The Witch Slay
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 Adieu à l'été, adieu à la lumière

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Europe
Fugitive
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Europe


Adieu à l'été, adieu à la lumière Vide
MessageSujet: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeMar 14 Oct 2008 - 19:22

[PV: Adrien & Abi (& Eleonor?)]
[Précédent => Manoir Eléanora-Sun]


Démarche indolente. Regard vague. Sourire en coin.
Non… ça, c’était avant…

Pas réguliers et déterminés. Regard fixe. Visage neutre.
Ca, c’était la nouvelle Europe.

En plusieurs mois, elle avait si complètement changé qu’elle en était presque devenue méconnaissable, et avait adopté comme réflexe quasi-instinctif une attitude impavide, toujours sur le qui-vive, observant et écoutant avec acuité les alentours, qu’ils revêtent la forme de son somptueux manoir, des rues pavées de l’antre du mal ou même du Château de Frauenberg. Un oiseau de proie, voilà ce qu’elle était devenue; disparue (peut-être à jamais) la Sorcière souriante, compréhensive, un brin provocatrice, qu’Olrun et tout le monde avait connu. Elle avait pris ses résolutions depuis longtemps; depuis cette fameuse nuit de la Perquisition, en fait, et les événements qui s’étaient déroulés depuis lors n’avaient pas du tout contribué à lui donner l’envie de retourner en arrière… au contraire.
De toute façon, il était déjà trop tard.

La Prêtresse marchait donc à un rythme soutenu dans la Schwarzwald, insensible à l’incontestée magnificence du lieu. L’automne avait rendu l’endroit absolument merveilleux pour les yeux et pour les sens, parant d’une dorure rutilante le moindre tronc havane, la moindre fougère, et jusqu’aux petits cailloux éparpillés sur le sol qui brillaient comme des pièces d’or. Les feuilles des arbres, séchées par des brises plus fraîches qui commençaient à souffler, se courbaient doucement, revêtant une parure fauve et chatoyante; mais certaines étaient encore pleines de vie, d’un vert tendre, et les dernières arboraient un rouge sanguin qui filtrait les rayons évanescents du soleil tardif, donnant à la voûte des arbres un éclairage multicolore et féerique. Tout Inquisiteur qui se serait trouvé là en cette instant aurait instantanément crié à la sorcellerie, tant les teintes racées de l’automne étaient poignantes, faisant ressembler la forêt à un joyau étrange, magnifique et baroque.
Europe marchait dans ce paysage enchanteur; et par ses cheveux noir d’encre aux reflets violins, son teint pâle et sa robe d’une moirée couleur pêche, elle ressemblait à une divinité païenne. Au dessus de sa tête, de multiples oiseaux filaient de branche en branche en tissant une toile sombre de leurs traînées de plumes; et le cri de l’espèce résonnait seul dans le lointain.

Adrien…
Elle lui avait par lettre, n'éprouvant pas vraiment l'envie de le voir en face, donné rendez-vous Là-Bas, ainsi qu’Abigael et Eleonor, dans cette Clairière, la même qui avait vu se concrétiser le projet de la lettre de réconciliation sur un velin immaculé, et la même encore qui avait porté dans ses entrailles les racines des Lys mortels, la même qui avait vu tomber Elena avec une grâce indéniable et mortifère, la même qui allait voir le Vicomte se faire miroiter le rang de Prêtre, la Clairière, cœur chaotique de la Nature et de tous les malheurs… Car les temps avaient changé, une fois encore. En vérité, Europe ne savait plus que penser. Elle revoyait encore, avec une netteté sidérante, la discussion qu’elles avaient eu, Elizabeth, Abigael et elle, quelques semaines auparavant; le beau visage voilé d’ombre de la femme du Vicomte qui lui annonçait, à demi-mot, des mots terribles... son mari avait eu avec Alicia de Sarrebourg des contacts qui l'avaient rendus étrangement hésitant; et bien qu'elle ne sache pas officiellement ce qui c'était dit lors de ses entrevues, Europe pouvait sans peine deviner que le venin du Lys Noir était déjà activement à l'oeuvre pour s'approprier le Vicomte...

La Sorcière n’avait jamais été plus mitigée qu’en cet instant. Une part d’elle était ulcérée, révoltée, piquée au vif de ce qu’elle considérait comme une véritable trahison de la part de quelqu’un en qui elle avait l’estime la plus haute: Adrien d’Hasbaueur, qui l’avait toujours soutenue, elle-même faisant pareillement, et eux deux portant sur leurs épaules avec fierté la représentation du clan d’Olrun. Une autre part d’elle était inquiète, angoissée à l’idée que le Vicomte qui était une place politique extrêmement importante et un atout de poids pour sa tribu, quelle qu’elle soit, n'hésite et n’ai décidé, finalement, de rejoindre le rang de celles –de celles !!- qui avaient emplie de Lys tuant Elena cette même clairière où Europe allait le faire venir ce soir –on ne choisit pas le lieu d’un rendez-vous par hasard. Mais elle n’était pas que partagée en deux. Une autre part d'elle-même éprouvait du remord à l'idée de condamner ainsi l'attitude d'Adrien, alors qu'elle-même s'était juré, quelques semaines auparavant, de ne pas hésiter une seule seconde à trahir son clan si cela s'avérait nécessaire... Et la dernière part d’elle-même, sans doute plus étendue mais plus profondément enfouie, éprouvait une colère vengeresse à l’idée seule des tentatives venimeuses et sournoises des manipulations d’Alicia. Elle avait cru en elle pendant longtemps, espérant que ses hypothèses seraient fondées et que la dirigeante du Lys Noir reviendrait à la raison tôt ou tard; mais après tant de temps, elle ne pouvait qu’admettre la vérité: cette femme était un serpent.
C’est pourquoi il fallait réagir, et immédiatement. Olrun n’avait été que trop passif jusqu'à présent, et perdre un tel allié serait une blessure considérable pour le clan, encore plus qu’une victoire pour Alicia. Et puis –elle eut un pincement au cœur à cette pensée- la place de Prêtresse d’Elena ne pouvait pas rester éternellement incomblée. En la proposant à Adrien, tous espéraient (il le fallait !) que le Vicomte accepte avec joie et oublie la crapuleuse tentative du Lys Noir.

