The Witch Slay
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 Esprit es-tu là ?

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Alicia Loewenstein
Meneuse
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Alicia Loewenstein


Esprit es-tu là ? Vide
MessageSujet: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeLun 20 Avr 2009 - 1:32

Elle avait si froid. Oh oui, il n’était pas là, et elle avait froid lorsqu’elle ne pouvait se blottir au creux de ses reins. Elle se sentait si seule. Ah… si seulement son beau Comte pouvait rester plus longtemps auprès d’elle, s’il n’avait pas à voyager constamment, s’il pouvait la réchauffer plus souvent dans ce grand lit froid, dans cette grande chambre glacée… -Toc, toc, toc- Les trois à-coups résonnèrent longuement tel un glas lancinant dans l’alcôve figée. Son corps étendu dans des draps blancs frémit brutalement. Il était fort peu convenable de déranger une Comtesse à une pareille heure de la nuit, mais qui cela pouvait-il bien être ? À peine vêtue elle serra tout contre elle son drap encore imprégné de l’odeur du Comte. Son beau Comte, peut-être lui faisait-il la surprise ? Elle se dirigea lentement vers la porte. L’autre ne frappa une quatrième fois, comme s’il comprenait la fragilité de la jeune femme. La Comtesse abaissa la poignée afin de laisser la porte s’entrouvrir sur la chambre baignée du pâle éclat argenté d’une lune voilée de brumes épaisses. L’espace d’abord libéré par la porte ne laissait le regard de la Comtesse qu’observer une obscurité monochrome, c’est en ouvrant d’avantage la porte que la Comtesse put observer une sombre silhouette se détacher progressivement des ténèbres. Elle n’était finalement séparée d’elle que de quelques centimètres. Cette apparition si soudaine et si proche fit sursauter la jeune femme, ce n’était pas le Comte. L’inconnu était encapé de noir et encapuchonné de manière à ombrer totalement son visage. Il prit la parole d’une demi-voix douce et féminine : « Pardonnez Comtesse l’heure tardive mais vous me voyez messagère de votre mari qui vous envoie en gage de pensée amoureuse cette fleure de lys. ». La jeune dame sourit doucement, innocemment, heureuse d’une pareille intention. Elle saisit la fleure du bout de ses fins doigts pâles et délicats. « Merci messagère, tu m’apportes un bien précieux message, accepte cette récompense avant d’aller trouver à ton tour le chemin du sommeil. » La Comtesse remit une bourse de velours à la jeune femme avant de refermer la porte et de se retourner vers sa commode sur laquelle s’élevait fièrement un vase de cristal d’où elle retira une rose déjà flétrie pour y déposer sa fleure de lys noire aux reflets violets à la clarté diluée de la lune. Elle marqua alors une pose, et son sourire retomba, son regard se tinta de questionnement : pourquoi cette fleure et cette couleur si funestes ? La Comtesse fixa ces pétales si parfaits et approcha lentement son nez du pistil pour humer son parfum, comme s’il pouvait donner une raison d’être à cette fleure. Son souffle s’arrêta, en quelques secondes son visage devint entièrement blanc à l’exception de quelques veinures sombres près de sens tempes. Ses lèvres devinrent violacées, ses yeux abandonnèrent leur dernier éclat. Le lys noir frémit soudainement, se froissa et s’étiola progressivement. Derrière la porte l’inconnue sourit avant d’abaisser lentement sa capuche dévoilant…

« NON ! » Alicia se réveilla en sueur dans son lit.

Elle était haletante. Depuis déjà plusieurs mois ces cauchemars prenaient place et celui-ci revenait de plus en plus souvent : elle revivait dans tous les détails la soirée où sa sœur la Comtesse fut assassinée, en étant à la place de sa soeur. Elle revivait son ennui du Comte, si proche du sien, ce sursaut face à l’étrangère, cette mort immédiate. Elle le savait sa sœur se vengeait en insinuant ces horribles rêves dans son esprit, toujours celui-là, toujours plus précisément, et Alicia avait de plus en plus de mal à empêcher l’instant fatidique ou la messagère découvrait son visage car elle savait ce que sa sœur pensait ! Que c’était elle ! Mais c’était faux, et voir son visage sur le corps de la meurtrière de sa sœur, Alicia ne pouvait l’accepter.
Elle se leva encore tremblante, se vêtant d’une fine robe bleu nuit. Elle versa lentement l’eau d’une cruche dans une bassine de cuivre pour s’y tremper les mains afin de se rafraîchir le visage. Mais alors qu’elle s’apprêtait à plonger ses mains dans l’eau glacée il lui sembla apercevoir une forme blanche derrière elle : sa sœur encore enveloppée dans son drap glacial si semblable à son linceul. Elle se retourna subitement. Elle avait disparu. Alicia était fatiguée. Elle s’humidifia le visage avant de relever la tête vers son miroir. Elle était à nouveau derrière elle, plus proche encore, plus nette encore. Alicia se retourna : personne. Elle refixa son miroir, sa sœur était là, à quelques centimètres d’elle, enveloppée d’une aura pâle et triste. La Meneuse afficha un visage empreint de frayeur et de désespoir. Elle soupira avant de lui parler en fixant son reflet.


« Pourquoi… Tu ne peux pas. Tu sais bien, tu dois comprendre, ce n’est pas moi… Le regard de l’esprit de sa sœur ne bougea pas, fixé sur elle sans nulle expression. Alicia observait sa non-réaction avec désespoir en continuant et en haussant d’un ton comme pour la faire réagir. Tu dois arrêter tu comprends, tu es ma sœur, tu n’as pas le droit de faire ça ! Mère m’a préférée c’est vrai. Elle t’a retiré Père qui t’aimait, certes. J’ai failli une fois à mon devoir de préserver mon innocence en aimant le Comte je l’avoue, et je sais t’avoir faite souffrir, je m’excuse, plutôt mille fois qu’une : pardon et encore pardon ! Je m’excuse également de ne pas avoir réussi à protéger le Comte lorsque nous nous sommes mariés. Des larmes commencèrent à couler le long des joues d’Alicia. Sa voix se fit encore plus forte. Mais crois-moi, par pitié, crois-moi ! Je ne suis pas responsable de ta Mort… Je n’aurai jamais souhaité une chose pareille, tu étais ma sœur, mon dernier lien, ce sont elles qui t’ont pris la vie pas moi ! Alors par pitié laisse-moi en paix… Laisse-nous en paix ! »

Ses derniers mots résonnèrent dans la chambre d’Alicia, qui fixait toujours l’impassible pâleur de l’âme de sa sœur si cruelle, suivis d’un silence infiniment pesant. La Veuve de Sarrebourg entendit le plancher craquer derrière sa porte. Elle se redressa. Derrière elle sa sœur avait à nouveau disparu. Elle essuya ses larmes et s’attacha rapidement les cheveux avant de quitter sa chambre en direction des cuisines.
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Esprit es-tu là ? Vide
MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeLun 20 Avr 2009 - 21:46

Le château s'était endormi depuis longtemps déjà. Quelques bruits de pas faisaient parfois leur apparition, sûrement pour veiller à ce que tout soit en place pour le petit matin. Les cloches de l'Eglise avaient longuement résonné dans la nuit calme qui s'était imposée à Forbach. Les cloches étaient un son familier, que Kerwan gardait enfoui dans sa mémoire, dans son conscient. C'était un son qui était devenu rassurant, et qui matérialisait presque un chez lui. Que dire du reste ? De ces apparats qui façonnent les murs ? Que dire de ce lit fort confortable, richement vêtu de drap ? Oui, que dire de cette vie dont il avait rêvé, sinon qu'elle ne lui semblait plus très attirante à présent ? Cette vie n'était pas la sienne, et finalement, le luxe, le confort, ne l'attiraient plus vraiment.
Il avait sûrement dû se faire à sa vie d'aventure. A charmer les femmes pour passer une nuit dans leurs bras, et les abandonner au petit matin. A voler parfois, les bourses qui traînaient, et celles qui traînaient moins, à défier le très haut pour qu’il réagisse. A ne jamais respecté les vœux qu’il avait prononcé lorsqu’il était rentré dans les ordres. Il avait dû se faire aux heures qui défilaient sous ses pieds, aux boutades de ses camarades, ou encore, à la renommée du nom du Père Marcus dans les villages remplis d'ignorants.
Oui, mais Forbach n'en faisait pas parti.

D'après ce que l'exorciste avait pu en voir, Forbach était une ville remplis de crédules, d'idiots et de sous-fifres. Mais il y avait aussi ces gens éduqués qui semblaient se douter du coup de théâtre de leur mission : l'impossibilité de répondre à leur demande. Une mission papale ne se détache pas ainsi de ceux qui en sont investis. Regardez les, ces habitants, se battre avec leurs fantômes. Comment pouvaient-ils tous croire à la présence de sorcières ? Qu'est-ce qui avait fait déraper ainsi les choses pour troubler ce quotidien ? Cette hallucination collective avait échappée à l'Inquisition, celle là même qui avait résolue tous les troubles en répandant la terreur dans tout le royaume. Alors, comment tous ces habitants pouvaient-ils croire qu'eux, leur dernière lueur d'espoir, cette bande d'imposteurs se servant juste du nom de celui qui ne leur avait rien appris, allait régler le problème ? Même le pape semblait naïf à ce sujet. A moins que leur envoi dans cette ville ne soit qu'un acte désespéré. Un acte qui allait leur coûter leur tête à coup sûr. Il fallait se la jouer discret, voire trouver le bon moment pour s’enfuir, lorsque tout aurait dégénéré. Il suffirait ensuite de changer de vie, et cela, il commençait à connaître.
La seule chose qui différenciait cette mission des autres, était qu’elle venait du pape, et que l’endroit, profondément ancré dans ses légendes locales, n’en démordrait pas : le mal hante ce village. Peut-être que la seule manière de régler le problème était un incendie ? Et si les sorcières existaient, peut-être se manifesteraient-elle pour faire tomber la pluie. Allez savoir ce qui les motive…

Les nuits, finalement, étaient toutes les mêmes : noires et emplies de questions. Que ce soit dans un village désespéré, ou bien ailleurs. Le silence de l’endroit n’était pas propice au sommeil de l’homme. Il manquait les bruits et les bizarreries des tavernes auxquelles il s’était habitué. Les chants d’ivrognes, aussi. A la place, on lui offrait des gens mornes qui ne semblaient pas heureux de les voir débarquer ainsi et prendre possession, en toute politesse, des lieux.


Près de la fenêtre, ce qui tira Kerwan de ses pensées fut un petit bruit. Un petit bruit qui semblait proche de lui, et qui, lorsqu'il se produisit à nouveau, semblait venir de son ventre. Oui, il avait faim. Il ne dormait pas dans sa chambre richement vêtue, et il avait faim. Il ne lui fallut pas très longtemps pour se décider à sortir en quête de nourriture, à peine le temps d’enfiler un pantalon. Les traits tirés par la fatigue, l'homme passa sa main dans ses cheveux, frissonna un instant sous la fraîcheur de la soirée, et s'étira longuement dans l’obscurité du couloir qui menait aux escaliers. Il y était presque parvenu, faisant mentalement le plan des lieux pour retrouver les cuisines, rêvant de toute cette nourriture qu'il allait y trouver, qu'une discussion, ou plutôt un monologue agité, perturba la quiétude de l'endroit.
Vérifiant consciencieusement qu'aucun serviteur ne hantait ces lieux, l'exorciste s'approcha de la porte d'où provenait le bruit, épiant le moindre son qui pourrait le faire prendre.


"...ne suis pas responsable de ta Mort… Je n’aurai jamais souhaité une chose pareille, tu étais ma sœur, mon dernier lien, ce sont elles qui t’ont pris la vie pas moi ! Alors par pitié laisse-moi en paix… Laisse-nous en paix !"

