-Le ciel est d'une très agréable couleur...grise...L'air est d'un délicat...Non, rien de délicat, il est froid...Et je vais mourir d'ennui si ça continu.

D'où venait ce grommellement de mauvais aloi en plein milieu de ces arbres fruitiers ? De là, en bas, au pied de ce pommier. Une silhouette habillée de frustres négligés, d'un chapeau qui avait connu des jours meilleurs et d'une étrange montre qu'une main fine s'amusait a faire tourner autour d'un index. Cette même silhouette de gamin déguingué, avalait en rythme un bout de pain au gout passablement fade à voir le visage renfrogné de son prédateur.

-Non, mais sérieusement...S'pas possible quoi !

Pour un peu, la silhouette aurait juré après la colère divine. On avait pas idée de l'envoyé ici où il n'y avait..rien à faire ! Du moins, c'était ce qu'on essayait de lui faire croire, mais il fallait dire que les éléments semblaient s'être ligué. Personne au siège de l'Inquisition, pas de supérieurs, pas même un rat maigrichon a chasser...Non pas que notre jeune garçon tienne tant que cela a faire la chasse au Sorcière, mais bougre d'âne ! un peu d'action que Diable ! Mais rien n'y faisait...Toujours le vide total. Pourquoi le Père Guido l'avait il envoyer là !? Ah ! C'était pour la faire mourir d'inactivité et être ainsi débarrassé de son trublion incontrôlable ? Ouais, p'tre bien que c'était ça ! De toute façon, au point où cela en était, elle devait avoir été maudite dans toute les langues...une peu plus, un peu moins...

Son quignon de pain avalé, sa main gauche alla s'étaler le sol dans un mouvement désespéré et rencontra une pomme pourrie...

-Par Dieu ! Je suis maudit !

éructa la silhouette avant d'envoyer la dite pomme dans les buissons...

Petite balade champêtre pour oublier un peu l'horreur qui l'étreignait. Devant elle, gambadait une petite silhouette en robe bleue claire, les cheveux blonds dénoués et agités au gré du vent. Elle portait un petit manteau gris clair et s'amusait d'un rien, les joues rosies par le froid et les yeux verts brillants.

Derrière elle, venait une femme encore jeune, portant une capeline noire sur une robe verte toute simple, les cheveux tirés en arrière en un chignon un peu compliqué. Les mêmes yeux verts illuminaient son visage trop sage, alors qu'un sourire recourbait ses lèvres devant le spectacle qu'offrait sa fille.

Les horreurs de la messe semblaient lointaines maintenant... Et pourtant, l'odeur du bûcher planait encore dans l'air, écoeurant, fétide... Les images défilaient encore devant ses yeux. Elle décida de s'arrêter un moment, entraînant sa fille avec elle près des vergers et résolue à lui parler. Il n'y avait pas âme qui vive ici, elles seraient tranquilles. Elle déploya ses jupes et s'assit, invitant l'enfant à faire de même.

- "Maman, qu'est-ce qu'il y a?"

Eleonor, eut un petit sourire à la fois tendre et douloureux. Elle caressa la joue de sa fille, en songeant que les Inquisiteurs n'auraient aucun scrupule à tuer une graine de sorcière.

- "Il faut que je te parle à propos de la messe... Tu sais, il y a des gens qui n'aiment pas les gens qui ont des pouvoirs magiques. Ils pensent que ce sont des méchantes personnes. Ils ne savent pas. Alors ils leur font du mal. Comme aux trois dame.

Alix, écoute-moi attentivement. Tu ne dois jamais parler à personne de ce que je peux faire..."

- "Maman, je sais, tu me l'as déjà dit."

- "Oui, mais c'est très important ma chérie."

Elle entendit alors une voix et se tut brusquement. Erreur, elles n'étaient pas totalement seules. Heureusement, elle avait parlé à voix basse. C'est alors qu'une pomme pourrie roula jusqu'aux pieds d'Alix qui ne retint pas un

- "Pouah!!!"

sonore et dégouté. L'enfant prit la queue de la pomme et la balança loin d'elle, vers l'origine de son envoi. Eleonor souira, espérant que la petite fille ne venait pas d'attaquer quelqu'un d'important.

- "Alix!"

Elle se releva, prit la main de l'enfant et se dirigea de l'autre coté du buisson. Elle vit alors un homme jeune et fin.

- "Je suis désolée, ma fille semble trouver amusant de balancer des pommes pourries."

Un brin d'herbe fut sauvagement arraché et fourré avec hargne entre deux dents blanches malgré le manque d'hygiène de cette époque. Tout en machouillant avec agacement, Orphée se tâtait pour faire une sieste. Certes, il faisait un poil trop froid, mais elle en avait l'habitude. L'ennui lui pesait tellement qu'elle était a peu près sûre de ne pas se réveiller...Bah, ces "compagnons" au service de l'église penserait certainement au Malin si on retrouvait son corps un jour, si tant est qu'on la cherche et ça...