L’expression de son beau visage aux traits fins ravagée par le doute et les longues réflexions psychologiques, Europe déboucha finalement dans la Clairière; un flot de lumière safran rayonnait sur l’endroit, comme si Dieu lui-même avait dardé ses feux sur ce lieu symbolique, laissant volontairement dans l’ombre les cœurs lacérés par les hésitations.
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Adrien D'Hasbauer
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Adrien D'Hasbauer


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MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeMer 15 Oct 2008 - 22:06

La journée avait commencée comme les autres. Tout d’abord une nuit beaucoup trop courte pour l’appeler ainsi, un sommeil agité, même au creux des bras de sa femme, un réveil pénible et plombé par l’idée de devoir quitter de trop bonne heure les appartements sans pouvoir dire un mot à ses enfants encore endormis… C’était devenu une habitude pour le Vicomte, l’un des rares nobles de ce Château à se lever à une heure si tardive, mais il n’avait pas le choix, et il devait travailler lui, sinon il était clair que l’agitation régnerait au sein de ces murs, et simplement parce qu’il n’y avait personne d’autre que lui pour organiser la « machinerie » qu’était Forbach… Il se demandait même si son Cousin, le Comte, parviendrait à faire tourner les approvisionnements et les stocks sans qu’Adrien ne lui explique comme les gérer. Quand au sommeil agité, Adrien était pris depuis quelques temps de cauchemars presque chroniques, et même lorsqu’il dormait dans les bras de sa bien-aimée, il ne parvenait pas à avoir un sommeil tranquille. Dans ses rêves, rien de particulièrement plausible, ni vrai, le Vicomte rêvait seulement de choses absurdes, mais au combien douloureuses, comme l’enlèvement de ses enfants, la mort de sa femme, toutes ces choses qui n’avaient pas de réalité concrète, ni dans le présent, ni dans un futur proche, mais qui ne manquaient pas de vous empêcher de dormir tranquillement.

Un peu plus tard dans la matinée, alors qu’il travaillait sur un dossier de gestion, on vint lui apporter une lettre. Il la fit déposer dans un coin de son bureau sans pouvoir y jeter un coup d’œil immédiatement, les comptes étaient frais dans sa tête et il ne voulait pas perdre le fil de ses calculs. Si on n’avait pas précisé qu’il s’agissait de quelque chose d’urgent, c’est que cela ne devait pas l’être, alors cette lettre attendrait bien sagement qu’Adrien ne termine ce qu’il était entrain de faire. Malheureusement, la lettre dut attendre le début de l’après-midi pour être lue, en effet, les comptes n’avaient pas été correct et le Vicomte avait été obligé de tout recommencer une nouvelle fois, allant même jusqu’à sauter le repas de midi pour ne pas s’arrêter avant la fin. Son ami et « adjoint » lui avait apporté de quoi casser la croûte et il l’en avait remercié, mais Adrien n’avait pas vraiment faim. Il grignota tout de même quelque chose, pour ne pas faire de polémique et il songea enfin à poser ses yeux sur cette lettre.

Il l’ouvrit doucement et posa son regard sur l’écriture élégante et fine qui composait ce message, sans prendre la peine de le lire d’abord, il regarda le nom du, ou plutôt, de la signataire de ce parchemin. Il s’agissait d’Europe… Et apparemment, elle désirait le voir le soir même dans la Clairière. Adrien se demanda un instant de quoi la jeune femme voulait parler, cette rencontre semblait solennelle et il ne voyait pas ce qui aurait pu motiver un tel rendez-vous. Enfin à bien y réfléchir, il voyait deux raisons… L’une se basait sur l’hypothèse que les Prêtresses et la Grande Prêtresse d’Olrun avaient posé la question de savoir qui remplacerait Elena, et peut-être qu’Europe sollicitait son avis, bien que ce soit hautement étonnant. La seconde, se basait sur le fait que sa femme ait décidé de parler à Europe de l’entrevue qu’il avait eu avec Alicia… Le Vicomte faisait confiance à sa femme, et il savait qu’elle avait parfaitement conscience de la notion de privé, mais peut-être qu’elle-même avait des doutes sur le fait qu’Adrien reste ou non dans le Clan d’Olrun… Cette deuxième idée lui fit un peu de peine, car il avait pensé que sa femme fut certaine que l’amour qu’il lui portait faisait indéniablement pencher la balance d’un côté et pas vers celui d’Alicia…

C’est d’ailleurs à cela qu’il pensait alors qu’il traversait lui aussi la forêt en direction de la Clairière. Il n’en voulait pas à sa femme, loin de là, il comprenait la crainte qu’elle avait eut, et n’avait pas pensée mal agir, mais le Vicomte aurait préféré que cette rencontre avec Alicia reste entre sa femme, Alicia et lui. Après tout, il n’y avait pas besoin de semer le doute dans l’esprit du clan. Si Adrien avait parlé avec Alicia, c’était avant tout pour discuter, rien de plus rien de moins. Une échange d’idées, de propos, presque des banalités, mais c’était une façon de renouer un dialogue qui n’avait pas été tenté depuis bien trop longtemps. Il était néanmoins évident qu’il ne plierait pas l’échine si la Prêtresse tentait de lui faire des remontrances. Après tout, si aucunes des sœurs d’Olrun n’appréciait Alicia, pour une raison ou pour une autre, n’existait-il pas chez elles, caché derrière un égo ou bien derrière l’omission le même caractère qu’elles lui reprochaient ? Adrien ne comprenait pas qu’on ne puisse que voir le mal au fond des gens simplement parce que l’on avait décidé de ne pas les apprécier… C’est d’ailleurs à ce sujet qu’il songea à l’idée d’avoir une discussion avec sa femme à propos d’Alicia, après tout, il savait parfaitement qu’elle ne l’appréciait pas trop, pourtant cette aversion n’était peut-être pas aussi bien fondée qu’il n’y paraissait.