Intrigué, l'homme sourit enfin. Oh, que cet endroit promettait de secrets dissimulés ! De gens qui sont désespérés ! Oh, et qu'est-ce qu'il aimait ça ! Finalement, l’endroit avait un semblant d’intérêt. Et c’était sûrement à cela que s’amusaient les gens d’ici : trouver les secrets des autres. C’était peut-être ainsi que la situation était devenue comme elle est.
La voix qu'il avait perçue lui était familière, mais il ne la reconnut pas, et vu le silence qui suivit cette tirade, Kerwan préféra reprendre le chemin des cuisines par le plancher grinçant, avant de se faire surprendre d'espionner aux portes. Après tout, il aurait tout le temps de démêler ce mystère, les exorcistes semblaient être là pour un petit moment.
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Alicia Loewenstein
Meneuse
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Alicia Loewenstein


Esprit es-tu là ? Vide
MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeMer 22 Avr 2009 - 1:15

Alicia sentait encore son souffle froid et douloureux sur son épaule. Elle en frémissait encore dans sa fine robe en descendant les escaliers du château en direction des cuisines. Ce passage brutal du sommeil profond à cette expression violente de son désarroi face à l’esprit figé de sa sœur lui avait déclenché un mal de tête qui se faisait ressentir par lancements ponctuels. Elle ne pourrait pas se rendormir avec cette douleur. Aussi se dirigeait-elle vers les cuisines afin de se faire infuser une tisane au saule. Une vieille recette datant de l’enseignement de base de sa mère. Ce genre d’enseignement privé qu’elle n’aurait jamais offert à sa fille aînée. Alicia soupira, elles avaient tant fait souffrir sa sœur. On dit souvent qu’on ne prend conscience de l’importance qu’ont les gens que lorsqu’ils ne sont plus auprès de nous. On n’imagine pas toujours alors à quel point nous les avons faits souffrir en vérité, c’est leur fantôme qui vient vous hanter pour nous le rappeler.

La nuit était avancée, pas un son ne résonnait dans le château. En vérité il semblait d’avantage mort qu’endormi. Tous étaient si tristes la journée, la nuit en devenait presque soulageante : plus de visages moroses, plus d’esprits pressés et préoccupés, juste le silence et le vide. Forbach en était arrivé au point où Alicia se demandait qui des esprits errants où des vivants hantés étaient les plus effrayants. Elle-même ne se retrouvait plus dans ses attitudes. Habituellement si sûre d’elle, à présent elle regardait souvent derrière elle, elle avait toujours une pointe d’inquiétude en passant devant les miroirs où elle guettait le regard inquisiteur de sa sœur et lorsque son reflet blafard apparaissait dans le miroir Alicia perdait tout sang froid, entre le besoin de se faire pardonner et l’instinct de survie.

Alicia tourna à nouveau dans un couloir, seul se répandait le bruit de ses talons claquant furtivement le plancher. Arrivant aux cuisines elle saisit la poignée froide et ouvrit la porte toujours pensive. Elle entra et s’arrêta quelques secondes devant la porte, elle se sentait fatiguée et son mal de tête la taraudait. Elle bailla, une main devant la bouche, préservant l’étiquette de façon automatique. Puis gonfla sa poitrine pour se redonner un peu de force avant de tirer ses cheveux noirs en arrière pour reformer un chignon parfait. Alicia se tourna vers la cheminée où flambaient encore quelques braises qui lui suffiraient à faire chauffer l’eau pour l’infusion. Mais face à elle, elle aperçut un homme attablé croquant une tranche de pain accompagnée d’une nourriture informe qui semblait être un pâté de volaille. Alicia se crispa un instant, surprise par l’apparition, et dieu sait qu’elle ne s’y habituait décidément pas aux apparitions.


« Bonsoir… Excusez ma réaction, je ne vous avez pas aperçu… en entrant. »

Alors qu’elle pensait intérieurement qu’il aurait pu tout de même s’annoncer avant de l’effrayer, elle lança un regard entre perplexité et dégoût à sa bouche mastiquante. Décidément ces exorcistes n’avaient pas perdu de temps pour prendre aisément leurs marques… Ne mangeaient-ils pas suffisamment tous les jours ? Voilà un vœu bien étrange et peu imaginable pour un moine. Cependant Alicia pouvait comprendre que le dîner ait pu ne pas les satisfaire amplement… La Comtesse saisit une cruche remplie d’eau puis suspendit une petite marmite au dessus des braises avant d’y verser gracieusement le liquide. Et d’y jeter des feuilles soigneusement choisies parmi des grands pots de verre posés sur une étagère. Présentant ses mains devant la braise, dos à l’exorciste, elle soupira.

« Vous m’avez entendue n’est-il pas ..? »

La relation n’était pas difficile à établir entre les bruits de pas devant sa porte alors qu’elle s’exclamait et cet homme dans les cuisines sans qu’autre âme qui vive ne s’aventure dans les couloirs. Alicia avait honte, elle ne le montrait pas biensûr, mais c’était un état de faiblesse douloureux pour elle. Se devant de rester fière et noble elle ne baissa pas la tête et le ton de sa voix n’était en rien gêné.
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Esprit es-tu là ? Vide
MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeVen 24 Avr 2009 - 20:38

Le bruit furtif des talons claquant régulièrement sur le sol n'avaient qu'à demi alerté Kerwan. Après tout, faisait-il quelque chose de mal ? Il n'était pas sûr que le fait de caler un petit creux la nuit était un délit, même pour la Bible. Mais lorsque la porte s'ouvrit et qu'il vit apparaître cette somptueuse femme qu'il avait vu lors du dîner d'arrivée, il arrêta net de mastiquer pendant quelques secondes, allez savoir pourquoi. Et puis, sourire aimable aux lèvres, il prit le temps de terminer sa mastication avant de parler. Oui, même un petit enfant pauvre, vivant de l'amour de son père, puis d'une éducation ecclésiastique connaissait la politesse. Une fois sa bouchée avalée, Kerwan se leva vers cette femme, l'associant pleinement à la voix entendue quelques minutes plus tôt, en lui adressant son plus beau sourire. Il ne fit aucun signe pour venir vers elle, après tout, elle n'avait jamais eu l'air enchantée de croiser des exorcistes. Elle n'était d'ailleurs pas la seule. L'Inquisition aussi donnait l'impression de s'être fait voler son territoire.
Mais si eux ne cachaient pas leur déception de les croiser régulièrement, le groupe d'exorciste faisait de son mieux pour paraître aimable malgré sa position difficile. Jonas, lui, ne se privait pas d'allusion sur leur prétendue supériorité.

"Excusez-moi Ma Dame si je vous ai effrayé. Mais je crois que c'est plutôt à moi d'avoir peur, puisque vous me surprenez en plein pêché de gourmandise. L'insomnie me donne toujours envie de manger un peu, j'espère que je n'ai pas mal fait."

Kerwan dû réprimer un soupir et montrer un peu d'amusement pour ses propos. Il devait jouer cet homme d'Eglise respectueux des autres, aimable, et qui a la discussion facile lorsqu'il le fallait. Oui, Kerwan détestait ce personnage, car il lui semblait bien se trouver comme les autres à cet instant : d'une naïveté impressionnante. Notons le bien : il en avait particulièrement rien à faire de savoir si oui, ou non, il avait été impoli. Il avait eu faim, il était descendu en cuisine, point barre. Si sa présence la gênait, autant qu'elle s'en aille.

Il allait néanmoins lui proposer de partager son grignotage puisque elle avait le teint blême et qu'après tout les discussions sont toujours plus faciles lorsque l'on partage quelque chose. Et c'était ce qu'il voulait : qu'elle lui parle. Oh, il allait la charmer, la séduire, jouer la carte de l'homme d'Eglise jusqu'à ce qu'elle se confie à lui et qu'elle lui confie tout ce qu'elle avait à cacher. Il allait l'attirer à lui pour lui soutirer des informations. Oui, voilà ce qu'il allait faire. Mais la dame avait l'air plutôt intelligente, et vu son faciès, caractérielle. Il faudrait donc se la jouer fine.
Avant qu'il n'ait eu le temps de lui proposer quoi que soit, et même d'ouvrir la bouche, la comtesse s'était dirigée vers la cheminée et jetait des herbes dans une marmite, se plaçant ainsi en parfaite maîtresses des lieux. Par cet acte, elle lui montrait qui était chez qui. Haussant les épaules, il reprit une bouchée de sa tartine, les yeux perdus dans les plis de la robe de la dame. Aussi, ne remarqua-t-il pas qu'elle lui posait une question. Délicate qui plus est.

Il reposa sa tartine sur la table, passa son autre main dans ses cheveux d'un air de fatigue avant de frotter un peu son œil gauche qui, lui, semblait vouloir aller se coucher sans le reste du corps. Que répondre ? Jouer la carte du bluff tout de suite et raconter que l'on sait tout de l'affaire ? Le problème était qu'il n'en savait pas assez pour bluffer finement. Autant garder les propos de la comtesse en tête, et lui trouver une excuse tout de suite.

"Le ton de votre voix m'indique que vous le prenez plutôt mal. N'y voyez rien de pervers, Ma Dame, je suis simplement passé devant votre chambre en voulant venir ici. Il est vrai que je me suis arrêté, que j'ai entendu vos propos. Votre voix semblait... animée. Mais puisque je n'entendais plus rien, j'ai songé que vous faisiez un mauvais rêve et suis descendu. Vous aurais-je réveillé par un quelconque bruit ?"
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Alicia Loewenstein
Meneuse
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Alicia Loewenstein


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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeDim 26 Avr 2009 - 0:47

Les mots de l’exorciste suite à la surprise qu’elle avait eue à son entrée compensaient presque sa soudaine crispation. Ils n’étaient pas aussi "ours" qu’ils le paraissaient. Bien que ceci ait été plus ou moins vérifié auparavant avec les mots soignés de Jonas, leur chef de groupe. La plupart d’entre eux étaient restés timides, allant jusqu’à ne pas se présenter ou bien saluer leurs hôtes. Une discrétion polie de leur part peut-être ? Alicia en doutait. Tous semblaient parler le français, du moins ceux qu’elle avait entendu échanger quelques mots. Ils étaient à la fois très différents et en même temps ; on sentait fortement cette solidarité qui les liait. Le moine avait dû remarquer le regard peu gratifiant qu’avait posé la Comtesse sur sa nourriture car il s’en excusa le rapprochant à un péché. L’un de ces concepts frustrants et privatifs qui faisait sombrer les catholiques dans les pires excès, quand comprendraient-ils que c’est souvent la peur d’un mal qui conduisait dans un pire…

« Rassurez-vous, peu de nobles de ce château pourraient avoir l’audace de juger vos péchés, nous avons bien trop à faire avec les nôtres… En particulier le plus punissable de tous : l’Orgueil. »

Alicia revoyait défiler devant elle les visages de tous ces nobles prétentieux et hautains, beaucoup de personnes qu’elle appréciait, beaucoup qu’elle haïssait… Elle-même se savait orgueilleuse en une certaine manière. Mais c’est en partie la voie qu’elle avait choisie qui l’y avait menée. Elle ne se souciait pas du tout de la punition divine qui pouvait l’attendre selon les chrétiens qui voyait en le péché d’Orgueil une confusion entre son propre être et l’absolutisme du Dieu unique. Mais on préférait brûler les hérétiques… L’absurdité de la pensée chrétienne n’avait-elle aucune limite ? Alicia ne répondit donc pas à la question de l’exorciste à savoir s’il avait mal fait. Elle ne jugeait pas, elle constatait, aussi n’aurai-elle pas pu lui répondre.

Elle l’entendit à nouveau mastiquer alors qu’elle remuait la tisane au-dessus des braises, à l’évidence sa présence ne le gênait en rien… Ceci confortait l’idée d’Alicia : leur apparente politesse, gêne, timidité, discrétion, n’était pas un reflet de leur nature profonde. Sûrement avaient-ils pris l’habitude de bien plus d’aisance dans les grands châteaux de l’Est… Ciel que cette ville devait leur paraître froide, glaciale même. Lorsque l’exorciste lui répondit enfin Alicia ne sut pas s’il fallait qu’elle soit amusée ou bien vexée de l’interprétation du ton de sa voix qu’elle avait voulu digne et plutôt neutre. Peut-être ses feintes s’usaient-elles...


