Une pomme à la main

Aguerri(e)

Dimanche. Un jour bien triste. Une pluie légère tombait paresseusement sur Forbach, au gré du vent, illuminé par un soleil blafard qui tentait de percer les nuages gorgés d'eau. Le marché pourtant ne désemplissait pas car les gens de toutes castes se croisaient pour faire leurs causette hebdomadaire. Des potions par-ci, des nouvelles de la familles par là. Ce joyeux brouhaha était accompagné par un joueur de flûte qui s'agitait en tout sens parmi la foule pour lancer des éclats de joie de toutes parts. Il passa près d'une silhouette encapuchonné dans un long manteau d'hermine noir. Ely sourit à son passage et continua sa route, écoutant plus attentivement les conversations que la musique et portant plus attention à ceux qui l'entourait qu'aux étals. Les nouvelles du jour? Elles étaient bien maigres, on répétait les histoires à propos de cet Agent du Diable. Cette nouvelle ébranlait les habitans, alors que Forbach subissait à nouveau les assauts de phénomènes étranges.

Son regard s'assombrit en repassant tous les évènements qui avaient eu lieur jusque là à Forbach. Les problèmes, les manifestations étranges, la chasse aux sorcières. Tout ça faisait presque parti des habitudes quotidiennes de chacun, et c'était bien triste que de se dire que les habitants de Forbach étaient étonnés quand il n'y avait pas un décès de manière régulière.

Le pas un peu plus lent alors, Elena suivit un attroupement pour rejoindre le marchand de fruits et demanda une pomme. Une belle pomme bien rouge, lumineuse qui promettait d'être juteuse et très goûtue. Comme une enfant, Ely aurait presque sautillé de joie. Elle adorait les pommes. Cela lui rappelait les tartes que faisait sa mère quand elle était plus jeune. Une fois ces apprentissages finit, avant qu'elle intègre une quelconque fratrie de sorcières, elle rentrait dans la cuisine, le regard malicieux, pour venir humer l'odeur de la pâte en train de cuire. Comment oublier ce parfum beurré au arrière goût de miel? C'était un tel régal que rien que d'y penser, elle en avait faim.

Elle croqua la pomme à pleines dents et continua sa marche tout en écoutant de ci, de là les ragots. Elle s'attarda même sur une discussion et n'eut pas grand temps de réagir lorsqu'elle heurta quelque chose. Ou plutôt quelqu'un qui jusque là lui tournait le dos. Elle avait rattrapé de justesse sa pomme et reprit contenance tout en s'excusant poliment.

"Pardonnez ma maladresse. Je ne vous ai pas fait mal au moins?"

Elle s'inclina légèrement en guise d'excuse et de révérence. Dans le genre catastrophe ambulante, elle venait de marquer un bon point. Espérons juste que ce ne soit pas un gros barbu paysan... Auquel cas elle devrait abuser de son rang pour calmer l'atmosphère.

Apprenti(e)

Vincenç aima lui apprendre les rudiments des affaires et du marchandage, bien que son élève mit toute sa mauvaise volonté pour ne pas que le marchand soit floué. Même en lui expliquant qu’en baissant les prix, on était tous gagnants, la jeune fille refusa de le croire. L’argent n’était jamais en trop et tout le monde en avait besoin, ce n’était pas une pièce en plus qui allait faire mal au budget de la maison. Ce qui fit rire une bonne partie des auditeurs autour de l’étal du boucher. On était là pour marchander pas pour faire la charité, de plus, il est fort probable que ce filou de Gédéon soit bien plus riche que le tout le marché réunit avec les prix qu’il instaurait, cela n’aurait étonné personne. Alors toute sautillante, Narcissa lui demanda de baisser de trois pièces son prix ! Mais on lui refusa, alors elle revit sa proposition à la baisse. Pour blaguer, on lui refusa encore. Alors avec aplomb, elle haussa les épaules tout en soupirant qu’elle irait ailleurs. Ce qui créa l’hilarité générale. Quand soudain une personne la heurta, elle eut à peine le temps de rassurer son professeur improvisé par un geste doux, qu’une jeune femme s’excusa et s’inclinât. Une politesse qui la remit dans la position la plus inconfortable qui soit, celle d’une noble qui part son rang élevé n’avait pas sa place, ici. Ce qui gêna beaucoup Narcissa :

- Tout va bien, juste un peu surprise. Est-ce que vous allez bien ?