A force de penser et d’avancer de manière plus automatique que réfléchie, Adrien parvint enfin à la Clairière. Europe y était déjà et l’attendait. Difficile de dire depuis combien de temps mais le Vicomte n’était pas arrivé en retard, c’était certain. Posant son regard sur une jeune femme qui avait changé du tout au tout depuis plusieurs jours, il afficha un sourire serein et franc. Il appréciait Europe, pas seulement en tant que Sorcière d’Olrun, mais aussi et simplement – et surtout - en tant que femme. Une dimension que trop peu de personnes parvenaient à faire passer avant la catégorie politique ou magico-sociale. Arrivé à quelques mètres de la Prêtresse, il s’inclina légèrement comme le voulait les convenances et, d’une voix calme et posée, comme à son habitude, prit la parole :


« - Bonsoir Europe. »
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Adieu à l'été, adieu à la lumière Vide
MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeSam 18 Oct 2008 - 0:57

La Clairière était encore déserte à son arrivée, et Europe prit quelques secondes pour s’arrêter en son centre, fermer les yeux et laisser la sérénité forestière l’envahir par tous ses sens. Elle huma l’odeur discrète des feuilles sèches et celle, bien plus marquée, de l’humidité automnale dans la terre et les racines; elle écouta le bruissement du vent très léger, et goûta la caresse de l’air sur son visage. Elle adorait cette saison. Plus que jamais, elle sentait autour d’elle la présence de ces esprits de la nature que vénérait Olrun, et paradoxalement elle les sentaient plus que jamais lointains, retirés et muets, à l’heure où elle avait le plus besoin de leurs conseils. Derrière ses paupières closes dansèrent des lueurs de doute et d’angoisse et elle fut forcée de rouvrir les yeux; mais la Clairière était toujours la même, empreinte de cette tranquillité parfaite qu’on seuls les végétaux et les animaux; ses cauchemars et ses interrogations n’existaient que dans son propre cœur, dans ses propres ténèbres. Si elle avait cru sa résolution plus forte que sa peur, elle mesurait à présent à quel point elle se trompait; mais le pire, c’était qu’elle n’en était que plus encouragée à poursuivre dans la voie qu’elle avait choisie, et tourner le dos à celle qu’elle avait renié.

A ce moment précis, Adrien fit irruption dans la Clairière.
Lui non plus n’avait pas changé; il était toujours élégant, calme et serein, et toujours poli quand il salua la Prêtresse après s’être incliné légèrement. Il suffit d’une fraction de seconde à la Sorcière pour se rendre compte que la vision d’Adrien lui faisait mal; car non content d’être le centre des quatre clivages de son âme, celui-ci lui rappelait cruellement une réalité qui avait des airs de doux foyers, qu’elle faisait de son mieux pour fuir alors qu’elle n’avait qu’une envie, de s’y jeter et d’y rester pour toujours. Une autre fraction de seconde lui fut nécessaire pour reprendre la pleine possession de ses moyens et elle s’inclina à son tour, parlant pour la première fois:


"Bonsoir, Adrien."

Tu vois, Adrien, je t'en ai souvent parlé, mais je te trouve bien plus mature que les autres, en bien ou en mal. C'est la stricte vérité.

"Je m’excuse pour t’avoir donné rendez-vous de façon si soudaine et impromptue, c’était très impoli de ma part."

Tu vois, Adrien, je t'en ai souvent parlé, mais tu tiens le genre de propos que j'aurais toujours souhaité entendre de la part de quelqu'un d'aimant…ou à peu près la même chose. Ce genre de paroles appaise toujours le coeur.


"Mais il fallait que je te parle, c’est important."

Pourquoi restait-elle polie, en fin de compte? Elle aurait très bien pu fondre en larmes et se mettre à hurler sa frustration au Vicomte, lui dire qu’il les avaient trahies, elle, Abigael, Eleonor, Elena, même Elizabeth, et toutes les autres; lui dire à quel point elle l’avait toujours admiré pour ce qu’il représentait, et à quel point elle avait été déçu en apprenant cela; à quel point aussi elle avait peur maintenant, et à quel point elle avait honte d’avouer tout ça et d’avoir pris, elle aussi, la résolution de trahir Olrun sans hésiter si cela s’avérait nécessaire.
Mais elle ne le dit pas. Au nom de quoi, elle n’en savait rien. Peut-être au nom de cette amitié fraternelle qu’elle avait toujours entretenue avec Adrien. Europe inclina la tête et lui proposa d’un geste de la main de s’asseoir sur un souche bien propre, la même qu’elle avait occupé avec Eleonor pour écrire la lettre de réconciliation.


"Que Nous te parlions, d’ailleurs. Abigael va nous rejoindre sous peu, je lui ai également donné rendez vous ici."

Même son timbre de voix avait changé; il était devenu plus profond et beaucoup plus sérieux qu’il ne l’avait été, abandonnant sa parure d’ironie et de désinvolture. La dernière fois qu’elle avait vu Adrien se tenir devant elle dans une telle attitude symbolique, Europe se trouvait en face de la tombe d’Elena, par une douce nuit de printemps, et à ce moment là il brillait d’un éclat virginal et argenté; à présent, la pureté de l’or se lisait sur son visage, et l’ambre dans ses cheveux. Comment faisait-il, dans de telles situations, pour ne pas se départir de son calme, la Sorcière se l’était toujours demandé. Mais peut-être n’avons nous pas tous le courage de lutter… Une vague et floue part d’elle pensait qu’il n’était pas fautif. Seulement, elle ne faisait qu’observer. Il était toujours plus posé que n’importe qui, plus compréhensif que n’importe qui, plus sincère que n’importe qui… et avec un peu d’attention il pourrait sans peine entendre la voix de la Prêtresse résonner dans l’espace désespérément vide… quelqu’un… quelqu’un, quelqu’un… quelqu’un, aidez-moi…
Dans cette soirée d’automne sans fin, le monde dans lequel ils étaient, continuait de tourner. Malgré le fait que le paysage tapissé de feuilles aux couleurs chaudes, pour Europe, n’était pas le premier qu’elle vit, elle avait la sensation de le redécouvrir à chaque instant. Les soirées d’automnes sont en avance, et lorsque l’on laisse s’écouler un peu de temps, c’est déjà la nuit. La vision d’Adrien, dressé dans ce tableau fantastique, le faisait pratiquement ressembler à un des esprits de la nature. Lui, porté par les tourbillons de feuilles,
Et l’éclat de ses prunelles fines, chaudes,
Le son des ondées et des nuages carminés loins dans le ciel,
Leurs vies, et leurs sentiments, tout ce qu'ils avaient accompli…
Tout cela restera gravé à jamais dans sa mémoire; et même le doute ne saurait le balayer.