« Vous avez donc entendu. Bien sûr vous ne jugez pas, vous ne possédez point d’informations à mon propos vous permettant une interprétation de mes paroles. Des paroles inconscientes d’une veuve endormie… »

L’intonation d’Alicia n’était pas tranchée, comme à son habitude, elle faisait sentir cette pointe pimentée de sarcasme juste assez dissimulé pour ne pas donner l’impression d’une attaque personnelle. Le fait était pourtant qu’Alicia ne pouvait laisser cet homme avec ces informations, bien qu’elles ne fussent pas directement utilisables. Elle devait ressentir d’avantage le personnage. Alicia se dirigea vers la table ou mangeait l’exorciste et s’assit à quelques mètres de lui, saisissant un verre à pied et la bouteille de vin qui s’élevait sur la table. Elle se servit soigneusement, puis posa son vers devant elle avant de poser un regard presque complice, amusé, sur le moine.

« Peu crédible pour un exorciste non ? Ne pouvez-vous pas imaginer à quel genre d’entité je m’adressais dans cette chambre ? Ma voix était-elle celle d’une femme engourdie dans son sommeil ? L’histoire de cette ville et de ce château ne vous inspire-t-elle pas quelques hypothèses excitantes quant au destinataire de ces mots vifs ? »

Alicia teintait ses mots d’un faux mystère, comme pour mener l’exorciste sur la voie de la Vérité. De son regard prédateur elle le testait, cherchait sa véritable nature tout autant que celle de son masque, tout le monde portait un masque qui en disait long sur sa vraie personnalité…

« Allons réfléchissez bien frère… Pardonnez mon impolitesse et mon manque de mémoire, quel est votre nom déjà ? »
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeDim 26 Avr 2009 - 12:57

Que cette femme était intelligente ! Quelle perception du monde intéressante ! Comment pouvait-on savoir et être en même temps ? Elle connaissait et acceptait ses défauts. Quelle grande dame. Son égo ne semblait pas lui poser un quelconque soucis, puisqu'elle l'avait accepté. Ses mots étaient sûrs. Kerwan commençait à croire que cette dame était réellement intéressante. Intéressante, comme un sujet d'étude, bien sûr. Une comtesse, n'était-elle pas censée rester dans l'ombre de son mari ? C'était pourtant ce qu'il avait pu observer dans d'autres villes. La comtesse se tait, et n'a pas d'opinion. Elle part parfois rejoindre des amies avec qui elles parlent de sujets divers. Mais elle n'a jamais vraiment d'avis. Cette comtesse là paraissait prendre position, peut-être était-ce dû à la perte du comte. Quel caractère ! La soirée promettait d'être amusante. Kerwan laissa échapper un petit sourire furtif. Heureusement, la dame était toujours retournée.

Toujours debout, appuyé contre la table, le frère regardait la comtesse s'employer à son activité. Nombres de dames nobles auraient réveillé un employé pour faire bouillir quelques herbes. Elle, non. Etait-ce par grandeur d'âme, ou voulait-elle être toute seule ? Si la dernière réponse était de mise, elle devait sûrement être déçue. Mais la situation ne changerait pas, il ne voulait laisser s'enfuir un tel mystère, maintenant que la dame l'avait rejoint et semblait encline à discuter. Elle ne semblait même pas vouloir esquiver le sujet.

Il aurait été naïf de ne pas sentir cette pointe de sarcasme qui montrait le bout de son nez. Kerwan n'était pas naïf, et il se demanda ce que voulait bien dire cette réponse. Il était délicat de s'employer à une interprétation, aussi la laissa-t-il aller jusqu'au bout de ses phrases. Si elle avait pris trop vite la porte de sortie qu'il lui tendait, cela lui aurait clairement indiqué qu'elle avait quelque chose à cacher. Mais là, elle s'amusait avec, et semblait même le défier. Oh, quel caractère ! Si elle ne s'était pas retournée à ce moment là, Kerwan aurait sourit, d'un sourire qui aurait fendu complètement son visage en deux. Cette dame ne lui faisait pas peur malgré son caractère, et les conclusions qu'elle semblait tirer hâtivement. En réalité, cette dame l'amusait, et il ne tiendrait pas rigueur de ses pirouettes. L'homme d'église était un exorciste, confirmé qui plus est, qu'avait-il à craindre de la femme qui cri dans la nuit ?


"Frère Kerwan, Ma Dame."

Il n'avait pas l'intention de se jeter dans les mots tout de suite. Il ne parlait pas souvent, surtout aussi longuement. Les mots étaient à la fois trompeurs, amis, et ennemis. Ils avaient des rôles si différents selon les bouches et les oreilles, que Kerwan préférait les utiliser seulement lorsqu'il voulait obtenir quelque chose. Pour les mondanités, Jonas était là.
Aussi, frère Kerwan s'étira quelques secondes avant de se retourner vers la veuve qui s'était assise, un verre de vin devant elle.
Tiens donc, mélangeait-on alcool et tisane dans ce village ? Etait-ce une invitation à se saouler ? Kerwan préférait boire seul, au moins, les mots ne s'échappait pas. Mais un homme d'Eglise ne boit seulement lorsque le vin représente le sang du christ. L'homme renvoya un regard amusé à la comtesse qui l'observait comme elle l'avait fait lors du diner d'arrivée : comme si elle voulait lire en lui.


"Être un exorciste ne me rend pas paranoïaque, Ma Dame. Vous savez, tout évènement qui peut paraître étrange n'est pas forcément un évènement surnaturel. Nous évitons de lire dans les feuilles de thé, cela fait aussi parti de notre métier. Me blesser, me cogner, ou tout évènement néfaste qui peut m'arriver, je ne l'accorde pas au malin, mais à ma maladresse. Faire un songe heureux, je ne prends pas cela comme une prémonition. Il y a tout un travail d'enquête à faire en amont. Nous venons juste d'arriver, bien sûr, nous avons rassemblé quelques bribes d'informations, mais pour le moment, si sorcières il y a réellement par ici, nous ne les avons pas encore vu."

Il marqua une demi seconde de pause.

"Que votre voix n'ai pas paru ensommeillée, soit, je veux bien vous l'accorder, mais pour avoir entendu mes camarades animés par de mauvais rêves, je peux vous assurer que lorsque l'on parle fort dans notre sommeil, la voix paraît tout à fait naturelle. Maintenant, si vous cherchez à me dire qu'un fantôme vous hante, et vous semblez sous-entendre la présence de votre mari, alors je serais heureux de vous venir en aide. Mais sachez, et nous l'avons appris, que souvent la présence d'un fantôme sous-entend qu'il y a regret, ou autre sentiment du même genre, de la part de la personne hantée."

Oui, le jeu devenait dangereux, mais il en valait la chandelle. Kerwan avait terminé ses mots en ayant cet air grave, sérieux, qu'ont les gens expérimentés qui savent ce qu'ils racontent.
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Alicia Loewenstein
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeDim 26 Avr 2009 - 16:50

Kerwan, c’était bien cela… Si la Comtesse devait avouer ne pas avoir eu grand intérêt des présentations des noms des exorcistes, il lui semblait avoir entendu prononcer ce nom par un exorciste de la troupe durant le dîner. De ce dont Alicia se souvenait, Kerwan n’avait pas fait partie des grand bavards de la soirée. Une pointe d’introversion au sein même d’un groupe pouvait signifier bien des choses, d’un manque de conversation dû à un manque d’intelligence notoire, à l’expression silencieuse d’un caractère trempé et solitaire. La seconde possibilité semblait plus encline à satisfaire le portrait de ce moine dont l’intelligence ne semblait pas être une lacune. Son regard était trop complexe. Son expression sur son visage trop maîtrisée. Sa façon de parler trop appliquée. Non Alicia n’avait pas à faire à un ours chrétien et débile. Une nouvelle fois allait partait en chasse, et la proie était à seconde vue plus intéressante et coriace que prévu…

En effet, l’invitation subtile d’Alicia ne fonctionna pas. Le moine ne buvait pas. C’était pourtant un stratagème utilisé mainte fois par la Meneuse pour parvenir à des réponses fluides de façon efficace. Mais Kerwan n’était pas un pigeon de taverne. Il faudrait jouer sans plus d’artifices. La sorcière se rappelait dans un frisson son dangereux entretien avec l’inquisiteur hérétique, lui non plus n’avait pas bu. L’exorciste n’était pas inquiété par le soudain intérêt de la Comtesse. Tant mieux, il n’avait donc sûrement pas entendu beaucoup de ragots de serviteurs traumatisés ou de nobles frustrés… Il débutait donc cette discussion sans autre avis sur la dame que celui qu’il avait eu le temps de se faire par l’histoire du château et leur première rencontre durant le dîner. Nonobstant, le dîner n’avait pas été des plus anodins non plus…

Les premières suites de phrases alignées par Kerwan attirèrent fortement l’attention de la Comtesse qui buvait ses paroles bien plus voracement que son vin qu’elle effleurait alors à peine de ses lèvres délicates. Tandis qu’Alicia menait la réflexion de l’exorciste vers les âmes errantes, ce dernier terminait la première partie de son explication par l’évocation des sorcières. La courte pose que Kerwan fit suffit à Alicia pour se dire que leur objectif ne se trouvait donc peut-être pas uniquement dans l’éradication des esprits revenants… Mais pourquoi s’intéresser aux sorcières lorsqu’on est exorciste ? N’avaient-ils pas suffisamment à faire ? Alicia imaginait déjà les intrusions des exorcistes dans les affaires de l’inquisition et le joyeux bazar que cette situation engendrerait…


« Frère Kerwan, vous doutez donc de l’existence de sorcières à Forbach ? Pourquoi n’iriez-vous pas vous procurer quelques documents d’archives pour vous faire un avis ? Car croyez-moi, pas un seul être rationnel ne peut en douter ici bas. Sources ensorcelées, pendaisons miraculeuses, empoisonnement funestes, invocation d’esprits… Ne serait-il pas présomptueux de douter de la santé mentale d’une population entière ?»

Alicia sourit, taquine. Et c’était sincère, il fallait décidément venir de très loin pour ne pas croire aux évènements qui se passaient au sein du comté. Si le pape était allé jusqu’à les convoquer d’urgence pour aider à la fermeture de la bouche des enfers…Si la Comtesse le prenait aussi légèrement, c’était qu’elle ne s’en faisait vraiment pas quant à la découverte prochaine de la réalité du mythe qui laissait aujourd’hui perplexes les disciples du Père Marcus. Alicia laissa flotter un court silence, le temps de la réflexion pour Kerwan, puis elle répondit à la seconde explication de l’ecclésiastique aguerri. Cette seconde explication semblait vouloir justifier son sentiment d’avoir entendu une femme parler durant son sommeil.

Lorsqu’il parla du Comte en l’associant par généralité expérimentale à un regret de la Comtesse, Alicia ressentit un petit pincement au cœur. Non pas que ce fut son mari qui la hanta, mais qu’en effet, elle regrettait bien des choses à présent. Ce « Mais » signifiait quant à lui bien des choses. Sous-entendait-il qu’il y avait un risque pour la Comtesse d’en savoir plus sur elle à vouloir l’aider ?