Il était hors de question qu’elle arrête sa récréation par ses obligations qui obligèrent à revenir aux valeurs dont elle ne croyait de moins en moins, depuis la mort de son père. Avec enthousiasme, elle posa son petit sac de poireaux, s’essuya une main sur sa robe et la lui tendit :

- Je suis Narcissa, et vous ?

Et à l’apprenti du boucher de dire en riant : « Non, c’est la p’tite dans l’coin ! Allez va, l’ Vincenç j’t’l’fais au prix qu’tu voulais et j’t’fais même un petit cadeau pour l’p’tite. Elle s’est bien débrouillée, mais elle a encore des trucs à apprendre avant d’être aussi bon qu’toi. Oh ! Pour t’gamine, je vais t’donner ça aussi ». Ce qui confirme une des lois essentielles dans le marchandage, il ne fallait jamais oublier d’amener un plus jeune et mignon que soi.

Spoiler:

Aguerri(e)

Au lieu du grand bûcheron barbu avec une grande hache, ce fut une jeune fille qui se retournait face au visage d'Elena. La jeune femme se radoucit donc à la vue de cette enfant. Enfant? Non, ce n'était pas totalement une enfant, elle commençait à s'épanouir lentement vers une future femme à la chevelure de feu. Son corps, bien qu'encore marqué par l'enfance portait les stigmates d'une maturation bien présente. Les courbes de sa silhouette commençait à s'accentuer pour laisser apparaître des atours avantageux, sa poitrine se dessinait lentement comme deux boutons de rose qui grandissaient un peu plus chaque jour jusqu'à laissé éclore une beauté saisissante.

Elena laissa son visage s'illuminer face à la jeune fille. Elle c'était excusé et l'enfant lui répondit avec une politesse digne d'un certain rang et un vocabulaire digne d'une enfant.

"Je vais bien, ne vous en faites pas. Je suis juste bien maladroite."

Et puis comme pour signifier qu'il ne s'était rien passé, la jeune fille épousseta, posa un petit sac et tendit sa main en se présentant. Cela eut pour effet de faire rire avec douceur la sorcière. Un rire qui n'avait rien de moquerie, pas de méchanceté, c'était juste que la jeune demoiselle semblait suivre un certain protocole. Elena sourit et pour ne pas choquée la demoiselle lui rendit sa poignée de main en faisant une légère courbette.

"Elena Mirova, du manoir Mirova."

Ce nom ne serait sûrement pas inconnu à cette jeune enfant, bien qu'elle ne serait sûrement pas capable de savoir vraiment qui elle était, le nom lui dirait peut-être vaguement quelque chose. Au loin un marchand semblait parlé à un homme de cette enfant. Du moins, Elena crut le comprendre quand la jeune fille sembla se tourner légèrement, attiré par la voix du boucher. Elena ne se séparait pas de son sourire depuis le début et finit par questionnée la demoiselle.

"Me trompe-je ou une jeune fille telle que vous ne devrait pas être ici? Vous semblez appartenir à un certain rang et je suis heureuse de ne pas être la seule à me mêler à cette foule bigarrée."

Elle joua quelques secondes avec sa pomme avant de demander très poliment.

"Je suppose que vous n'êtes pas venu seule? Il ne faut pas s'aventurer seule dans ce genre d'endroit ma chère."

Elle eut un regard un peu protecteur, naturel. Une enfant noble ne devait pas se balader seul dans les marchés, n'importe quel brigand aurait pu s'en prendre à elle. Elena ne se moquait point, très loin d'elle cette idée. Elle faisait une simple remarque. En attendant une quelque réponse ou réaction de son interlocutrice, elle croqua à pleines dents dans cette délicieuse pomme rouge qu'elle tenait en main. Elle ne quitta pas son sourire, avec un visage plus doux que de coutume pour cette jeune demoiselle.

[hrp : pardon c'est un poil court aussi]

Apprenti(e)

Une nouvelle courbette ? C’était la première fois depuis un peu plus d’un an dans ce village qu’on ne lui serrait pas la main tout simplement. Narcissa réussit pourtant à cacher sa surprise, mais tenta de rendre l’atmosphère moins guindée, avec un grand sourire et un peu d’humour. Si elle commençait à exiger à appliquer une certaine étiquette, la conversation couperait court. Dés fois avoir un sang bleu pouvait être une plaie !