Dernière édition par Europe le Lun 2 Nov 2009 - 20:51, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeSam 25 Oct 2008 - 20:02

Voila un petit moment que le Vicomte n’avait pas mis les pieds dans la clairière, ou dans une quelconque zone boisée s’il réfléchissait bien. Son travail au château ne faisait que l’éloigner des gens qu’il aimait et de ses passe-temps favoris comme se balader en forêt ou à cheval. Mais encore une fois, il lui était impossible de renoncer à remplir ses fonctions, que ce soit d’abord par sa simple manière d’être, ou encore sa position sociale, voir même, si on y réfléchissait bien, le fait qu’il jouait un contrepoids parfait dans la balance du pouvoir entre Olrun et Le Lys Noir. Pourtant, il était peut-être temps de rendre le tablier, de partir loin d’ici, de retourner là où il était né, de vivre tranquillement avec sa femme loin des intrigues de Forbach… Cette idée le fit sourire intérieurement, il se voyait décidemment très mal habitant un endroit éloigné de tout, et surtout, il ne se voyait pas abandonner Europe et les autres, bien qu’il était fort probable qu’elles puissent comprendre ce désir soudain et impulsif.

Mais la question n’était pas là, et il n’était pas dans cette clairière pour profiter de la nature, bien qu’il le faisait quand même un peu, en arrière-plan. Et alors qu’il se tenait debout devant Europe, il lui adressa un léger sourire alors qu’elle le saluait à son tour. Quand elle s’excusa de l’avoir mobilisé de manière « soudaine et impromptue », il n’ajouta rien, puisqu’elle ne lui laissa pas le temps de répondre. Si elle devait lui parler, ou plutôt si Abigaël et elle devaient lui parler, alors cette convocation était amplement justifiée, enfin, sur la forme, il restait encore à savoir sur quel fond reposerait cette discussion. Puisque si Adrien avait vu juste, il était évident que cette rencontre risquait de tourner court, après tout, il savait que si l’on apprenait qu’il avait rencontré Alicia, cela pouvait faire jaser et il n’avait aucun doute sur ce que lui dirait Europe, ou même Abigael.


« - Tu n’as pas a t’excuser, je suis certain que tu as de très bonnes raisons pour m’avoir fait demander. Je suppose donc que nous attendrons Abigael avant de commencer à discuter de pourquoi je suis ici… »

Sa voix avait retentie comme une légère bise tiède caresse la peau d’une personne qui se ballade en forêt, d’une sincérité absolue et d’un détachement presque incompréhensible… Le Vicomte donnait vraiment l’impression d’un calme presque inaltérable, impassible, il se contentait de rassurer, de répondre sans détour ce qu’il pensait, et Europe n’avait aucunement besoin de se justifier. Après tout, elle restait sa « supérieure » dans le Clan et même si cela tenait plus de l’ordre de la théorie que de la pratique, il n’avait aucune raison de ne pas s’y soumettre.

Il refusa poliment l’invitation à s’asseoir, il n’en éprouvait pas encore le besoin. Peut-être plus tard, lorsque la Grande Prêtresse serait là. En cet instant, rester debout lui convenait parfaitement, il était suffisamment assis à son Bureau en journée pour ne pas en éprouver le besoin. Un long silence s’ensuivit alors, Europe semblait perdues dans ses pensées, et peut-être qu’elle ne désirait pas vraiment parler avant qu’Abigael ne soit là. Il décida alors de prendre les devants, après tout, quitte à attendre, autant discuter… Ca faisait passer le temps un peu plus vite.


« - Cela fait longtemps que je ne t’ai pas croisée, tout va bien depuis cette soirée ? Je t’avoue que je me faisais beaucoup de soucis pour toi, et comme tu n’es pas venue me voir, j’ai songé à l’idée que tu étais parvenue à surmonter tes démons, est-ce le cas ? »

Sa voix était d’un ton qui en disait long sur la relation qu’il avait avec la jeune femme et l’attachement qu’il avait pour elle. Oui, il l’appréciait, un peu comme un grand frère apprécie sa sœur et essaye de veiller sur elle. ..

[HRP : Désolé post merdique... ]
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Adieu à l'été, adieu à la lumière Vide
MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeMer 29 Oct 2008 - 16:19

Une petite silhouette se faufilait entre les branches s'allégeant du poids des feuilles qui, en fin de vie, venaient nourrir la terre pour assurer un futur radieux à celles qui prendraient la relève le printemps suivant. Schwarzland s'enflammait des couleurs chaudes de l'automne, se préparant à s'endormir pour toute une saison. Les êtres vivants qui la peuplaient s'affairaient à récolter quelques réserves sous l'œil attentif de quelques prédateurs à l'affût, qui regardaient passer Abigael sans y prêter trop d'attention.

La sorcière, depuis quelques temps, étaient constamment aux aguets. Depuis la Perquisition, en réalité. Les Inquisiteurs se faisaient de plus en plus efficaces, et multipliaient les tentatives à l'encontre des hérétiques. Asa n'y échappa pas. Du château aux plus bas fonds de Forbach, l'Inquisition ne laissa personne à l'écart, pas même la tisserande que tout le monde pensait innocemment folle.
C'était un bleu qui s'était chargé de sa masure. Un nouveau venu à qui l'on avait confié la tisserande simple d'esprit, chez qui il devait être très improbable de trouver quoi que ce soit de compromettant. Ce qui ne fut malheureusement pas le cas. L'homme souleva un rondin de bois qui s'avéra être creux, et qui renfermait le Grimoire d'Olrun. Mauvaise pioche.
Abigael s'était empressée de l'envoûter, et le poussa hors de chez elle en lui laissant pour seul souvenir de sa visite, la générosité de l'hôtesse qui lui avait offert sa dernière part de pain.