« Forbach doit se présenter à vous comme un immense terrain de jeu n’est-ce pas ? Faire la part entre l’imaginaire et le réel, entre le Mal extérieur et intérieur… Car sachez qu’ici, des regrets il y en a de toutes parts, et des esprits aussi. »

Alicia, qui tenait toujours son verre par le pied, l’écarta un peu sur la gauche toujours en fixant Kerwan, puis après s’être raclé la gorge, elle poursuivit :

« À présent dites-moi… Vous pensez-vous capable de sentir la présence d’un esprit errant, de déceler la limite entre le fantasme et le fantôme ? »


Dernière édition par Alicia le Mer 29 Avr 2009 - 19:15, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeLun 27 Avr 2009 - 22:17

Le visage de Kerwan s'éclaira soudainement d'un maigre sourire qui paraissait totalement innocent. La donne venait de changer, le jeu de commencer. Cette insomnie ne serait finalement pas une calamité, il en apprendrait peut-être un peu plus sur cette ville. Le prix à payer était bien sûr des mots. Des discours, des phrases, tout ce qu'il pouvait détester.
L'homme passa sa main dans ses cheveux à nouveau, il lui était difficile de réfléchir à une heure pareille, et il ne fallait absolument pas qu'il fasse de faux pas. C'était l'histoire de toute une vie, et pourtant, les faux pas ne manquaient pas. Qui pouvait dire s'il avait laissé des cadavres derrière lui, et combien il y en avait eu ? Bien sûr, Kerwan avait préféré ne rien dire sur ses antécédents, c'était sûrement mieux ainsi. Mais "l'incident" qui avait eu lieu, des années auparavant était une part de lui plus que présente.

Kerwan se dirigea vers un coin de la cuisine pour prendre un verre d'eau.

"Douter, Ma Dame, fait partie de tout être humain. Je ne peux pas douter de la présence d'un esprit, puisque c'est quelque chose que j'ai déjà rencontrer. Mais jamais jusqu'ici je n'ai eu affaire à une vraie sorcière. A l'époque où l'aimé Père Marcus nous emmenait de villes en villes pour parfaire nos connaissances et nous montrer le métier, nous étions arrivés chez un ami à lui, qui lui avait demandé son aide. Un petit village sans prétention, lugubre même. Les gens s'y dénonçaient pour un oui ou un non, accusant leurs voisins de fautes graves, comme le vol, le meurtre, ou même de sorcellerie. Les morts s'accumulaient dans une fosse à ciel ouvert."

Dos à la dame, l'homme d'église soignait le ton de sa voix alors qu'il remplissait son verre. Cette histoire n'était pas vraie, mais il n'était pas difficile de l'inventer, après toutes celles que les exorcistes avaient mises en scène. Kerwan fit une pause, comme s'il se plongeait dans des souvenirs douloureux, la voix un peu éteinte, un peu murmurée sur la fin de sa phrase, et puis reprit la direction de la comtesse afin de s'asseoir là où il se trouvait avant son irruption.

"Nous avons alors rapidement commencé notre travail d'enquête, et avons commencé par interroger les accusateurs. Les témoignages paraissaient improbables, et même leur justice était altérée. Nous comprenions que quelque chose n'allait pas. Finalement, ce fut une jeune femme qui nous avoua que l'accusation lui avait été soufflée par une voix. Elle rajouta même que cette présence planait dans le village à la recherche de justice et qu'il était difficile de lui résister. Après quelques rituels surveillés par le Père Marcus, nous n'avons jamais pu trouver la moindre trace d'un quelconque esprit. Pourtant les accusation continuaient à fleurir. En réalité, nous avons découvert que les villageois avaient été profondément choqués par les actes d'une vieille femme que tous prenaient pour une guérisseuse et qui s'est avérée être une empoisonneuse. On nous raconta qu'elle avait tué de nombreuses personnes en douce, durant ses années de vie dans ce village. Ils l'ont prise sur le fait, et après l'avoir jugée, l'ont tuée. Depuis tous les habitants vivaient dans la peur, et je pense que l'on pouvait alors parler d'hallucination collective. L'ambiance était un peu effrayante, je dois l'avouer, mais Père Marcus su trouver les mots pour les apaiser."

Une fois sa petite histoire terminée, Kerwan pu enfin boire le verre d'eau qui lui faisait de l'œil depuis quelques minutes. La gorge un peu sèche, l'homme racla légèrement sa gorge avant de reprendre, face à la comtesse.

"Excusez-moi, si je doute des paroles d'un village entier, et si mes propos vous ont fait penser à une quelconque insulte. Je suppose que si le Pape nous a convoqué ici, c'est qu'il y a un réel problème. Néanmoins, vous savez, j'ai un petit côté en moi de Saint Thomas. Mais nous ne sommes pas ici pour régler le problème des sorcières, on nous a rapporté que les habitants de ce village étaient hantés par des esprits. Je ne peux que supposer que ces deux faits ont un lien. Ma curiosité pour les sorcières n'est pas anodine. Néanmoins, peut-être pourriez vous m'en apprendre un peu plus sur votre ville."

L'homme repoussa son verre à présent vide et plongea son regard dans celui de la comtesse.

"Et puisque vous semblez certaine de la présence d'esprits en ces lieux, autant me dire tout de suite à qui mes amis et moi-même allons avoir à faire."
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeMer 29 Avr 2009 - 22:32

Des étrangers à Forbach, il n’y en avait jamais beaucoup. Oui, c’était chose rare, peut-être à cause du temps souvent couvert dans cette cuvette entourée de forêt, peut-être à cause de l’atmosphère maussade qui toujours régnait, peut-être à cause de l’histoire de la ville qui fusionnait tant avec les légendes locales. Il y avait de quoi en effrayer plus d’un. Alors lorsqu’Alicia avait sous les yeux un spécimen qui avait de l’esprit de surcroit, elle prenait un éminent plaisir, bien dissimulé mais pas moins vrai, à lui parler. Lorsqu’en plus elle trouvait en ses paroles des révélations sur sa vision du problème en cette ville ainsi que ses préoccupations, Alicia plissait les yeux comme un chat apercevant le bout de la queue d’un rongeur dont il n’imagine pas la taille… Ainsi donc Kerwan avait bien la présomption de douter de la santé mentale de tout un comté. Alicia en était ravie. La conviction d’un pessimiste était toujours un défi glorifiant. Malheureusement la tâche ne serait ici que peu complexe, le temps et les convulsions chroniques de la ville s’en chargeraient eux-mêmes.

« Saint Thomas demanda à toucher les plaies du Christ pour croire à sa résurrection si ma mémoire est bonne… La démarche est éclairée, mais à vouloir tâter des blessures attention à ne pas vous y faire mal vous-même frère Kerwan. Les sorcières n’ont même pas besoin de lances… »

La Comtesse se dit intérieurement qu’en faisant référence à la Bible et aux évangiles, dont elle se souvenait de son ancienne éducation catholique, elle pourrait plus aisément toucher le moine dont la curiosité pouvait bien s’avérer être un danger si elle était poussée à une quelconque détermination inquisitoriale… Kerwan s’était retourné un verre d’eau à la main, Alicia observait la sombre surface se faire avaler par l’exorciste, comme pour faire passer cette amère anecdote dont il lui avait fait part. Puis, l’homme plongea en elle son regard afin de solliciter plus directement sa prise de parole. C’était chose rare que quelqu’un se prête ainsi à son jeu. Alicia sourit, amusée. La demande était cependant troublante d’une certaine manière pour la Comtesse. Elle avait soudainement l’impression de faire partie des meubles. D’être une des pierres de ces murs, un des pavés de la grande place, une des cloches de l’église, un des arbres de la forêt, ayant tout vu durant des années…

« Vous dire à qui vous allez avoir à faire… Frère Kerwan, je ne sais pas si vous avez conscience de l’étendue du désastre qui vous attend dans cette ville… »

La Meneuse but une gorgée de vin en faisant mine de replonger en arrière dans son esprit avant de reposer soigneusement le verre, le faisant tourner du bout de doigts appliqués sur son pied, comme l’aurait fait une personne pensive.

« D’après ce qu’on m’a dit, si la présence d’esprits errants chez quelqu’un est signe de regrets de sa part, le véritable danger est dans la présence d’un esprit qui a lui-même des regrets, des choses à terminer, des mots non dits ou bien des actes non perpétrés… »

Fixant à nouveau Kerwan, Alicia continua d’un ton moins penseur, plus grave.

« Voici des années que l’inquisition brûle des femmes, ici à Forbach plus que partout ailleurs. Louis Institoris s’est posé comme un bourreau dictatorial, j’entends ce qualificatif au sens premier du terme : il est investi d’une mission et a pleins pouvoirs. Un régime de terreur s’est installé. Malheureusement pour l’inquisition ainsi que pour elles, les sorcières de Forbach n’ont jamais été qu’une légende païenne. Vous apprendrez par vous-même qu’à Forbach les lois strictes de la Nature sont rapidement bousculées. Et il arrive que ces bouleversements affectent toute la population : l’année passée les sources d’eau de toute la ville étaient ensorcelées de façon à ce que la vision, le touché ou l’absorption de l’eau de tous les habitants renvoyait l’esprit du malheureux à ses plus douloureux souvenirs. Un nombre déplorable de personnes furent retrouvées noyées, suicidées ou bien sombrées dans la folie. En réaction M. Institoris organisa un grand bûcher exemplaire à la sortie de la Messe, y furent brûlées vives trois femmes accusées soupçonnables… Pour y répondre les sorcières pendirent trois inquisiteurs par les pieds, préalablement égorgés, à l’orée de la Forêt. S’y ajoutèrent divers morts dans des circonstances mystérieuses. Ma propre sœur fut empoisonnée d’une façon inconnue. Une nuit, pendant l’été dernier, les inquisiteurs sont entrés de force dans les habitations de tous, même ici au château. Il y a eu des dizaines d’arrestations, presque autant de condamnations et donc d’exécutions. À l’automne ce fut le Comte qui fut assassiné d’une main encore ignorée... Oui, l’année passée ne vit naître que des veuves et des orphelins... »

Alicia déglutit un peu difficilement, les yeux à peines humides mais le regard dur.

« Alors, frère Kerwan, si ces esprits revenants sortent de nos esprits, le Mal que vous aurez à combattre sera l’hallucination, le mysticisme et la peur. Si ces esprits sortent bien des limbes, le Mal à défier sera le regret, la folie et la vengeance… Je ne saurais vous dire lequel est le pire. »

La Comtesse avala une gorgée de vin, un peu plus longue que les précédentes, avant de rétablir sur son visage une expression des plus aimables, des plus convenables à son rang. En reposant son verre elle interrogea à nouveau Kerwan :

« À présent mon frère, répondez à ma question passée : en tant qu’exorciste, êtes vous sensible à la présence d’esprit ? Si vous ne savez pas immédiatement lorsqu’un lieu ou une personne est hantée, comment pouvez-vous déterminer si l'esprit est réel ? »
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeVen 1 Mai 2009 - 17:45

Les allusions à la bible n'étaient jamais anodine. Bien sûr, Kerwan connaissait le livre par cœur, car il l'avait lue et relue nombre de fois au monastère. Il se contentait souvent d'allusions simples, car peu de gens pouvaient se permettre de comprendre les autres, et qu'il n'aimait pas le personnage du prêtre qui lançait des citations à tout va. A chacun le personnage en accord avec sa personnalité, après tout.

La réponse de la dame le contenta. Tiens, voici une femme croyante, ou du moins, qui connaissait la bible. C'était assez important de savoir ça, et en même temps, ça n'était pas étonnant. Quelqu'un qui croit autant à l'irréel, aux sorcières, et tout ce qui allait avec, croyant forcément en une force divine. Du moins, ça semblait logique. Aussi, l'homme d'église se contenta de continuer à l'observer tout en restant sur ses gardes. Il la regarda boire une nouvelle gorgée de vin, et avoir une méticuleuse attitude pensive. Pouvait-il espérer qu'elle finisse par être assez saoule pour parler ?

Il n'était pas difficile de déceler dans les propos de la dame une certaine aversion pour Louis Institoris, Kerwan en pris soigneusement note, histoire de voir ce qu'il pourrait en tirer plus tard. Il était difficile de répondre à tous les mots que prononçait la comtesse. Elle semblait parfaitement persuadée de l'existence des sorcières, et Kerwan n'était pas là pour l'en dissuader. Au contraire, il aurait plutôt aimé lui en demander plus à ce sujet. Mais après tout, que ferait-il s'il se retrouvait face à une de ces sorcières ? Il aurait peut-être une petite centaine de questions à poser, mais après tout, pour le moment, il ne savait pas ce que serait sa réaction. Autant s'en tenir aux propos du moment.