- Sans vouloir vous manquer de respect, vous êtes la première personne qui vient de créer une nouvelle façon de saluer. Mais je ne vous en veux pas, cela m’amuse beaucoup ! Termina-t-elle avec un sourire rayonnant.

La jeune fille écouta attentivement la présentation de son interlocutrice. Mirova ? Mirova ? Oh, mais oui, comment oublier ? Avec un petit air amusé, elle lui répondit :

- Je vous prie de pardonner mon étourderie, mais comment ai-je pu oublier votre grâce lors du dernier bal ? Sachez qu’un certain Baron ne parle que de vous depuis cette soirée. Je suis enchantée de faire votre rencontre.

Et aux questions de répondre :

- La personne qui veille à ma santé m’a recommandé de l’air frais et de la marche, quelques heures par jour. Or je n’ai pas une nature contemplative et je déteste l’oisiveté. Bien que cela me donne l’excuse de m’adonner à divers sports, j’aime aussi à me détendre en rendant service. Ne trouvez-vous pas que faire le marché est une promenade divertissante ? Mais soyez assurée que je ne sors jamais seule, mais je sais que je ne crains rien ici.

Puis l’apprenti du boucher ajouta :

- Pour l’bataille d’boue qu’on a eue, personne n’l’touche s’non, l’aura une belle correction ! Pas pour rien qu’c’est l’p’tite !

Tout le monde ria de bon cœur, l’anecdote avait déjà fait le tour du village et avait donné à la petite Narcissa une très bonne image. Sauf que dans le Château…

Aguerri(e)

Elena avait gaffé, interprétant mal la façon de saluer de la jeune fille face à elle et, même si elle même n'avait pas bien saisit sa façon de faire, elle avait trouvé cela étrange et amusant. C'était une très jeune demoiselle, donc elle ne nota de toute façon pas. La jeune fille était amusée par cette nouvelle façon de faire. Bon est bien tant pis, au moins si cela amusait c'était toujours bon à prendre. Elena c'était tout de même présenté, légèrement confuse de son salut bien manqué. Le petit bout de jeune fille réagit à son nom et elle eut un très court instant de réflexion avant de retrouver ce que ce nom de famille lui rappelait.

Un certain Baron ne cessait de dire des sur elle depuis le bal? Bon sang, Elena fut légèrement étonnée de la nouvelle, elle avait pourtant voulu être discrète mais elle ne se souvenait pas avoir marqué autant qui que ce soit. Encore un prétendant à repousser, heureusement qu'Elena n'est pas une femme qui retournait sans arrêt les têtes. Elle était jolie, mais pas renversante alors si quelqu'un ne cessait de palabrer sur elle, cela devenait gênant.

Par politesse, cependant, la jeune femme ne s'interrogea pas plus sur l'identité de ce secret admirateur et répondit à l'enchantement de la petite demoiselle.

"C'est un réel plaisir pour moi aussi Narcissa."

La jeune fille avait du répondant, expliquant qu'on lui recommandait la marche et qu'elle aimait fortement ces petites excursions au marché. Elle n'en était sûrement pas à sa première promenade ici et Elena souri.

"C'est effectivement une balade toute à fait enrichissante et particulièrement appréciable. Ici les gens ne montre par leur sang comme une marque de valeur mais leur savoir faire. Aucun de ces gens ne possède de titre, ils n'ont pas accès à la connaissance, mais pourtant, ils font de grandes choses et nous avons plus besoin d'eux que l'inverse. J'aime beaucoup venir ici, on y fait des rencontres étonnantes."

C'était bien vrai, Elena aimait se faufiler incognito et acheter, discuter. Elle ne marchandait jamais, en réalité, elle savait que ces gens avaient besoin d'argent et sachant qu'elle en avait bien assez, elle ne refusait pas de léguer un peu de son bien pour ceux dans le besoin. Comme les paysans, et les artisans étaient des gens très fiers, ils refusaient de l'aide, ne faisaient pas la manche et détestait qu'on les prennes pour de pauvres petits êtres fragiles et sans avenir. Elena préférait les considérer avec égalité et se laissait arnaquer un peu pour la bonne cause.