A peine eut elle fermé les yeux qu'un léger sifflement suivit d'un "splash" du plus bel effet la fit sursauter...

-Damnation !!!

rugit elle en se levant comme un diable, son pauvre gilet s'ornait maintenant d'une superbe purée de pomme pourrie...Ma-gni-fi-que !

-Par la Sainte Croix !!!! Par Jean déshabillé pour Paul !

maugréa-t-elle en essayant désespérément de rattraper les dégâts, une voix étrangère la coupa net dans ses jurons et, elle leva ses étranges yeux verts. Oh ! La jolie dame ! Et le diablotin de mouflet ! D'un coup d'oeil, elle engloba la femme et la fillette, tandis que sa main ralentissait ses mouvements sur son gilet...

-C'est pas grave...Mon gilet a connu des jours meilleurs t'façons...

répondit elle en insistant bien sur son accent paysan et forçant un peu sa voix pour la faire paraitre plus grave.

-Faut bien que les gamins s'amusent et j'crois bien que c'est moi qu'ait commencé alors v'la !

ajouta-t-elle pour faire bonne mesure, toujours son brin d'herbe au coin des lèvres. Curieuse, elle disséqua la tenue de la jeune femme, mazette ! Elle n'avait pas a faire avec une paysanne du coin, pour sur ! Fichtre ! Fallait jouer serré, elle était bien placé pour savoir que les bambins étaient bien plus perspicaces que les adultes.

Eleonor frémit en entendant quelqu'un jurer là où la pomme devait avoir atterrit. Oh pourvu qu'Alix ne l'ai pas lancée en plein sur cette personne! Ce serait quand même pas de chance...

La jeune noble se préicpita poour voir l'étendue des dégats et resta un moment interdite en entendant les jurons du jeune homme devant eux. pas la Sainte Croix? Par Jean déshabillé pour Paul? mais c'était quoi ces jurons-là? Eleonor regarda le jeune homme comme s'il était légèrement dérangé.

Il répliqua aux excuses d'Eleonor que ce n'était rien, que le gilet n'était pas en très bon état de toutes manières. Eleonor eut un petit sourire qu'elle dissimula derrière sa main en avisant la tâche faite par la pomme pourrie. L'autre reprit en disant que c'était de sa faute de toutes façons. Ce à quoi Alix acquiesça vivement :

- "C'est vrai maman, c'est lui qu'a commencé à me lancer sa vieille pomme pourrie!"

Eleonor oscillait entre l'amusement et le devoir de gronder sa fille.

- "Alix, tais-toi."

Puis, elle regarda le jeune paysan à l'accent si prononçé.

- "Il n'empêche que je suis confuse. J'espère que cette tâche disparaitra facilement, auquel cas, je vous dois réparation."

La petite fille boudait maintenant, alors qu'elle s'était faite gronder par sa mère. Elle marmonna :

- "C'est pas ma faute, c'est lui qui a commencé..."

La jeune femme leva les yeux au ciel, exaspérée par les mauvaises manières de sa fille.

- "Au fait, peut-être que notre présence vous importune? Vous aviez peut-être du travail? Auquel cas, nous allons partit, nous ne voulons pas vous retarder... Mais j'avais besoin de trouver un lieu plus serein après ce qui s'est passé ce matin..."

La Messe où elle avait vu brûler ses soeurs... mêmes ennemies. Oh Seigneur, quelles horreurs.

Orphée tiqua et haussa un sourcil amusé.

-Me...devoir...réparation...

Elle se figea durant quelques secondes, la bouche agitée de tics nerveux, ses yeux commençant a se noyer lentement, mais surement avant de....Et bien d'exploser de rire.

Sa poitrine se soulevait en rythme tandis que sa main venait frapper sa cuisse au diapason de la fente de poire carabinée que lui causait les paroles, somme toute polie, de la bourgeoise. Ah non ! Mais là c'était trop fort !!! Elle était couverte de crasse de la tête au pied, du moins, les milles et uns lavages qu'elle pouvait faire ne ratrapperait jamais l'état lamentable de sa culotte et elle...Elle lui proposait réparation pour une minuscule tache de reinette plus très fraiche ? Ah non, mais là...

FInalement, encore secouée de hoquet, elle leva la main et secoua négativement la tête.

-Non, non, j'vous r'mercie, mais s'ra pas la peine...

Inspire, expire, inspire, expire....Une fois, deux fois...

-Vous ne m'dérangez pas, pour tout dire, j'dormais quant s't'arbre m'a envoyé sa fille en pleine tête...

réussit elle a dire lorsque son fou rire se fut un peu étein, extinction fortement aidée par l'allusion a la messe de Cendres...Orphée n'avait pas été présente au sens propre, non, elle n'avait fait qu'observer la bêtise humaine assise sur une branche d'arbre...Lache ? Peut être...Elle toussota.

-Voui...J'ai ouïe des rumeurs dans l'ville. C'est vrai s'qu'on dit ? C'était des filles du diable ?