Néanmoins, la comtesse commençait à perdre un peu de son intérêt. Kerwan avait aimé la femme forte, caractérielle, qui trouve un intrus dans sa cuisine et qui lui montre assez subtilement qu'elle ne voulait pas de lui en ces lui. La voici, buvant ses paroles, au regard dur qui en disait si long. Et cette facette semblait moins intéressante. Ce changement d'attitude, pourtant à peine perceptible, fit l'effet à l'homme de se retrouver face à une petite fille que quiconque aurait envie de protéger. Kerwan s'en ennuyait d'avance.


"Ma Dame, je ne peux pas vous dire que mon équipe et moi sommes infaillible, ce serait bien trop prétentieux. Peut-être que jusqu'ici nous avons été chanceux, la suite nous le dira. Nous ne sommes pas plus sensible à un esprit que vous. Nous sommes juste plus... suspicieux. Certains rituels nous donnent la capacité, s'ils sont bien effectués, de déceler une présence, et parfois même de voir l'esprit. Il y a néanmoins, et ce doit être l'expérience qui parle, un ressenti, parfois, qui nous induit sur la piste d'un esprit. La possession, elle, n'est pas difficile à déceler."

Il fallait être prudent, les exorcistes n'avaient pas encore pris la peine de monter un plan digne de ce nom pour se sortir du pétrin qu'était Forbach. Autant ne pas s'avancer tout de suite, et laisser prudemment de la marge.

"Ma Dame, y aurait-il quelque chose que vous voudriez partager avec moi ?"

Kerwan venait d'employer le ton de la confidence, en une dernière tentative pour rendre à la comtesse son côté intéressant. Il voulait déceler quelque chose à nouveau, ne plus sombrer dans de la discussion futile qui pourrait entraîner la défaite de son groupe.



[Désolée, ce post n'est pas très long, et pas des plus palpitant. Je n'ai pas vraiment le temps. Wink ]
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeJeu 7 Mai 2009 - 23:05

[ça me va très bien je suis aussi un peu pressé ^^]


Le verre miroitant de son fluide pourpre voyait sa surface s’approcher du fond. Alicia n’avait pas peur de son effet, il y avait bien longtemps qu’elle ne craignait plus les effets de l’alcool dans les proportions de sa maîtrise. Mais décidément ce moine devait être tout à fait atypique puisqu’il ne buvait pas et ça… la Meneuse ne l’avait encore jamais vu. Peut-être étaient-ce les autres qui n’étaient plus dans la normalité. Rien en Forbach ne restait bien longtemps dans la normalité. Ceci dit, la discussion restait sur un ton suffisamment franc pour ne pas encore être dans le besoin d’avoir recours à quelques faiblesses de l’autre. Alicia avait parlé à cœur ouvert, mais le but y restait encré : conserver cet accent d’honnêteté. De plus, si elle voulait voir qui se cachait derrière le masque elle se devait de tenter de le toucher ou de l’inquiéter. Le résultat n’était pas là, inutile de le dire. Alicia avait repris son regard presque plissé et cherchait à étudier ce que pouvait bien laisser entendre cette non-compassion, ce passage direct à la seconde partie de son discours…

Lorsque Kerwan émit l’idée que les exorcistes n’étaient pas plus sensibles aux esprits qu’elle, Alicia sourit. Si seulement il pouvait imaginer une seule seconde en cet instant à qui il parlait. Alicia en savait beaucoup sur les esprits et c’était bien l’une des plus fascinantes progressions du Lys Noir que la communication avec ces derniers. Pouvoir sentir leur présence était une faculté qu’elle avait amplement acquise. Un simple courant d’air froid ou bien une âme chagrinée, elle savait. C’était ce genre de secret qui rendait l’échange si incomplet, si imprécis, presque faux, mais excitant. S’il savait. Cependant l’excitation qu’aurait du ressentir Alicia fut gâchée par la déception. Alicia s’était mise en tête qu’à force d’exercice les exorcistes auraient pu développer un sixième sens… mais à l’évidence non. Ils gardaient une vision de leur pratique mystique très technique. La seule intuition dont parlait l’ecclésiastique portait sur l’enquête et non la compréhension de la présence.

Lorsqu’enfin Kerwan parla de possession Alicia eut un temps d’arrêt. Bien qu’elle n’en ait pas vu beaucoup, de sa faible expérience et des écrits qu’elle avait pu étudier, la possession d’un être était loin d’être aussi décelable qu’il semblait le dire. L’esprit revenant côtoyait l’esprit présent et la plus forte représentation visible était une folie dégénérative accompagnée parfois d’évènements surnaturels certes, mais les premiers stades, les plus dangereux n’étaient quasiment pas visibles. Finalement peut-être ces exorcistes avaient-ils une longueur d’avance sur Alicia – et c’était après tout, tout ce qu’elle leur souhaitait dans la conjecture actuelle. Cela dit la curiosité d’Alicia, sans passer le seuil de la suspicion, continuait à s’épaissir.

La question, ou plutôt l’invitation, que Kerwan lui tendit fut suivie d’un léger blanc, celui qu’imposait la réflexion d’Alicia et qui risquait de mettre sa réponse en valeur. Car à cet instant la Comtesse aurait voulu lui répondre non. Bien sûr que non ! Alicia ne voulait rien partager avec cet homme. La question n’était pas là au fond : Madame, y aurait-il quelque chose que vous voudriez de moi ? Y aurait-il quelque chose que vous vous devez de partager avec moi ? Alicia saisit son verre en fixant ce regard demandeur de confidences, elle en était presque dégoûtée mais c’était le jeu, et d’un geste affable termina son verre.


« Frère Kerwan… non. Personne ne veut de vous ici, vous ne pouvez que vous en être aperçus. Nous avons tous mal et nous vous voyons comme un onguent curatif mais douloureux. Et nous en avons assez de souffrir. Je ne veux rien partager avec vous, je ne vous connais même pas. Malheureusement ma situation est à l’instar de celle de cette ville : nous le devons, c’est une question de survie. »

Alicia soupira puis reprit aimablement :

« La question, frère Kerwan, est : qu’attendez vous de nous ? Comment comptez-vous nous aider, un par un en commençant par moi ? »

Alicia avait un petit sourire ironique voilant un questionnement plus que sérieux.
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeDim 17 Mai 2009 - 15:35

Le regard plongé dans celui de la comtesse, en attente d'une réponse, Kerwan eut le temps d'imaginer toutes les réponses possibles et réalisables. Toutes, oui, sauf celle avancée. A priori, la dame n'avait pas bien compris le sens de sa question, ou peut-être n'avait-elle fait que l'occulter. Un peu déçu, l'homme ne sut pas vraiment comment réagir, et il esquissa involontairement un petit sourire amusé indécelable puisqu'il le transforma immédiatement en un rictus de souffrance. Le sourire ironique que proposait la comtesse n'arrangeait rien.

Le frère posa les yeux vers le sol, le visage, les lèvres, faisant la moue. Sa main droite frotta dans l'ordre : ses yeux, sa tempe, sa nuque, puis son épaule. Cette position devait être inconfortable pour Frère Kerwan, et puis, qu'y avait-il à répondre à un tel rejet ? Il émit une sorte de soupir pensif et distant. Sûrement, aurait-il dû partir à cet instant, réveiller ses frères et quitter la ville. Oui, si tous les gens de ce village émettaient le même opinion, alors où était la place de quelques religieux venus leur apporter la paix ? On ne peut décemment pas forcer les gens à accepter une aide qui n'est pas voulu. Sauf lorsque l'on est un usurpateur.

Kerwan se leva donc, et fit quelques pas dans la pièce pour aller s'adosser contre un lourd placard, les yeux toujours tournés vers le sol. Il tourna son regard soucieux vers la comtesse, sa voix, tremblotante par instants, était animée. Frère Kerwan s'emportait légèrement.


"Ce que nous attendons de vous ? Allons, Ma Dame, vous devez vous en douter, non ? Nous sommes investi d'une mission que nous a transmise notre bien aimé Père Marcus. Sa sainteté le Pape a même décidé de nous faire confiance pour régler vos histoire. Nous sommes terriblement craintifs de ne pas réussir à vous aider, puisque tant d'autres ont l'air de s'y être cassé les dents ! Ne pensez pas que nous ayons de mauvaises intentions, nous sommes ici pour vous aider, et pas pour quoi que ce soit d'autre. Mais croyez-vous seulement que l'on puisse accomplir notre tâche alors que vous êtes tous réticents ? Je comprends, bien sûr, que vous le soyez, et la défiance que vous nous portez, mais vous savez aussi bien que moi qu'essayer de gagner votre confiance serait vain, car quoi que nous fassions, mes frères et moi, vous nous regarderez toujours avec la crainte que nous puissions vous trahir."

Son regard se détourna un peu sur le côté durant quelques trois minutes silencieuses. Kerwan avait peur d'en faire un peu trop, de jouer une carte qui le rendrait trop voyant, mais l'envie de disparaître de cette ville était trop forte. Son jeu était parfait, il le savait. Ses pauses arrivaient au bon endroit. Ses expressions, le ton de sa voix, ses attitudes tout était absolument parfait. Les seuls à pouvoir déceler son jeu étaient ses compagnons, puisqu'ils commençaient à le connaître, et ils savaient très bien qu'il n'éprouvait aucune pitié ou compassion pour ces pauvres idiots. Mais frère Kerwan, lui, s'était vexé, attristé, même, des mots de la comtesse, et du refus qu'on lui offrait en échange de son aide. Et frère Kerwan s'en voulait de s'être ainsi emporté.
La pause émise pouvait sembler être longue, mais elle était juste ce qu'il fallait pour donner envie à la comtesse de parler, ou juste assez pour qu'elle se pose les questions dont Kerwan avait besoin. Lorsqu'il reposa son regard sur la dame, frère Kerwan avait retrouvé une expression neutre, autant sur son visage que dans sa voix.


"Pour savoir comment vous aider, il va simplement falloir que vous nous confiez qui vous hante, et si vous avez une idée de la raison, il vaudrait mieux que nous le sachions. Nous pourrons ainsi établir une manière de les chasser. Mais comme je vous l'ai déjà dit, il va falloir que vous nous fassiez confiance, sans ça, nous ne pourrons rien faire, et si nous tentons quelque chose malgré tout, cela pourrait se retourner contre nous, ou bien contre vous."
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeSam 4 Juil 2009 - 22:04

Alicia observait Kerwan d’un œil analytique, chaque geste traduisait un sentiment, et ceux de Kerwan était d’une limpidité qui étonna la Comtesse en deux mesures : c’était donc ça un être humain normal ? Une personne qui ne cachait pas sa gêne, sa peur ou sa souffrance… D’autre part, Alicia s’étonna de s’étonner. N’était-ce pas honteux de découvrir l’humanité vraie et ses sentiments ainsi pour la première fois ? Elle avait vécu entourée de masques, à tel point qu’elle avait oublié – ou plutôt, elle n’avait jamais appris – que l’être humain n’est pas un loup vénitien. Alicia avait parfaitement conscience que ses paroles étaient particulièrement directes, cependant elle ne s’attendait pas à pareille réaction ! Elle le suivait attentivement du regard sans sembler particulièrement choquée de ce dramatisme. Finalement Kerwan était un simple être « très » démonstratif, c’étaient là les pensées de la sorcière. Elle le regardait avec beaucoup de flegme, attendant simplement des mots pour accompagner la chorégraphie afin d’expliciter les pensées.