Elle souriait toujours et son visage s'illumina un peu plus lorsque l'apprenti boucher rappela une certaine anecdote à propose de bataille de boue.

Évidemment, cette nouvelle avait fait le tour de la ville en étant le fil rouge des ragots d'un ou deux journées. Ainsi donc c'était Narcissa de Saint-Loup. Intéressant, la fille Saint-Loup. Elle était bien jeune, mais Elena la pensait encore plus jeune. Peut-être que son rang de noblesse lui donnait en fait un trait légèrement plus vieillit par quelques savantes poudres? Ou était-ce le poids du protocole et des apprentissages qui les rendaient légèrement plus mûrs?

Bah!Peu importait, c'était une très jolie jeune fille, et très rafraîchissante ce qui n'était pas pour déplaire à la jeune femme.

"Pardonnez ma brutalité mais vous êtes Narcissa de Saint-Loup n'est-ce pas?"

La sorcière patienta gentiment qu'on lui réponde. Si c'était bien elle, et il n'y avait que peu de doute, elle se demandait si elle était une sorcière ou non? Après tout, Elena avait suffisamment servit auprès d'Olrun pour connaître la tante de cette dernière, Viviane Valdemar. Le nom était différent à cause du mariage de sa sœur, mais Elena savait sans aucun doute la véritable identité de Viviane et cette petite Narcissa lui ressemblait beaucoup. Si cette petite était bien qui elle croyait, alors son appartenance à Olrun était plus qu'évidente si elle développait des capacités à user de la magie.

Apprenti(e)

- Forbach est étonnant à bien des endroits, en effet. Les rencontres sont surprenantes, car le cœur de ses habitants est lumineux et chaleureux.

Depuis son agression et ce fameux combat de boue, la jeune fille fut étonnée d’avoir eu une certaine popularité auprès des habitants de tous bords. Cela n’était pas pour lui déplaire, car permettant de nouer de nombreuses amitiés et d’avoir un petit carnet de relations fort utile. En fait, elle devait le reconnaître, ce village était bien plus accueillant et humain que sa ville natale. Au moment où la jeune fille voulait lui répondre, sa parole fut coupée par le boucher :

- C’est bien la p’tite, tiens ! L’en dit des mots, pour dire qu’on l’aime bien ! L’Vicenç, fait qu’elle n’change pas, hein. Pour ça, j’t’donne ça en plusse. Lui faut des forces, l’est toute blanche.

Décidément amener Narcissa au marché restait toujours aussi bon pour les finances. Vicenç ria et prit la viande de bon cœur et en profita aussi pour parler du toit du commerçant qui d’après certains dires avaient besoin de bras pour être réparé. Pendant qu’il proposait les services des hommes de la jeune fille pour se faire encore mieux voir, Narcissa décida de poursuivre la conversation, plus rayonnante :

- Vous n’avez pas été brutale, vous n’avez pas besoin de vous faire pardonner. Si les rumeurs sont plaisantes alors je suis bien Narcissa de Saint-Loup.

Contrairement à son interlocutrice, elle ne cherchait pas à reconnaître des signes d’une quelconque appartenance à un monde surnaturel, pour être assurée de ne pas avoir eu à désobéir à sa Grande Prêtresse. De toute façon, en manquant cette consigne de sécurité, la vie était plus belle et plus simple et si cela pouvait faire grogner Europe plus tard, grand bien y fasse !
Pourtant cela n’était pas faute qu’Hélion lui martèle la dangerosité des sorciers du Lys Noir tout autant que l’idée d’être la nièce d’une prêtresse pouvait la transformer en un sujet plus vulnérable. Pfffff ! Quelle rabat-joie ! Et puis, le temps lui avait bien prouvé que son Aguerrie était une personne bien plus néfaste et méchante que ces ennemis soi-disant naturels. Si cette dame charmante et d’une compagnie des plus agréable était vraiment de cette tribu et bien, tant pis ! Non tant mieux ! Mais une petite voix lui soufflait qu’il serait intéressant de conduire la conversation sur un sujet qui normalement ferait sursauter un tant soit peu un ennemi, histoire de s'assurer de quelques petites choses :

- Je suis en partie de cette région, par ma mère. Connaissez-vous ma marraine, ma tante Viviane ?