Ce risque, elle ne le reprendrait pas, et il fut décidé de combler ce trou béant qu'avait causé la mort d'Elena au sein des Prêtresses d'Olrun. Et qui conviendrait mieux qu'Adrien à ce poste ? Outre le fait qu'il ait les capacités requises, cette décision avait été prise pour une toute autre raison : éviter de gonfler les rangs du Lys Noir. Olrun était assez en danger comme ça.

Abigael arriva finalement à la clairière, lieu de rendez-vous où devaient aussi se rendre Europe et Adrien. Ceux-ci étaient déjà présents, faisant doucement sourire la jeune femme devant cette ponctualité, et malgré les temps sombres dans lesquels ils se trouvaient. Si seulement elle avait été à la tête du clan durant une période plus paisible...
Sans un bruit, elle s'avança vers eux, droite et élégante. Ici, nobles ou paysans, les rôles n'étaient plus les mêmes.


[Désolée pour le retard et la longueur du post =__=]
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Europe
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Adieu à l'été, adieu à la lumière Vide
MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeVen 31 Oct 2008 - 1:46

Voilà, il était tombé. Le sempiternel « mais ce n’est pas grave, c’est bien normal » d’Adrien. Connaissant le Vicomte, Europe s’était douté que cette expression, devenue si familière et qui suscitait chez elle à la fois tant d’admiration et d’étonnement devant un tel altruisme apparent, n’allait pas tarder à apparaître dans ses paroles, ou du moins quelque chose d’approchant. La Prêtresse hocha la tête sans rien dire, comprenant soudain qu’à la seule idée de parler, elle ressentait de l’angoisse. L’angoisse de ne plus pouvoir s’arrêter et de déballer d’un bloc tout ce qu’elle avait sur le cœur, pour ensuite le regretter amèrement. Mais le fait de rester muette, en de telles circonstances, l’aurait rendue encore plus impolie et suspecte aux yeux d’Adrien, c’est pourquoi elle approuva, d’une voix pas plus élevée qu’un murmure:

"Oui, attendons, s’il te plaît."

D’une main habile mais clairement distraite, Europe rassembla les plis de sa robe et s’assit sur la souche, en faisait vaguement attention à ce que le bas du tissu ne frotte pas trop par terre. Il lui semblait que tout était braqué sur elle: les feuilles craquaient sous ses pas, la sortant de sa démarche anonyme, les rayons de soleil filtrants entre les arbres l’éclairaient, mettant à nu les parcelles de son âme qu’elle aurait aimé garder les plus secrètes… tout simplement parce que la laideur même de leur visage aurait pu effrayer la lumière du ciel…
La Sorcière se mit à fixer résolument le tapis de feuilles mortes bruissantes sous la brise, se murant dans un silence épais, englué de pensées. Ce furent les propos d’Adrien, resté debout, qui la tirèrent de sa méditation tourmentée. Oui, toujours plus secourable que n’importe qui, il venait de lui dire les mots que tout son être désirait entendre. Comment vas-tu. Tu veux qu’on en parle. A ce moment précis, bizarrement, elle eut une sensation de vérité très nette. Tous deux, lui comme elle, n’aspiraient qu’à vivre dans la liberté et la tranquillité. Mais plus encore, elle croyait qu’elle, et probablement lui aussi… ce monde dans lequel ils vivaient, ils l’aimaient.

"Heu…" Il fallait qu’elle réponse à la question. Mais elle ne savait que dire. Hésitante, elle s’engagea sur un chemin d’office très tortueux. "Je… euh… hé bien… tout va bien…" fit-elle avec difficulté, mais son ton contrit et son antiphrase étaient plus gros que le Château lui même.

Elle fut sauvée par l’arrivée d’Abigael qui pénétra dans la Clairière avec un bruit feutré, ses cheveux sombres et ses yeux clairs formant dans son sillage une mouvance à peine esquissée. Le beau visage aux traits fins de la Grande Prêtresse s’éclaira d’un sourire lorsqu’elle les vit. Europe ne put s’empêcher de penser qu’elle aussi semblait à sa place ici, au milieu des grands arbres, là où l’on ne perçoit que le bruissement du silence. Contrairement à elle qui, malgré le fait qu’elle admirait et aimait les beaux paysages forestiers et naturels, était et restait véritablement, une pure citadine.
La Sorcière s’avança vers celle qui était sa supérieure hiérarchique mais avant tout son amie, et ouvrit largement les bras pour la saluer.

"Abigael… Merci d’être venue."

Il était temps, à présent. Temps de tourner définitivement une page et s’apprêter à en lire une autre. Ce qu’on appelait passé n’était plus qu’un cours confus mais le futur, lui, prenait forme dans l’instant. Europe fit lentement volte-face et lança un regard profond, particulièrement neutre, à Adrien, essayant d’imaginer sa réaction à la nouvelle qu’elle allait lui annoncer. En réalité, ce n’était pas bien difficile. Il suffisait qu’il fasse comme d’habitude, et les prévisions de la Sorcière s’avéreraient juste. D’abord, légère surprise. Puis, sourire ravi mais posé. Calme omniprésent. Altruisme rayonnant en halo. Comment, comment avec une telle attitude avait-il pu les trahir, et pourquoi… Peut-être qu’elle se trompait sur toute la ligne, tout simplement. Et peut-être aussi qu’il était temps de le savoir. La jeune femme prit une grande inspiration et parla enfin -se demandant au passage si, par ce geste, elle signait l’avènement du clan ou au contraire, sa destruction.