L’exorciste devait décidément être particulièrement touché à l’écouté de sa voix pleine d’émotion. Alicia soupira légèrement, elle ne se voulait pas plus offensante mais intérieurement elle regrettait pareille réaction du frère. Le pathos était déjà visible… Les limites des exorcistes n’étaient peut-être plus aussi loin qu’elle l’avait pensé. Ils ne feraient pas long feu. Ici, non seulement les sentiments étaient voilés, mais en plus, ils semblaient vouloir s’estomper progressivement, emportés par les vagues de souffrance écumant l’humanité de Forbach et ses habitants. Non pas qu’Alicia fut insensible, mais le discours du moine ne la touchait pas profondément. Elle ressentait peut-être un peu de pitié pour lui et ses confrères, comme au dîner. Animés de si bonnes intentions et si violemment rejetés. Mais voilà… ici n’était pas ailleurs, et les bonnes intentions devaient défier l’obscurantisme qui était devenu de nature salvatrice pour les habitants. Alicia regarda fermement l’exorciste avant de lui dire d’une voix douce et semblant un peu affectée :


« Frère Kerwan, entendez-vous… Vous dîtes vouloir « régler nos histoires » ? Mais avez-vous idée de l’ampleur du problème ? Malgré votre volonté et votre expérience je crains fort que votre mission soit vaine… Je doute que les habitants de ce comté vous confient ce sur quoi ils ont basés leur vie : leurs secrets. Du moins pas tout de suite, pas tous. Mais comme l’a si bien dit votre ami : Gardez la foi. »

Alicia se faisait presque réconfortante après tant de vérité crument avancée. La jeune femme se leva pour se diriger vers le feu de la cheminée. Ses mains dans son dos offertes à la chaleur des flammes, formant un tableau analogue à une scène récurrente et sombrement célèbre en ces lieux, la Comtesse faisait face à l’exorciste. La réaction envolée qu’il avait eue ne laissait rien présager de bon pour eux par la suite. Peut-être la chose la plus humaine à faire à présent était de… leur dire de fuir. Fuir au plus vite. Charger un carrosse, atteler six chevaux et les fouetter aux flancs pour qu’ils s’envolent loin de cette misère humaine. Après tout ce n’était pas leur histoire…

« Vous savez… il n’est peut-être pas trop tard pour arrêter. Peut-être ce combat n’est-il pas le vôtre… »

Alicia voulait voir, quelle nouvelle réaction cette idée pouvait encore invoquer en Kerwan. Il lui fallait jauger avant de juger. Que valaient ces exorcistes ? Car c’est bien là que résiderait la clef de la confiance du comté. Mais il faudrait un véritable miracle pour pouvoir les convaincre…
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeDim 5 Juil 2009 - 12:52

Un doux silence s'installa dans la pièce, l'on entendait que le crépitement du feu dans l'âtre, qui dansait doucement, faisant virevolter les ombres de la pièce. Kerwan sentit sa chaleur l'envahir, bien qu'il ne fut pas à côté. Il regarda la Comtesse devant la cheminée, de haut en bas d'un regard vide avant de fixer ses prunelles majestueuses. Qu'elle semblait grande et puissante ainsi mise en scène ! En avait-elle seulement conscience ? Sa sombre beauté rayonnait comme un apparat qu'elle aurait enfilé sans le vouloir. Son intelligence rayonnait avec le feu. Cette femme avait une présence que n'ont que les grandes dames, mais Kerwan ne se laissa pas impressionner. Elle ne représentait qu'un bout de chair, de la viande pour les charognards. L'homme ne voulait savoir que ce qu'il y avait dans cet esprit si vif. Son regard se vivifia et se fit un peu plus amusé tandis qu'il ne la quittait pas des yeux. Le silence s'était installé, et Kerwan ferma finalement les yeux de longues secondes durant, tête en arrière, visiblement fatigué par son manque de sommeil. Son regard n'avait été ni brûlant, ni dévorant, seulement insistant, envieux de savoir. Malheureusement, il ne savait pas lire dans l'âme.

Il ne voulait pas de mal à la Comtesse, et n'en voudrait certainement pas par la suite. Son animosité se réveillait au gré de ses humeurs, mais il savait rester prudent, et voyait bien les ennuis qui pouvaient se profiler pour lui, même s'il ne faisait que penser à ses pulsions. Aussi son esprit se tînt-il tranquille. Le frère écoutait le bruit de sa propre respiration et finit par se détendre enfin. Il n'était pas chez lui, mais au bout du compte, il n'avait pas de "chez lui". Il avait le pouvoir d'être chez lui n'importe où, mais les auberges étaient ses endroits préférés. L'envie de chair l'emportait sur n'importe quelle envie, hormis celle de la survie. Et la course à la survie avait commencée à partir du moment où les exorcistes avaient posé le pied à Forbach.

Un petit sourire s'afficha sur les lèvres du Frère. Il n'avait pas envie de parler. Les mots se bousculaient pour pouvoir sortir, et il craignait de n'en dire un de trop. Kerwan n'aimait pas parler, mais il s'était bien douter qu'en décidant de rester dans la même pièce que la Comtesse, il le devrait. Surtout s'il voulait en apprendre plus. Kerwan était plus à l'aise dans la même pièce s'il y était avec au moins un de ses compagnons, car en ce cas il avait le pouvoir de ne rien dire, d'observer, et de pouvoir comprendre les enjeux qui se jouaient. Ici, dans cette pièce, avec la Comtesse, il devait slalomer entre les pièges qu'il lui tendait, et qu'elle lui tendait.


"Vous savez, Ma Dame, commença-t-il les yeux toujours fermés, vous me rappelez ces animaux, ces mères qui protègent leurs œufs des prédateurs."

Il ouvrit les yeux et regarda devant lui. Ses yeux, qui ne fixaient rien en particulier, tremblaient de la flamme de l'amusement.

"L'on pourrait croire que, telle une mère oie, vous protégez vous aussi vos œufs, et cherchez à m'éloigner le plus possible de vos secrets... Et ceci est compréhensible."

La comparaison à l'oie n'était pas anodine, puisque signifiant l'impureté, mais Kerwan ne poussa pas le vice à parler de patte d'oie. La métaphore pouvait donc ne pas être synonyme d'affront. Il soupira, las, et pris la direction d'une chaise qu'il plaça de sorte à être face à la dame, et s'installa. Il avança son buste dans sa direction, posant ses coudes sur ses genoux, les mains dans le vide vers l'intérieur de ses cuisses. Il était à environ deux mètres d'elle, et la regardait resplendir dans le contre-jour que donnait la cheminée.

"Mais vous avez raison, Ma Dame, je dois garder la foi. Et je tiens à m'excuser, l'étiquette aurait voulu que je ne livre pas autant de sentiments. J'aimerais néanmoins savoir ce que vous attendez de moi, ce soir. Car si vous semblez vouloir nous voir partir, mes amis et moi, j'aurais juré qu'un moment auparavant, vous désiriez mon aide pour chasser l'esprit de votre mari."

Il évoqua le Comte avec un ton solennel, histoire de ne pas insulter son esprit aux yeux de sa femme. Il était maintenant temps de jouer franc-jeu, Frère Kerwan se trouvait fort fatigué de cette joute verbale. Elle ne semblait pourtant pas terminée.
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Alicia Loewenstein
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeDim 5 Juil 2009 - 19:37

Alicia observa quelques instants sa propre ombre projetée au sol par la grande cheminée, la marque sombre engloutissait tout sur son passage, règne de l’obscurité. Et pourtant… Kerwan lui restait dans cet angle encore lumineux, se détachant ostensiblement du monochrome. Alicia s’intéressa pour la première fois à son visage puisqu’ainsi il restait à la lumière vacillante des flammes dansantes. Son visage, sous l’effet des variations lumineuses de cette lueur capricieuse, présentait diverses expressions : tantôt la lumière mettait en valeur le gris argenté de ses yeux prononçant un visage simple et presque sympathique, structuré et visiblement entretenu à la vue de la barbe et des cheveux. Tantôt la lumière étendait sur sa face des ombres inquiétantes glissant un éclat quasiment animal dans ses pupilles luisantes. Alicia était intriguée et son regard fixe aurait presque eu de quoi mettre Kerwan mal à l’aise. La Comtesse ferma quelques instants ses yeux comme pour imprimer ces images dans son esprit afin de l’offrir à une étude plus approfondie.

L’ecclésiastique n’était pas un bavard. Ou peut-être avait-il du mal à trouver ses mots, toujours en est-il que les silences se faisaient de plus en plus longs, de plus en plus réguliers. Ils étaient certes toujours décorés de gestes, sourires ou moues ne décharnant en rien l’instant de son sens. C’était un indice important pour Alicia, un homme sachant exploiter le silence était un homme qui réfléchissait, et donc un homme dangereux. Lorsque ce dernier repris la parole Alicia ne put qu’hausser les sourcilles d’étonnement et sourire d’amusement. En moins d’un jour cet exorciste n’hésitait pas à comparer une femme de la haute noblesse avec un animal de basse cours. Provocant ou simplement impertinent ? Le fait est qu’Alicia s’en amusait car c’était de toute manière une aimable faute politique. Peut-être, ainsi que l’indiquaient ses paupières closes, le jeune homme commençait à s’épuiser et ses paroles s’échappaient, nues.

La comparaison était quelque part amusante pour la sorcière… L’oie dans la symbolique ésotérique que connaissait Alicia était un animal représentant le succès social, l’amitié, la confiance… Tout ce qu’elle n’était à première vue pas prête à lui accorder. Kerwan se plaça alors à quelques mètres d’Alicia, pénétrant son ombre, comme on peut accepter le mystère pour venir plus proche. Lorsque le frère s’excusa d’avoir été aussi émotif et démonstratif Alicia eut un léger pincement en elle. Elle se trouvait un peu gênée de pareilles excuses, comme s’il s’était excusé d’avoir été lui-même. Mais comme il le disait, c’était « l’étiquette » et on ne pouvait lutter contre. La personne qu’Alicia fixait et qui la fixait savait ce qu’elle faisait à un point que la Meneuse n’avait pas encore complètement mesuré… Elle s’en rendit cependant parfaitement compte lorsqu’il parla du Comte d’une manière toute respectueuse, toute stratégique. Alicia émit un soupire amusé en détachant le ruban qui tenait ses cheveux, le même qu’elle portait lors de son mariage avec le Comte.

Elle laissa sa tête pencher vers le bas comme par fatigue, permettant à ses cheveux bruns de chuter lascivement, puis les ramena soigneusement derrière ses oreilles avec précision à l’aide de ses deux mains. La chaleur de la cheminée accompagnée d’un très léger courant d’air faisait joliment flotter les fins et sombres filaments de luxure. Deux mèches rebelles encadraient le visage de la belle Alicia don le regard vert semblait pouvoir irradier même dans l’obscurité. L’image ainsi obtenue devrait mieux correspondre au souhait de Kerwan : jouer la carte du jeu franc et direct. Alicia, qui venait de violer sensuellement les lois de la décence conventionnelle, ferma quelques secondes ses paupières pour chercher une force à l’intérieure d’elle-même. Devait-elle avoir confiance et tout dire ? Simplement rectifier l’erreur ? Remettre l’intrigant à sa place et partir ? Mais n’était-ce pas la place du moine à présent ? N’était-il pas là pour l’aider…


« Frère Kerwan, je préfère vous le dire tout de suite, il ne s’est jamais agi de mon mari. Du moins pas sur ce plan là. Ce n’est pas un souvenir qui hante mes nuits, c’est un soupir, une voix, une âme… Alicia respira doucement comme pour sentir l’air et vérifier que la fragrance de la mort n’y rampait pas. Avez-vous entendu parler du meurtre de la défunte Comtesse ? »

Un silence lourd prit place, le feu lui-même cessa de crépiter pour simplement diffuser un ronflement sourd. Alicia ouvrit les yeux droit sur Kerwan, comme un accord, comme une menace.
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeLun 6 Juil 2009 - 13:13

L'ambiance avait changée. Une sorte de malaise s'était levé, rendant l'air quasiment irrespirable. Même le feu était silencieux, comme s'il répondait à la dame. En tant que bon exorciste, Kerwan l'avait bien remarqué, et ses yeux parcoururent un instant l'endroit, sans qu'il ne bouge son visage. Il n'y prêta néanmoins pas une grande attention, car, à n'en pas douter, c'était la Comtesse qui émettait une tension palpable, et ça n'était pas son regard qui le démentirait. L'homme d'Eglise en lui se serait assurément signé devant une telle ambiance, psalmodiant un ou deux Pater Noster pour éloigner les mauvais esprits.