Aguerri(e)

Etait-ce la jeunesse de son interlocutrice ou bien le fait que celle-ci soit au contraire très mature d'esprit qui les mettaient d'accord? La surprise des rencontres faites au cours d'un marché était délicate et Forbach était pour cela une ville agréable. Pour ce qui était du reste, c'était bel et bien différent. Elena ne pouvait décemment pas voir cette ville comme un cocon de bienêtre. C'était un refuge pour le mal et pour la souffrance des âmes de ce comté. Il était même d'ailleurs difficile de penser que cette ville connaîtrait un jour une paix durable. Entre l'inquisition qui menaçait, cet Agent du Diable qui terrorisait le monde, il n'y avait qu'un pas pour que tout ce petit monde éclate dans une guerre de feu et de sang, de magie et de religion. Elena chassa cette idée en se disant qu'au moins, le marché apportait un peu de normalité dans sa vie. Une étincelle de banalité dans un océan d'horreur et d'occulte.

Le bouché riait de bon coeur en offrant à l'homme qui l'accompagnait un peu plus de provisions que demandées. Elena sourit, cette fille savait se faire apprécier sans aucune difficulté et le charme opérait en ce moment sur la jeune noble. Mais alors qu'elle s'interrogea sur son nom, la jeune fille lui avoua être effectivement la jeune De Saint-Loup. Et comme si les deux jeunes personnes se posaient la même question, Narcissa demanda si Elena connaissait Viviane.

Elena eu un sourire, satisfait. Elle avait sa réponse. Pour elle c'était clair, l'enfant faisait parti de la tribu, ou au moins connaissait clairement la véritable nature de sa tante.

"Oui je la connais bien."

*Enfin, connaissait bien serait plus juste.*

Si Elena avait quitté son ancienne tribu, elle était restée suffisamment longtemps pour connaître plutôt bien tout ce petit monde et ces connaissances avaient quelques peu servies au Lys Noir. Chaque membre qui venait de l'autre bord avait des informations nouvelles et c'était toujours important. Mais depuis que la jeune femme avait quitté Olrun, elle n'avait pas eu le loisir de croiser ces anciennes alliées. Et c'était tant mieux. Au départ, elle croyait qu'elle serait incapable de combattre contre, et maintenant elle savait tout le mépris qu'elle avait. Toutes ces filles étaient décidément sur le mauvais chemin. Certes Alicia avait parfois commis des erreurs, mais qui n'en commet pas. Europe de son côte n'avait pas toujours été parfaite et l'histoire le prouvait.

"Avoir pareille marraine doit être une chance pour vous n'est-ce pas?"

C'était même un accès à la connaissance important, quoique la prêtresse d'Olrun devait mesurée les connaissances qu'elle offrait à sa petite nièce adorée, à n'en point doutée! Elena avait changé légèrement de comportement en repensait à Viviane et se souvenait d'une bonne femme pas forcément agréable. Du moins, dans ces souvenirs. Elena ne l'appréciait pas du tout, même quand elle était parmi les sorcières d'Olrun, et se rappelé d'elle la rendait un peu nerveuse. Le ton de sa voix s'était teinté d'une infime agressivité, suffisamment pour que les lèvres d'Elena se referment en une moue un peu plus rigide. Elle reprit cependant le cours de la conversation.

"Hélas je ne l'ai pas revue depuis fort longtemps. Mais, je vous avoue que je ne la connaissait pas de longue date."

Et elle ne lui manquait pas! Qu'on se le dise, Elena avait la rancune facile, un de ces plus gros défaut et elle était incapable d'être impartiale sur son jugement des sorcières d'Olrun et c'était pire quand on parlait de quelqu'un qu'elle ne portait déjà pas dans son coeur auparavant. Maintenant il s'agissait de détourner le sujet correctement. Elena croqua un bout de sa pomme tout en fixant Narcissa.

Apprenti(e)

L’ambiance était tendue, Narcissa avait toujours des difficultés à penser normalement quand il s’agissait des personnes aimées. Comment ne pouvait-on pas apprécier sa tante ? Elle avait un fort caractère certes, mais qui n’en avait pas un ? Ah non, cela ne devait pas se passer ainsi ! Si elle aimait, il fallait que tout monde soit de son avis ! Narcissa se tourna vers l’apprenti boucher, et avec un air de défi, lui lança :

- Et toi, qu’en penses-tu de ma tante ?

