un bref instant, une terrible tension plana, puis l’homme donna son verdict: elles étaient vivantes et en parfaite santé, aucune agression n’ayant eu lieu dans les appartements de la Comtesse! Europe renvoya le domestique d’une voix sévère et se retourna vers Viviane, hésitant entre arborer un visage rayonnant ou un air de « je te l’avais bien dit ». Elle finit par opter pour un compromis entre les deux, à savoir un sourire modéré mais franc, et s’approcha de la Prêtresse convalescente.

"Bien. Je vais tout de suite envoyer une personne digne de confiance au château, afin de prévenir Narcissa et Cassandra… Je vais te faire apporter du papier et de l’encre, tu pourras leur expliquer la situation comme tu le souhaites. Ne t’inquiète pas, je n’enverrai pas cet incapable leur porter la missive! Mais ma cousine Merope doit se rendre à Frauenberg pour la semaine et je sais que je peux compter sur elle pour transmettre un message rapidement. Aujourd’hui, je procéderai aux aménagements, de sorte que le Manoir soit prêt à toutes vous accueillir dès demain après-midi. Quand les préparatifs seront terminés, j’enverrai un fiacre au château pour que Narcissa et Cassandra viennent avec leurs bagages, en un seul voyage."


[Suivant = La nuit n'est pas terminée]


Dernière édition par Europe le Ven 10 Juin 2011 - 0:47, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/Premieres-Lueurs-c5/Le-Recueil-f
Viviane Valdemar
Vieille peau fripée à pustules
Viviane Valdemar


Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitimeDim 6 Mar 2011 - 2:24

Viviane avait le sentiment que l’attente allait la tuer. Jamais elle n’avait attendu à ce point-là le retour d’un simple messager, et que celui-ci se faisait long à attendre. Elle n’en pouvait plus ! Malgré les paroles réconfortantes d’Europe, Viviane ne pouvait s’empêcher de craindre, ou même de croire le pire. Plus que jamais, la conscience d’avoir peut-être perdu sa sœur et sa nièce envahissait son esprit. Cette idée lui glaçait littéralement le cœur, elle se sentait vidée, épuisée, comme si on avait enlevé d’elle toute substance vitale. De temps à autres, des larmes roulaient sur ses joues, elle n’essayait même pas de les cacher. Elle n’avait aucune honte de son état de faiblesse, elle avait l’impression qu’il ne lui restait rien à quoi se raccrocher pour ne pas sombrer, pas même Europe. Bien que leur amitié semblait se diriger vers un retour à une réelle bonne entente, Viviane n’avait pas encore retrouvé la confiance qu’elle avait autrefois en son amie. Elle doutait toujours de son jugement, de ses impressions et le pressentiment positif de son amie n’avait aucun écho en elle.

Alors qu’elle aurait dû dormir pour tenter de recouvrer des forces, elle se forçait à garder les yeux ouverts. Chaque fois qu’elle les fermait, elle revivait le cauchemar de la nuit précédente, mais à ces visions d’horreurs s’ajoutaient désormais les cadavres de sa sœur et de sa nièce, dans des cercueils noirs. Leurs visages pâles étaient figés dans des expressions de douleur et de terreur que Viviane ne pouvait supporter. Elle se haïssait de ne pouvoir faire confiance à Europe et à son jugement qui lui éviteraient ces images atroces. Le temps passait, mais chaque seconde semblait durer une heure, chaque minute, une éternité, mais pourquoi ce messager ne revenait-il pas ? Toujours fiévreuse, Viviane délirait à moitié et imaginait déjà qu’il avait été attaqué lui aussi par l’Agent et qu’il était mort.

Alors qu’elle pensait qu’elle ne pourrait pas supporter une seconde de plus cette interminable attente, son labeur prit fin. Le messager envoyé par Europe venait d’arriver dans le salon, suivi de près par cette dernière. Sa réaction surprit Viviane qui ne s’attendait absolument pas à voir l’homme recevoir une gifle magistrale. Si la situation n’avait pas été aussi difficile pour elle, elle aurait probablement ri de bon cœur en voyant Europe sortir de ses gonds.

Enfin, alors que la tension était à son comble, Viviane fut délivrée par les paroles du domestique. Elles étaient en vie ! Cassandra et Narcissa étaient en vie ! Et en parfaite santé ! Des larmes de soulagement s’échappèrent des yeux de Viviane. En vie, elles étaient en vie. Cette phrase tournait en boucle dans sa tête, comme une litanie qui se répétait encore et encore tant et si bien qu’on ne comprenait plus tellement ce qu’elle voulait dire. Viviane n’entendit pas grand-chose de ce qu’Europe était en train de lui dire, elle ne retint que l’essentiel, on allait d’ici peu envoyer chercher sa famille, c’était tout ce qui comptait. Plus jamais elle ne prendrait le moindre risque qu’il puisse leur arriver quelque chose, commencer par les mettre à l’abri au manoir était la meilleure chose à faire.

- Merci Europe ! Merci pour tout ! Je vais de suite leur écrire !

Une fois qu’on lui eu apporté le matériel, elle se mit à écrire à toute vitesse pour supplier sa sœur d’accepter d’être logée désormais au manoir Eleanora-Sun, avec elle. Ce dernier argument était celui qui à coup sûr ferait pencher la balance en sa faveur. Cassandra avait mentionné plusieurs fois le désir d’habiter avec elle, voilà qui serait une occasion rêvée ! De plus, Cassandra savait parfaitement que si elles habitaient ensemble, Viviane serait en mesure de la protéger, ainsi qu’Europe, même si Cassandra ignorait qu’Europe faisait partie d’Olrun, Narcissa, elle, ne l’ignorait pas. Or, Cassandra refusait rarement quelque chose à sa fille, surtout dans ce genre de situations.

Une fois que la lettre fut rédigée, Viviane la donna au domestique qui attendait en le pressant d’être le plus rapide possible. Une fois que ce fut fait, elle s’endormit comme une masse dans le fauteuil, pour cette fois, s’offrir un sommeil réparateur.

[hrp]C'est court, mais je voyais pas quoi faire d'autre... On clôt ? Je pensais envoyer une lettre à Cassandra et puis voir pour leur emménagement si on le joue ou non. [/hrp]
Revenir en haut Aller en bas
https://witchslay.forumsrpg.com/fiches-personnages-f3/viviane-va
Contenu sponsorisé




Tout finit par des larmes Vide
MessageSujet: Re: Tout finit par des larmes   Tout finit par des larmes Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 

Tout finit par des larmes

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
The Witch Slay :: Sur les Pavés - Ville :: Les Quartiers Résidentiels :: Les Maisons Bourgeoises :: Manoir Eléanora-Sun-