A partir du moment où elle avait lâché ses cheveux, Kerwan avait bien senti que quelque chose changeait. Se confiait-elle à lui, ou était-ce encore une ruse ? Par ce simple geste, elle s'offrait à lui. Il était bien connu que les dames se devaient d'avoir les cheveux noués, attachés par des coiffures trop complexes pour l'œil d'un homme. Les cheveux lâches, libres, n'étaient destinés qu'au mari. Cherchait-elle à briser l'étiquette, ou bien à faire ressortir l'homme qui se cachait sous le prêtre ? Une chaleur commença à envahir son être tandis qu'il réprimait un sourire mauvais. Kerwan préféra baisser la tête et détourner le regard avant de faire quelque chose qui nuirait à ses compagnons.
Bon sang ! Qu'attendait-elle de lui ?! Pourquoi jouer ainsi ? Ne connaissait-elle pas le pouvoir d'une femme sur un homme ? Bien sûr que si, la Comtesse semblait être une femme intelligente. Elle avait forcément une idée derrière la tête. Kerwan joignit ses mains pour se contenir, paumes ouvertes vers le haut.

Il était assis, face à elle, et la regardait de bas. Son attitude se voulait soumise, prête à l'écoute, pleine de confiance. Lorsque la Comtesse parla enfin, Kerwan retint un nouveau sourire. Il restait méfiant, mais si la dame commençait à parler, cela ne laissait présager rien de bon pour elle -mais le meilleur pour l'exorciste.
Intelligemment, il ne dit rien à propos de la rectification qu'elle annonçait. Il savait pertinemment que cela ne pouvait pas être le mari, puisque de ce qu'il avait entendu depuis le couloir, la Comtesse parlait à sa sœur, c'était ses mots-même. Le Frère ne fit donc aucune remarque et acquiesça silencieusement, dans un hochement de tête à peine perceptible, encaissant l'information. Lui révéler qu'il savait n'aurait fait que faire régresser la situation, puisque cela aurait prouvé qu'il l'amenait bien où il le voulait, du moins, si elle ne tramait pas un quelconque piège, ce dont l'exorciste ne démordait pas.

La Comtesse laissa le silence s'installer, Kerwan le sentit oppressant et moins accueillant que ceux qu'il avait l'habitude de lancer dans les conversations privées. Le visage toujours tourné vers le sol, il réfléchissait. Comment une femme aussi intelligente pouvait-elle croire à tant de superstition ? Comment pouvait-elle être sûre que ça n'était pas un souvenir ? Comment pouvait-elle avoir la capacité d'affirmer, avec autant d'aplomb, qu'elle avait identifier un esprit ? Le doute qui affligeait l'exorciste l'étreignit à nouveau. Malgré son statut d'usurpateur, il ne pouvait s'empêcher de douter.
Rapidement, ses pensées disparurent. Il devait se ressaisir et attirer la dame plus à lui dans la confidence. Elle commençait certes à parler, mais pour le moment, cela semblait bien trop vague. Les exorcistes, afin de pouvoir travailler à leur plan, devaient connaître bien plus sur Forbach et ses habitants que les pauvres ragots qu'ils avaient entendu dans les campagnes environnantes.

Au prix d'un certain effort, Frère Kerwan leva les yeux sur la Comtesse, et son visage ne reflétait ni le désir, ni l'envie. Ses yeux, neutres, soutinrent le regard presque menaçant de la dame, sans ciller. Sa voix était calme, posée, presque compatissante. Le sujet qu'elle abordait était sans nul doute grave et triste pour sa personne.


"J'ai effectivement entendu quelques rumeurs sur son assassinat, mais rien de très explicatif. Vos gens ne sont pas très bavards à ce sujet. Permettez-moi de vous demander ce qu'il s'est passé."
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeLun 6 Juil 2009 - 15:40

Alicia se sentait hors du temps et de l’espace. La situation était si inimaginable à présent : elle, la Veuve de Sarrebourg qui s’apprêtait à dire son mal intérieur à un exorciste qu’elle ne connaissait que depuis quelques minutes. Mais qui d’autre pourrait la sauver ? Elle n’y parvenait pas elle-même, et ses tracas restant toujours en elle ne pouvaient que la détruire à l’heure où elle ne pensait qu’à se reconstruire. Elle avait si peur, pour elle et plus encore pour son enfant. A qui se confier ? Sa douce amie Alodia elle ne l’avait pas vue depuis des mois, Carlyn était morte, Mina… sa sombre Mina semblait s’être envolée pour quelques temps comme elle le faisait parfois. Alicia ressentit subitement une pénible solitude. Et lui était là, ses yeux levés vers elle comme le bienfaiteur qu’il prétendait être. Il semblait si authentique, si vrai. Alicia devait-elle se protéger de tant de lumière, de l’obscurité que cette lumière révélait en filigrane ? Devait-elle se protéger ? Elle, sa tribu, son fils… Il fallait qu’elle fasse comme elle en avait l’habitude, dire sans dévoiler.

La Comtesse inspira profondément, son mal de tête la relançait, chaque fois qu’elle pensait à sa sœur sa tête était aussi douloureuse que ses pensées. Elle alla vers un placard de bois ouvragé et en sortit une chope de terre cuite dont elle inspecta rapidement le fond d’une manière si rapide et automatique qu’on sentait l’habitude désincarnée de toute véritable volonté. Elle prit une louche à long manche et le plongea toujours sans un mot dans la marmite fumante suspendue au dessus du feu avant de verser la louchée dans le gobelet avec la technicité d’une servante et la douceur d’une princesse. Elle reposa la longue cuillère et s’assit lentement sur le bord de la cheminée suffisamment excentrée pour ne pas se brûler par mégarde, mais suffisamment près pour avoir trop chaud et devoir détacher négligemment un bouton argenté du col de sa robe, dévoilant un peu plus sa peau immaculée. La sensualité envoûtante qu’elle savait dégagée n’était bien entendu pas anodine…

Elle savait bien que le moine saurait se contenir et elle ne comptait pas réduire la distance qui les séparait, mais elle savait qu’en jouant ce jeu elle prouverait à l’homme face à elle que même prête à se dévoiler, elle restait maîtresse de la situation, que son pouvoir de femme restait une arme. Sa mère le lui avait appris : qui sait manipuler les passions sait manipuler les raisons. C’est bien ce dont elle souhaitait prévenir l’exorciste, la trahison serait la pire initiative qu’il pourrait prendre. La jeune femme se remit à fixer les yeux pâles de l’homme. Portant délicatement la chope de tisane à ses lèvres, elle croisa ses jambes avec une précision féline. Le silence qui avait suivi les courtes paroles de l’exorciste l’invitant à continuer régnait à présent depuis plusieurs secondes. Il fut soudainement brisé par le bruit sec d’une braise qui éclata juste à côté d’Alicia, projetant de petites particules rougeoyantes qui voletèrent lentement jusqu’aux pieds de Kerwan. Une fine flammèche s’était mise à lécher la marmite d’une manière quasi circulaire, dans un silence tenace soutenu par le regard inquisiteur de la Comtesse, créant une atmosphère hypnotique.


« Ma sœur a officiellement été ‘‘empoisonnée’’, seulement voilà… L’histoire est complexe, mais je sais de manière quasiment certaine que les criminelles sont de mes ennemies. Or elle croit… son ‘‘esprit revenant’’, croit que je suis la cause de sa mort. Elle tente de me faire revivre son assassinat chaque nuit depuis son retour, toujours plus atrocement. Elle veut me punir et le ciel sait que je suis punissable de bien des choses mais voilà, de ce crime je ne suis pas directrice. Je suis fatiguée de craindre pour ma vie, et plus encore pour celle de mon enfant, chaque fois que je ferme mes paupières. »

Les paroles d’Alicia n’étaient couvertes d’aucun affect, juste d’un peu de fatigue pas uniquement due à l’heure tardive. Elle avala une longue gorgée de tisane, puis s’adossa lascivement à la pierre tiède de la cheminée.

« Alors mon frère, vous pensez-vous en mesure de chasser mon fantôme ? »
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeMer 8 Juil 2009 - 2:42

L'œil s'attardant un peu trop sur ses courbes féminines, Kerwan dégluti difficilement. Savait-elle réellement à quoi elle jouait ? Ils étaient seuls, dans une salle à l'écart de la vie, en pleine nuit. Personne ne les avait vu entrer ici. Combien suspecteraient l'exorciste si on retrouvait la Comtesse morte, mutilée, demain ? Pas grand monde, en vérité. Mais Kerwan savait qu'il ne devait pas, et il ne cèderait pas. Du moins, pas maintenant. De plus, son attention, durant le dîner, s'était portée sur une autre dame... En attendant, il pourrait toujours aller dans une auberge de la ville, en toute discrétion. Pour le moment, il suffisait de contrôler ses pulsions.

La menace, il l'avait sentie. Elle émanait de cette dame sans aucune pudeur. Oui, mais la menace, il ne l'avait pas comprise. Pourquoi ? Et puis, que pouvait-elle lui faire ? Ce petit bout de viande, même s'il était intelligent, ne pourrait rien faire contre lui, sinon se laisser faire. Kerwan baissa à nouveau les yeux sur le sol, de cette attitude soumise qui commençait à le ronger. Le feu commençait à l'animer de l'intérieur, et la Comtesse, en douce tentatrice, ne savait pas ce qu'elle faisait en lançant une menace de cette manière.

Les yeux plantés dans ceux de la dame, l'exorciste écouta de manière attentive ses explications. Il était néanmoins déjà ailleurs, se demandant comment ses compagnons et lui-même allaient se sortir de cet endroit sans dommage. Il se le demandait surtout pour lui, en fait. Et il en vint à se demander pourquoi il continuait à suivre Jonas. La réponse vint d'elle-même, puisqu'il avait suivit le susnommé Jonas pour l'aventure, pour se sortir d'un satané monastère, et ne jamais y retourner. Pourquoi il était resté pour cette mission papale, ça, il l'ignorait.

Kerwan se leva donc, peu après que la Comtesse eut fini de parler, et commença à faire les cent pas dans la pièce, dans un faciès qui réfléchissait. Quel était le meilleur moyen de procéder ? L'exorciste savait néanmoins ce qui allait suivre. Tout d'abord, quelques paroles censées, et puis, les promesses. Et la suite restait un mystère. Que pouvaient faire des charlatans face à de vrais esprits ? Prenez les paris ! Ce serait bien la première fois qu'ils seraient confrontés à cela. Mais dans l'esprit de Kerwan, la véracités des dires de la dame continuait de se mêler à ses conviction, ma foi, déjà bien emmêlées.


"Il vous faut à présent m'écouter. Ne m'interrompez pas, je vous prie, même si vous pensez que je vous offense, ce n'est pas mon but."

L'exorciste laissa le silence reprendre, laissant claquer ses chaussures sur le sol.

"Se pourrait-il que ces manifestations ne soient que la conséquence à un regret ? Ne vous sentez-vous pas coupable de sa mort, d'une quelconque façon, puisque vous pensez que ce sont de vos ennemis qu'il s'agit ? Ou bien n'auriez-vous pas voulu vous tenir près d'elle avant que son dernier souffle ne soit rendu ? Je ne sais si vous étiez proche de votre sœur, et il serait peut-être important que je le sache. Si vous pouvez, après un instant de réflexion me répondre que ce n'est pas un sentiment de culpabilité qui vous étreint, et vous donne ces cauchemars chaque nuit, alors j'irai moi-même inspecter votre chambre, et demanderai à mes Frères de procéder à des rituels pour tenter de chasser l'esprit."

Il continua à faire les cents pas, et de par cette attitude et son visage fermé, il fit comprendre à la dame qu'il n'avait absolument pas fini.