Il baissa la tête et murmura quelques mots. La jeune fille plus chaleureuse continua :

- Ne fait pas ton timide, voyons ! Nous savons tous que tu rougis quand elle est là !
- Et bien… c’est que….
- Ce n’est pas ceci, qui faut dire.
- Je l’aime bien.

Narcissa se pencha et parla plus fort :

- Comment ? Je ne t’entends pas !

Puis le boucher hilare enchérit :

- C’est vrai ça, l’drôle on ne t’entend pas.

Puis le jeune homme parla clairement :

- J’l’aime bien.
- Si tu bredouilles ainsi, nous allons le dire tout haut !
- Non !

Et toutes les personnes autour de l’étal crièrent tous en cœur :

- J’L’AIME BIEN !

Mais ceci n’était pas assez, il fallait rendre cette histoire bien plus drôle et en profiter de la bonne générale pour faire passer le message. Si Viviane n’était peut-être pas appréciée au sein de la Tribu ennemie (et elle comprenait que cela puisse être légitime), il fallait absolument prouver même un peu que pour le reste du village c’était une tout autre affaire. Narcissa demanda d’une voix puissante :

- Non, nous l’aimons bien ! Je veux qu’on vous entende dans tout le marché ! Allez, tous ensemble, trois, deux, un !
- NOUS L’AIMONS BIEN !

L’apprenti était aussi rouge qu’une pivoine et décida de trouver un intérêt important à ranger une caisse en bois dans la boutique. Quand il partit en courant, tout le monde ria de plus belle. Narcissa était vraiment très fière de son coup, hilare elle se tourna vers Elena et décida enfin de lui répondre :

- Vous croyez ? Et bien vous voyez, j’ai tout ce qui faut pour vous prouver que l’on ne peut qu’être chanceux d’avoir l’amitié et l’amour de ma marraine. Allez, sans rancune.

Narcissa lui tendit la main.

Aguerri(e)

Si Narcissa avait été plus âgée, Elena aurait eu face à elle une grande oratrice. La jeune demoiselle avait rallié à sa cause les villageois qui commerçaient ici et tous disaient en cœur ce qu'elle voulait entendre. Elena ne saisit pas la réaction de cette petite rouquine, mais sa façon d'agir la faisait rire. Ce n'était pas de la moquerie, c'était de la surprise. Cette fille était surprenante, réellement surprenante. La jeune noble répondit à cette main tendue par un large sourire.

"Vous savez vous faire aimez des gens, c'est une grande qualité."

Elle sourit de plus bel et croqua le dernier bout de sa pomme.

*Mais ne t'entoure pas de n'importe qui.*

Elena devinait quels risques prenaient cette petite demoiselle en s'affichant face à l'ennemi. Il valait mieux pour elle que tout ceci s'arrête là, sinon Narcissa aurait des nouvelles de sa chère Grande prêtresse Europe. Il fallait faire peur à cette gamine, pour tenter de l'éloigner. Et si celle-ci revenait à la charge, alors il faudrait la mettre en garde.

Son regard mua légèrement en une malice évidente. Même si Narcissa pouvait convaincre une bande de paysans que sa marraine était bonne, la sorcière du Lys resta avec son avis et savait qu'elle ne l’apprécierait jamais, même pas assez pour être parfois impolie. Elle fit mine que quelque chose l'attendait et s'excusa auprès de la jeune demoiselle.

"Veuillez me pardonnez mais on m'attend. Prenez bien soin de vous et... saluez dont votre tante."

Elle eut un sourit un peu inquiétant et tourna le dos pour disparaître dans la foule en un éclair. Un peu plus loin, elle s’emmancha dans une rue et pris le trognon de pomme entre ces doigts. Elle le fit plier tout en regardant la jeune demoiselle. Elle sourit encore et finit par rejoindre son cheval pour rentrer au Manoir. Cette jeune fille lui restait en mémoire, son visage et sa simplicité. Cette gentillesses... C'était différent de Viviane Valdemar, cette harpie grincheuse et sévère à l'aura effrayante. Elena déglutit en se rappelant un de ces regards que cette femme avait pu lui lancé, des années auparavant. Les deux membres de cette famille étaient décidément fort différente. A croire que Viviane n'était pas toujours comme ça?