"Adrien… Tu sais les heures tourmentées que nous vivons actuellement. Tu sais comme nous que le clan d’Olrun ne peut se diriger tout seul, surtout ces temps derniers, et qu’il a grand besoin d’un guide. Tu sais aussi que ce guide, qu’est Abigael, ne peut porter ce fardeau seul. De tous temps, les trois Prêtres et Prêtresses sont là pour la seconder." Cause toujours… arrête de blablater, va droit au but. "Ta sagesse, ton calme et ton influence sont très reconnues, Adrien, ainsi que ton efficacité, ton astuce, et beaucoup d’autres qualités dont le Clan aurait besoin." La bombe finale. "Abigael, Eleonor et moi, souhaiterions que tu rejoignes le rang des Prêtres."
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MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeSam 1 Nov 2008 - 20:34

Le Vicomte savait que quelque chose ne tournait pas rond. Non pas concernant la raison de sa visite ici, dans cette Clairière, mais il connaissait la prêtresse mieux que certaine personne et il y avait quelque chose de bizarre, quelque chose qui n’allait pas. Impossible pour lui de dire ce qui pouvait hanter la jeune femme, mais à cet instant précis, il savait qu’elle avait quelque chose sur le cœur, quelque chose de lourd qu’elle redoutait de partager, mais il ne pouvait en dire quelle était la source. Il regarda la jeune femme arranger les plis de sa robe ainsi que fixer le tapis de feuilles mortes qui s’étendaient sous leurs pieds à tout les deux. L’idée même que sa rencontre avec Alicia ait traversé les murs de la pièce de la Meneuse et de son appartement lui frappa l’esprit encore plus vivement que quelques instants auparavant. Elisabeth avait elle parlé de cette conversation ? La jeune prêtresse était elle troublée par ce que lui avait dit la femme du Vicomte ? Cherchait-elle à comprendre pourquoi il n’avait pas dis « non » ? Savait-elle de quoi la discussion retournait ? Trop d’inconnues se faufilaient dans le raisonnement d’Adrien… Trop d’incertitude gagnait à présent et il n’était plus nécessaire de se perdre dans des réflexions vaines… Il ne saurait que trop tôt ce qui l’amenait ici.

Sa question posée, il attendait que la jeune femme réponde, satisfasse une curiosité inextinguible, une volonté innée de connaître le fin mot de l’histoire. Pourtant rien ne vint… Une attente vaine, un sentiment profond et assez déroutant… L’idée qu’elle ne daigne pas partager ses craintes, rendue muette par une peur quelconque, lui traversa l’esprit. Songeait-elle ne pas pouvoir avoir confiance en lui ? Pensait-elle qu’il les avait trahis ? Elle ne semblait plus prête à se confier, comme elle l’avait fait cette nuit-là… Il y avait quelque chose dans l’air qui ne plaisait pas à Adrien… L’idée qu’il doive à nouveau se justifier ne lui faisait pas plaisir. Mais il ne pourrait pas savoir de quoi il retournait avant qu’Abigael ne revienne. Et malgré les paroles de la Prêtresse, il n’était pas convaincu qu’elle allait bien comme elle le prétendait.

Heureusement ou malheureusement, difficile de dire à présent, des bruits légers de pas se firent entendre derrière lui. Se retournant, il aperçut la Grande Prêtresse du Clan Olrun, cette jeune femme admirable, le guide de tout un rassemblement d’hommes et de femmes. Adrien avait un profond respect pour la jeune couturière, non seulement parce qu’elle était sa « supérieure », mais comme tout un chacun, il la portait dans son cœur, au plus profond de son être. Il se tourna vers elle, un sourire non feint sur son visage, alors qu’il regardait la prêtresse se diriger vers elle. Le rideau allait enfin tomber, la vérité allait bientôt enlever son masque et Adrien saurait de quoi il retournerait.

Cela ne tarda d’ailleurs pas, et alors qu’Europe venait à peine de saluer son amie, elle se retourna lentement vers lui. Son regard était différent, il n’y avait plus la jeune femme devant lui mais seulement la Prêtresse. Il était maintenant venu l’heure d’être sérieux, et face aux deux femmes, Adrien attendait de connaître la raison de sa convocation. Une raison qui vint bien vite, et après avoir écouté des réalités qui n’étaient que trop vraies, et dont il avait pleinement conscience, la dernière phrase de la Prêtresse sonna d’une manière bien singulière à son oreille. A cet instant précis, la surprise régnait sur son visage d’une manière douce et singulière. Puis finalement, il vint à réaliser ce qu’Europe venait de dire. La proposition était somme toute logique si on y réfléchissait mais Adrien ne s’attendait pas à telle demande. Son sourire revenant sur son visage, il regarda les deux jeunes femmes puis répondit, tranquillement :


« - Nous sommes tous conscients des jours sombres que nous traversons actuellement. Votre demande m’honore plus que tout mais au fond de moi j’ai besoin de savoir la vérité. Europe, Abigael… Y’a-t-il une autre raison qui motive votre décision ? »
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MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeMer 5 Nov 2008 - 20:09

Les quelques secondes qui suivirent la grande révélation, le temps dans la Clairière sembla se faire lourd, distordu, et le silence plus pesant que jamais, empreint de sentiments cachés et de désirs inavoués. Les prunelles violines d’Europe étaient résolument fixées dans celles d’Adrien. La réaction de celui-ci fut exactement conforme à ce que la Prêtresse avait imaginé. Elle l’avait même imaginé avec une telle exactitude qu’il lui sembla revoir deux fois la même scène quand le visage de Vicomte s’éclaira d’une surprise douce, contenue et ravie, qui laissa peu à peu la place à cet éternel sourire qui vous donnait du baume au cœur. Sans même s’en rendre compte, la Sorcière avait revêtu un air extrêmement buté. Elle jeta un regard en coin à Abigael, et s’imagina un moment que celle-ci lui annonçait sa démission au profit d’elle-même, Europe. Comment réagirait-elle, si on lui apprenait soudainement qu’elle était promue à la tête du Clan? Europe déglutit avec difficulté. Avant, elle aurait bien sûr accepté avec dignité. Mais maintenant, cela ne faisait aucun doute, elle aurait prit ses jambes à son cou et aurait quitté l’endroit le plus vite possible.

Mais visiblement, et tant mieux, ce n’était pas du tout le cas d’Adrien qui semblait ravi qu’on lui annonce cette nouvelle. Cependant Europe avait pensé, avec véracité, qu’il n’allait pas simplement accepter sans rien dire et les remercier de tout cœur sans demander la raison de cette décision. Il était beaucoup trop intelligent pour ne pas voir l’aspect inhabituel des choses; surtout que depuis tout à l’heure, avec son regard fuyant et ses paroles hésitantes, elle devait lui paraître singulièrement suspecte. La fameuse question ne tarda d’ailleurs pas à être posée par le Vicomte. Tout se passait finalement exactement comme elle s’y attendait. Adrien était-il trop prévisible, ou ses épreuves avaient-elles donné un peu plus de clairvoyance à Europe? Elle ne saurait vraiment le dire. La Prêtresse jeta un nouveau regard à Abigael, cette fois-ci plus long et plus profond. Son amie aussi s’y attendait, évidemment. Etrangement, Europe avait toujours considérée comme sienne la mission d’apporter à Adrien une réponse à cette question. C’était injustifié et stupide, mais elle ne voyait pas quelqu’un d’autre qu’elle-même le faire. Il lui semblait, vaguement, que cela lui apporterait quelque chose qui la ferait avancer –mais de la nature de ce quelque chose, elle ignorait absolument tout. Cela pouvait être néfaste comme bénéfique.