"Aussi, si vous m'affirmez que c'est bel et bien à un fantôme que vous avez à faire, et non à un tour de votre esprit, alors il vous faut m'apporter d'autres éléments à votre histoire. Qu'est-ce qui vous fait croire qu'elle va vous faire du mal, avez-vous communiqué avec elle ? Ne voudrait-elle pas vous exprimer des regrets, ou tout simplement vous expliquer de quelle façon elle a été assassinée ? Si c'est bel et bien l'esprit de votre sœur, il vous faut me raconter ce qu'elle vous montre."

Kerwan s'arrêta soudain dans son travail d'enquêteur, et se figea, appuyé sur le dossier de sa chaise, debout, et faisant face au brasier, faisant face à la Comtesse. Il la fixa dans les yeux, ne cillant pas, et laissa retomber ses mots. Ni bienveillant, ni malfaisant, simplement neutre, mais bouillant intérieurement de ce masque qu'il portait. Oh, comme il aurait aimé exécuter des gestes déplacés, et jouer avec ce feu ! Il se mordit la lèvre inférieure.

"Ma Dame, prenez le temps que vous voudrez, mais soyez convaincue de ce que vous allez dire."
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeMer 22 Juil 2009 - 23:22

Le jeu de scène reprit dès que l’exorciste eut pu être certain de la finalité des paroles de la Comtesse. Alicia suivait des yeux cet homme semblant mimer chaque attitude avec beaucoup d’application. L’authenticité était-elle si visible ? La Meneuse observait à nouveau l’individu comme venant d’un monde étranger où la vérité et la sincérité faisaient foi tout à l’inverse de son monde à elle. Les pas de Kerwan étaient marqués, appuyant toujours plus l’attitude de réflexion intense, le tout sans une parole. L’exorciste ménageait son effet, la pensée qu’il s’apprêtait à livrer devait être lourde d’importance si l’on en croyait le dilemme que cette histoire évoquait en lui. Finalement les dires du frère tombaient parfaitement là où Alicia aurait pu les attendre : toujours cette question du mal intérieur ou extérieur. Question essentielle, il était indéniable que ces deux menaces puisaient à la même source leur noirceur : le passé.

Alicia n’intervint pas immédiatement, elle commençait à pouvoir prévoir les pauses et les soupirs de la musique jouée par l’exorciste. Celui-ci demanda des détails, mais l’histoire semblait si longue à la Comtesse qu’elle n’imaginait pas possible de donner des « détails » il lui faudrait commencer de la chute de la fille d’Odin jusqu’à la fleur enchantée qui fut à l’origine du vénéfice de l’ancienne Comtesse… Alicia ne s’emballa pas, gardant son clame elle décida de répondre au mieux à chaque question, une par une. Elle posa la tisane sur le rebord de la cheminée, puis, appuyant ses deux mains bien à plat sur la pierre à côté de ses genoux, elle prit une grande inspiration.


« Mon frère, n’avez-vous pas entendu ce que je vous ai dit à propos de ce fantôme ? Mon défunt mari, lui, est un regret et j’ai à son propos également de quoi m’en vouloir. Mais il n’habite pas mon sommeil, il ne me poursuit pas à travers mon reflet dans les miroirs du château, il ne m’insuffle pas la scène de sa mort à répétition. Et pourtant, il me manque bien plus que ma sœur, de laquelle – pour répondre à votre question – je n’ai jamais été très proche. Elle fut adorée par mon père et maudite par ma mère qui me préférait singulièrement. Je crois que ce qui nous a le plus écartée l’une de l’autre fut la mort énigmatique de mon père. Bref, un regret ça se ressent, un esprit ça se sent. Voilà toute ma pensée à ce sujet sans circonlocution. »

Alicia fixa Kerwan droit dans les yeux, ravala une gorgée de son breuvage rougeoyant de la lueur des braises timides du foyer, avant de penser à ce qu’attendait avidement l’exorciste, la sorcière n’en doutait pas : le déroulement de cet assassinat, ses raisons, et donc plus globalement toute l’histoire d’Alicia. Cette dernière déjà se perdait dans mille pensées, mille souvenirs…

« Cet assassinat se fit en vérité sans violence aucune, c’est après tout l’apanage des poisons, bien que celui-ci fut différent : nul besoin de le distiller, nul besoin d’obscur contenant, nul besoin de se méfier… Cette nuit-là ma chère sœur dormait sans le Comte parti quelques jours pour affaire, lorsque quelqu’un frappa à la porte : un messager encapuchonné dont elle ne vit pas le visage mais dont la voix féminine et chaleureuse la mit rapidement en confiance. La messagère lui confia une fleure de toute beauté soit disant cadeau envoyé par son aimé – romantisme en effet perpétré dans les habitudes du Comte attentionné -. Cette fleur avait pour particularité d’avoir un parfum mortel. Et c’est ainsi que ma sœur mourut : croyant respirer l’amour elle inspira la haine et expira la vie. »

Faisant une pose sur ses dernières paroles dont elle trouvait l’écho bien trouvé elle observa quelques secondes l’eau dans le gobelet en souriant poliment, comme pour dédramatiser le récit auquel elle savait avoir donné un tour tragique bien qu’un brin expéditif. Elle reposa ses émeraudes sur le jeune ecclésiastique avant de perdre petit à petit son sourire à mesure qu’elle replongeait dans sa mémoire glacée pour y prélever la suite des explications qu’il attendait. Elle se faisait presque esclave de sa volonté. Il fallait avouer que Kerwan semblait si gentil, véritablement à l’écoute. Et Alicia se sentait si seule ces derniers temps. Sans même pousser la réflexion engourdie par la fatigue les mots d’Alicia se mirent à narrer monotonement le fil des souvenirs que son esprit revisualisait en une succession d’images brumeuses et de murmures rauques…

« Vous voudriez savoir pourquoi cette fin pour la Comtesse, quel début pour quel développement, quelle cause pour quels effets ? À vrai dire ma sœur n’était en rien impliquée, si ce n’est par le sang qu’elle partageait avec moi. Elle fut l’innocente victime d’un conflit qui depuis des années dure entre deux clans à l’instar de la lutte éternelle et manichéenne entre lumière et obscurité. Tout commence dans la légende millénaire qui règne en ce lieu… Connaissez-vous le mythe d’… »

Soudain un bruit vif fit sursauter Alicia. L’eau qui avait continué à bouillir dans la marmite avait débordé sur les braises brûlantes dans un long et bruyant crachat de fumée, tel un avertissement surnaturel. La surprise sortit la Meneuse de sa torpeur. Se souvenant à peine des mots qu’elle venait de prononcer devant l’inconnu dans un état de semi-conscience elle eut un frisson d’effroi en le fixant de ses yeux écarquillés émettant presque une lueur de reproche : il avait failli la percer à jour. Un homme capable de si rapidement mettre une Comtesse sorcière en confiance ne laissait présager à Alicia que deux choses : il était doué, intelligent et donc dangereux. Alicia se ressaisit énergétiquement en retirant la marmite du feu. Elle se dirigea sans plus attendre vers la porte. Cet entretient avait déjà bien trop duré…

« Pardonnez-moi frère Kerwan mais je crains que la fatigue ne me fasse débiter des paroles sans grand sens. Veuillez m’excuser mais je vais retourner à ma chambre. Probablement nous reverrons-nous très bientôt… »

Alicia ouvrit la porte mais se retourna brusquement avec un regard qualifiable de taquin :

« Au fait, mon frère, savez vous ce qui est plus inquiétant qu’une oie protégeant sa couvée ? Plus inquiétant même qu’une prédatrice protégeant sa portée ? Une femme protégeant son enfant.

Bonne nuit… »


[Voilà ! Je n'allais tout de même pas tout dévoiler d'un coup ! =P Je pense cependant avoir donné suffisamment d'indices à Kerwan pour qu'il fasse de solides hypothèses, qu'il n'ait pas perdu son temps tout de même... Merci à toi en tous cas j'ai beaucoup aimé ce RP.]
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MessageSujet: Re: Esprit es-tu là ?   Esprit es-tu là ? Icon_minitimeMer 29 Juil 2009 - 0:54

Nul doute possible, la dame venait de faire fondre sa protection, et voilà qu'elle était à lui. Tout en se disant que ça n'était pas trop tôt, Kerwan ressentit une sorte de soulagement, la sentant sombrer, petit à petit, dans les travers de son esprit. Un peu plus, et l'exorciste aurait fini par laisser tomber, après tout, la partie ne venait que commencer, et il était bien tard. La fatigue aurait surement gagné la partie, cette nuit. Au lieu de cela, Kerwan avait fini par convaincre la comtesse qu'il était un homme de confiance, et voilà qu'elle ne s'arrêtait plus de parler. Ses attitudes, tantôt tragiques, tantôt malicieuses ponctuaient ses paroles d'un charme indiscutable. Il la sentait à elle, comme toutes ses victimes. Il la sentait prête à le croire, s'il lui faisait une quelconque promesse. Il pouvait presque sentir son souffle froid, en détresse sur lui. Autant dire que l'exorciste était ravi.

La comtesse s'aventurait à présent dans ses propres histoires, et paraissait complètement sans défense. Complètement vulnérable. Kerwan laissa s'échapper un large sourire qui se figea sur son visage. C'était celui du conquérant. Fatigué, il ne faisait plus vraiment attention à sa manière d'être. Il n'avait pourtant pas bougé, toujours accoudé au dossier de sa chaise, fixant la comtesse d'un regard dévorant, brûlant du désir d'en savoir plus. Son visage avait quitté son masque de sympathie pour n'être plus qu'un faciès intéressé, voire même de prédateur, pour les plus impressionnables. L'esprit de Kerwan n'était plus qu'intéressé par ce que racontait la comtesse. Un conflit qui dure depuis des années ? Deux clans ? Une légende, un mythe ? Cela semblait fort intéressant.

L'exorciste manqua de jurer lorsque l'eau rappela à l'ordre la langue qui se déliait. Il n'en fit pourtant rien, mais enfila à nouveau son masque, se rendant soudain compte de son erreur. Il aurait voulu en savoir plus mais la dame ne semblait pas encline à en dire plus, et il aurait paru déplacé de demander plus d'informations à propos de cet égarement. Du moins, c'était en effet le cas maintenant, il serait toujours temps d'en reparler plus tard. Il soutint donc le regard que lui lançait la comtesse, ne pouvant toujours pas réprimer un sourire en coin, parfaitement neutre, celui-là, à l'instar de ses yeux qui brillaient de satisfaction. Il regarda s'enfuir précipitamment la petite souris, voulant pourtant la remettre dans ses filets. La chasse ne semblait pas terminée, mais c'était ce qu'elle semblait croire. Sa réaction trop rapide prouvait bien qu'elle en avait presque trop dit, et qu'elle avait fini par avoir peur de lui. Kerwan accepta la trêve en acquiesçant silencieusement. Il finirait bien par savoir ce qu'il en était.

Disons-le clairement, le frère ne compris pas clairement la menace que proféra la dame, mais elle semblait le voir comme une menace. Savait-elle seulement que pour le moment la seule priorité des exorcistes était de sortir vivant du traquenard tendu innocemment par le pape ? Savait-elle qu'il se fichait éperdument de l'enjeu politique que représentait son fils, mais que ce qui l'intéressait était ce qu'elle savait elle ?

"Je vous souhaite également une bonne nuit, ma dame, je vous reverrai certainement demain afin de voir plus en détail cette histoire d'esprit avec mes compagnons." fut la seule réponse qu'il donna à la souris avant qu'elle ne s'échappe, sur un ton plus courtois qu'il ne le fallait.

Kerwan regarda quelques minutes supplémentaires la porte se refermer, plongé dans ses pensées, se demandant ce qui était le plus important à présent, et de quoi parlait la dame. Mentalement absent, et dans un geste presque automatique, l'homme prit une nouvelle tartine, et, persuadé qu'il ne trouverait toujours pas le sommeil, l'exorciste pris néanmoins la direction de son lit, laissant en état la cuisine, rongé par les nombreux vices qui formaient sa vie : la chair, la curiosité, l'envie, l'orgueil et la gourmandise.


[ RP très sympathique et intéressant pour moi, merci beaucoup pour ce jeu ^^ ]
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