Elle se demanda, l’espace d’un instant, quelle serait sa réaction si elle lançait à Adrien un regard outré, du genre «comment peux-tu douter de notre sincérité». Mais ce n’était même pas un projet. Elle n’en avait jamais eu l’intention. Pour de nombreuses raisons, mais surtout parce que son âme était bien trop éclaboussée de salissures pour faire un tel reproche à quelqu’un d’aussi précieux. En fait, elle ne cherchait aucune justification, de la part de personne. Juste la vérité.


"Nous avons…"

Encore cette fichue gorge serrée qui l’empêchait de parler. Comme c’était arrivé avec Avatar, ce fameux soir de la Perquisition, elle s’apercevait que, même si son esprit avait pour décision de tout avouer, son corps et ses réflexes y opposait une farouche résistance. Disciplinant sa respiration, Europe recommença sa phrase. Elle n’avait pas prononcé deux mots qu’elle sentit la tristesse et la lassitude l’envahir, rendant ses yeux plus humides que jamais.

"Nous avons besoin de toi, Adrien. Plus que jamais. Olrun a besoin de toi. Si tu pars… Tout pourrait être perdu, tout ce que nous avons construit et entreprit, et alors… je ne peux même pas m’imaginer ce qui arrivera…"

Ce n’était pas vraiment une réponse en soi, elle en était consciente. Mais le «si tu pars» ne faisait là-dedans aucune doute. Europe éprouva en cet instant un sentiment très impromptu et stupide, presque une promesse. Si elle avait pu avoir la face de serpent d’Alicia de Sarrebourg en face d’elle en cet instant, elle y aurait immédiatement collé son poing, de toute ses forces et avec toute la hargne et le désespoir dont elle était capable.
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MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeVen 14 Nov 2008 - 19:10

Un petit zéphyr soufflait à travers les feuilles, les entrainant à sa suite alors qu’elles glissaient doucement des hauteurs pour rejoindre leurs sœurs déjà endormies sur le sol plus froid qui gisait au pied des arbres. Charriant les feuilles qui voletaient au travers de la clairière, il animait également les cascades claires et blondes du Vicomte, leur donnant ainsi un mouvement lent et saccadé, mais pourtant si fluide. Un grand silence s’était installé depuis quelques instants, d’abord brisé par Adrien lui-même répondant à la demande faite expressément par Europe et Abigael, mais qui reprenait peu à peu ses droits alors qu’Adrien attendait une réponse d’une des deux jeunes femmes qui se tenaient debout devant lui. Le vent soufflait à ses oreilles une mélodie calme et douce, une sorte de berceuse alimentant des pensées sereines et heureuses.

Pourtant, malgré les apparences, le Vicomte n’était pas aussi paisible intérieurement. Son cœur animé de passions diverses était en proie à des interrogations dont les réponses étaient indispensables. Adrien connaissait les sous-entendus, il ne voulait que des confirmations sur ses pensées, ses idées, il voulait savoir si cette promotion, cette nomination, était motivée par la récente discussion qu’il avait eue avec Alicia de Sarrebourg. Il ne s’en doutait que trop, mais tant que l’une des deux jeunes femmes ne l’aurait pas dit, il ne pourrait en être certain, et ce, même si cela crevait les yeux. Elisabeth avait du leur en parler, sans entrer les détails car après tout il connaissait sa notion du privé et s’il y avait bien une personne sur laquelle il pouvait bien compter, c’était bien sa femme. Mais suite à cela, la prêtresse et la Grande prêtresse avaient du imaginer le pire, qui, sans même le savoir, était la réalité, et tentaient surement de se prémunir, ou plutôt, de le convaincre de rester.

Si c’était le cas, Adrien ne savait pas trop quoi penser. Manipulation, motivation véritable ? Désiraient-elles vraiment qu’il reste pour ce qu’il était ou pour ce qu’il représentait, c’est-à-dire une position politique forte ? Au fond de lui, il était certain que cela ne pouvait pas être limité à la politique, du moins l’espérait-il, aussi attendait-il une réponse qui mettait du temps à venir. Le vent continuait de le bercer, pour son plus grand plaisir, mais le Vicomte avait l’impression de se retrouver dans un endroit hors du temps, dans une scène figée, un instant d’infini qui déterminerait la suite des évènements dans une proportion gigantesque.

Puis, enfin, tout sembla reprendre vie, le temps reprit son cours alors que la prêtresse s’adressait à lui. Pourtant, elle n’avait pas l’air d’en mener large… Il y avait forcément anguille sous roche, quelque chose de louche. Il l’écouta avec patience et calme, rien ne laissait supposer le doute qui le rongeait à l’intérieur. Elle continua sa phrase, les mots étaient profonds et lourds de significations, tout autant que son regard. Il n’y avait plus à douter des raisons de cette promotion, la rencontre avec Alicia y était pour quelque chose mais ce n’était pas la première motivation, du moins il en était certain et n’essayait plus d’en douter. Alors, doucement, il s’avança, fit quelques pas, et alors qu’il se trouvait à quelques dizaines de centimètres d’Europe, il la prit doucement dans ses bras, comme un grand frère le ferait avec sa petite sœur, une petite sœur qui avait besoin de réconfort, qui avait besoin de certitudes. Et doucement, de sa voix si douce, si calme, il répondit :

« - Je ne sais pas ce que vous avez imaginé, mais si je me bas, c’est pour vous. C’est pour tous vous voir insoumis et heureux, quelque soit le camp, quelque soit le côté… Non Europe, je ne partirais pas, alors ne te fais pas de mal à imaginer, ce n’est pas la peine de te faire plus de mal qu’il n’en faut, les temps sont suffisamment sombres. »

Il s’écarta ensuite, plongeant son regard dans celui de la Prêtresse.

« - Mais il tient à nous de refaire jaillir la lumière. »
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MessageSujet: Re: Adieu à l'été, adieu à la lumière   Adieu à l'été, adieu à la lumière Icon_minitimeDim 16 Nov 2008 - 3:09

Dans la pénombre du soir, Europe se prenait le vent en pleine face; ce même vent qui déliait en longues vrilles ses anglaises étiolées et rendaient ses yeux plus humides que jamais, prêts à fondre en larmes au moindre détail en trop. Elle avait donné sa réponse à Adrien; et, comme auparavant, imaginait déjà la réaction de celui-ci à ce qu’elle lui avait dit. Ses prunelles clairvoyantes la fixerait sûrement, ses lèvres fines s’entrouvriraient sur un flot de paroles toujours calmes, comme d’habitude, déclarant qu’il n’avait jamais voulu rejoindre le Lys Noir… qu’elles s’étaient faites des idées… et ensuite il sourirait, avec cette expression si posée, il deviendrait Prêtre, et le temps reprendrait son vol comme si il ne s’était jamais rien passé, la seule trace restant la graine de doute qu’il avait semé dans les esprits…
Ses joues se teintèrent d’une traînée d’un blanc crayeux en laissant couler une larme. Une unique larme. Mais c’était la toute dernière; ses yeux resteraient secs jusqu’à la fin de ses jours, car c’était la haine qui s’y était installée pour leur faire payer ce qu’ils avaient fait, tous…
A présent ils étaient perdus au milieu d’un océan de feuilles et de murmures, dans la mélodie lancinante du vent d’automne; comme perdus à tous jamais, trois êtres indistincts qui lentement étaient dépossédés de leurs chaleurs. Des points de lumière organiques que traversaient les flux et reflux du courant, qui ne s’éteignaient jamais et se mouvaient dans la brise comme s’accrochent entre eux des survivants d’une effroyable tempête.
Adrien avança d’un pas. Europe serra les mâchoires. Ses prévisions s’avéreraient justes, elle le savait. Mais elle n’avait tout simplement pas prévu le geste du Vicomte en cet instant. Et elle était encore sous l’effet de la surprise, les yeux légèrement écarquillés, quand elle sentit l’étreinte de celui qui l’avait toujours soutenue se resserrer sur son corps frêle en un geste apaisant.

"Adrien…"

L’automne emportait ses sentiments, les bons comme les mauvais; mais elle avait alors la sensation que son âme était plus vide que tout. Leur histoire était déjà écrite dans les feuilles aux doux murmures, dans les chants lointains des pies qui résonnaient encore, dans la fraîcheur vespérale de la Clairière. La brise recouvrait tous les autres sons, mais seule la voix d’Adrien laissant échapper des mots réconfortants, parvenait à ses oreilles dressées. Non, il ne les trahirait pas… Non, il se battrait toujours à leurs côtés… La Prêtresse sentit un immense soulagement l’envahir, comme une vague bienfaisante, chassant ses derniers doutes. Au fond d’elle-même, la voix du scepticisme résonnait encore, demandant pourquoi diable n’avait-il pas, alors, refusé immédiatement; mais Europe n’y prêtait pas attention. Si elle avait cherché une réponse, le Vicomte lui en avait apporté une, et cela lui suffisait. Quelle qu’elle soit. Après tout, elle n’aurait su entendre le mensonge dans des paroles toujours si sincères et si calmes. Toujours si calme… c’était à la fois extrêmement apaisant et déstabilisant… où trouvait-il la force pour conserver une telle sérénité? Sûrement dans l’amour qu’il portait à ses enfants et à Elisabeth… et toutes ces fois où il souriait, il pensait sans doute à sa famille; car depuis qu’il les avaient connu ce sourire si doux étaient pour eux, leur était entièrement destiné, vers eux allaient ses pensées et pour eux battait son cœur.

Europe ne pleura pas, et ses yeux restèrent secs; mais elle serra si fort le manteau d’Adrien dans le dos de celui-ci que la jointure de ses doigts déjà pâles blanchit encore plus. Quand il se recula finalement, leur rappelant à toutes deux la mission dont ils étaient investis, elle le regarda de sa taille inférieure, les yeux ourlés de chagrins, mais aussi de détermination farouche et de haine.
La haine… Elle ne l’avait encore jamais éprouvée, du moins pas dans son souvenir, c’est-à-dire pas dans les quinze dernières années; il lui semblait soudain redécouvrir une part d’elle-même et de sa vie, si profondément enfouie qu’elle l’avait oubliée. Oui, elle leur ferait tous payer, jusqu’au dernier. Elle ne perdrait pas de vue son objectif ultime, bien sûr. Mais si il le fallait et si elle le pouvait, elle mènerait sa vendetta sanglante dans sa quête de la paix et de la lumière.
Alors enfin, et seulement là, elle serait apaisée.

Elle n’oublierait jamais ce qu’il avait fait pour elle. Il avait été la chercher au fond des abîmes, quand elle dépérissait. Il lui avait suffit de se tenir devant elle, pour éventrer en une seconde sa prison de tristesse, de chair et de sang, et devenir le ciel de son nouvel univers. Il lui avait fait entrevoir l’espoir d’une fin heureuse. A présent elle savait avec exactitude que cette sorte de fin n’arriverait jamais; mais elle le remerciait, de tout cœur, de l’avoir poussée à y croire. La Prêtresse tendit le bras et serra dans les siens les doigts d’Adrien, échangeant avec le Vicomte une poignée de main ferme et déterminée.


"Nous comptons sur toi."

Il lui restait encore beaucoup de choses à faire et à apprendre. Mais une fois qu'elle aurait acquis un peu plus d'expérience, elle pourrait lui dire à nouveau. Pas simplement, couramment, comme elle l'avait toujours fait; mais pleinement et profondément. Si profondément qu'il ne pourrait pas répondre seulement par un sempiternel "c'est bien normal".
Merci pour tout.



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